Les recommandations d’Arvalis pour choisir sa variété de blé dur ?

L'agriculteur, comme l'organisme stockeur, a intérêt à diversifier ses choix variétaux pour limiter les risques d'accident climatique, et associer points forts et faiblesses des différentes variétés pour la commercialisation. Adapter les variétés au milieu, au type de sol, à la date prévisionnelle de semis, aux contraintes de désherbage, à la tolérance aux accidents récurrents sont autant de facteurs qui doivent rentrer en compte dans le choix de la variété. L'observation des résultats sur plusieurs années, mais aussi sur plusieurs essais est essentielle pour un bon choix variétal.
Valeurs sûres
• Anvergur (RAGT 2013) : référence de rendement actuelle, polyvalente et souple. Tolérance aux maladies et PS moyens. La référence actuelle dans la plupart des milieux. Grâce à une grande souplesse : épi très fertile et PMG moyen mais très élastique. Sa grande fertilité d'épi permet de compenser une implantation médiocre. A sa place dans tous les milieux à l'exception des milieux très séchants où son PS peut chuter, et des milieux très fertiles où elle craint la verse. Tolérance à la septoriose dans les meilleures. Sa tolérance à la rouille brune dérive vers faible depuis son inscription en 2013. Bonne qualité globale sauf PMG et PS juste moyens. Compte tenu de son rendement, sa teneur en protéines est bonne.
• Atoudur (Serasem 2011 - RAGT) : ½ précoce, gros grain et bon PS donne une variété bien adaptée aux sols moyens à séchants. Et une certaine tolérance aux fusarioses. Elle fait son rendement avec beaucoup d'épis, peu fertiles, et un très gros PMG (60 g). En moyenne inférieure de 5 % à anvergur, elle la rejoint en cas de stress hydrique ou thermique en fin de cycle, conservant un meilleur remplissage du grain.
Sa qualité est ainsi peu fragile (bon PS, teneur en protéines assez élevée). Ainsi en milieu séchant, elle fait souvent jeu égal avec claudio à partir de 40 q/ha, avec moins de risque de mitadinage. Sous climat pluvieux en mai, elle montre une assez bonne tolérance aux fusarioses.
• Casteldoux (Desprez 2015) : excellente tolérance aux rouilles. Très bon rendement pour les sols moyens à finition parfois difficile. Belle qualité. Jusqu'à 55-60 q/ha, son rendement est du niveau de celui d'anvergur. Assez précoce, elle construit son rendement avec un épi moins fertile qu'anvergur mais un grain un peu plus gros. Moins souple en cas d'implantation difficile, elle finit par contre mieux. Sa tolérance aux rouilles est excellente. Très sensible à la septoriose, elle a souffert en 2018 du climat pluvieux continu. Sa qualité est bonne avec notamment une assez bonne tolérance à la moucheture qui conforte sa tolérance globale aux maladies de l'épi.
• Claudio (Heliosem 2001, Europe) : référence (vieillissante) en milieu séchant. Avec un fond général de tolérance aux parasites racinaires. Très sensible au mitadinage. En potentiel inférieur à 40 q/ha, avec fin de cycle échaudante, elle n'est rejointe que par santur. Très précoce, elle n'est freinée que par le froid de l'hiver. Haute et sensible à la verse, inadaptée en sol profond.
• Miradoux (Desprez 2007) : sur le déclin, elle rend aujourd'hui 5 % de rendement à anvergur. Sa très grande sensibilité aux rouilles peut être très pénalisante. Qualité irréprochable toujours recherchée (contrats). Epi fertile et grain élastique compensant les densités faibles, les départs difficiles, bonne finition, miradoux n'est déconseillée que dans les sols séchants à cause de sa tardiveté. Ses limites sont sa grande sensibilité aux rouilles brune et jaune (jusqu'à 4 fongicides en 2016) et à Fusarium.
• Nobilis (Limagrain 2014) : rendement dans les meilleurs. La meilleure en cas de démarrage humide et froid. Très bonne tolérance aux rouilles et à la septoriose. Très sensible à l'oïdium et assez sensible à Microdochium. En sol profond, au-dessus de 60 q/ha, elle fait jeu égal avec anvergur. Son élaboration du rendement en est proche avec un nombre d'épis moyen, très fertiles et un PMG moyen mais souple. Sa rusticité est remarquable avec notamment : un bon comportement lors des hivers difficiles (froid, excès d'eau) ; une tolérance aux maladies excellente : très peu sensible aux maladies du feuillage (à l'exception de l'oïdium) et moyennement aux fusarioses des épis. La meilleure et la plus régulière en 2018, en rendement comme en PS. Sa qualité est moyenne mais sans risque marqué, sauf la moucheture en milieu humide. Sa teneur en protéines, comme sa tolérance au mitadinage, souvent jugées faibles, sont en fait normales compte tenu de son niveau de rendement.
• RGT Voilur (RAGT 2016) : potentiel identique à anvergur. Tolérance aux maladies remarquable. Excellente teneur en protéines mais grain petit. Son élaboration du rendement rappelle celle d'anvergur avec un épi aussi fertile mais un grain un peu plus petit ( - 2 g de PMG). Ses tolérances aux rouilles et à la septoriose sont excellentes. Bon comportement face aux mosaïques en 2016. Très courte, elle résiste très bien à la verse. Compte tenu de son rendement, sa teneur en protéines est exceptionnelle. Tolérante à la moucheture.
• Santur (RAGT-Italie 2013) : très précoce comme claudio ; un peu plus productive dans les milieux séchants. Entre 30 et 50 q/ha, elle produit 2-3 q/ha de plus que claudio et son PS est presque aussi bon. Elle construit son rendement avec peu d'épis, fertiles et un PMG proche de celui de claudio. Sa fertilité d'épi la rend beaucoup plus souple que claudio en cas de mauvaise implantation. Toute aussi précoce que claudio, elle est exposée aux mêmes risques de gel au printemps et aux mêmes conseils de date de semis.
• Toscadou (Desprez 2016) : ½ précoce à gros grain et bon PS, finissant bien. Bon potentiel en milieu moyen à séchant. Au-dessous de 55 q/ha, son rendement est du niveau de celui d'anvergur ; à haut potentiel (75 q/ha), il lui est inférieur de 4 %, identique à celui de casteldoux. Sa capacité de compensation est inférieure à celle des meilleures, anvergur, nobilis, voilur. Il faut donc réussir son implantation. Sa précocité, son PMG et son PS élevé lui permettent de bien finir en sol moyen à séchant où elle remplace bien atoudur ou qualidou (potentiel 40 à
50 q/ha). Assez sensible à la septoriose. En 2018, elle montre une certaine tolérance aux maladies de l'épi et maintient assez bien son PMG et son PS.
Variétés intéressantes
• LG Boris (Limagrain 2016) : tolérance aux mosaïques, à la rouille brune et très bon potentiel mais faible en protéines. Son rendement est au niveau des meilleurs jusqu'à 75 q/ha ; au-delà il paraît inférieur, probablement limité par une fertilité d'épi dans la moyenne. Sa tolérance aux mosaïques est la meilleure des variétés actuelles. Sans doute la meilleure tolérance aux rouilles, brune et jaune et à l'oïdium. En 2018, a paru assez sensible aux maladies de l'épi. Gros grain (miradoux + 2 g de PMG), couleur parfaite, mais teneur en protéines vraiment faible
(- 1 % par rapport à la moyenne).
• Relief (Syngenta 2014) : très bon niveau de rendement. Très bonne tolérance aux fusarioses de l'épi et au VSFB. Tardive et à petit grain. Potentiel de rendement égal à celui d'anvergur au-dessus de 70 q/ha. Tardive et de finition lente, elle ne réussit qu'en sol profond. Elle construit son rendement avec un nombre d'épis moyen, très fertiles (plus que sculptur) et un grain petit (PMG inférieur à biensur). Bonne tolérance à la mosaïque VSFB (virus des stries en fuseau) mais inférieure à celle de LG Boris. En 2018, sa tolérance élevée aux maladies de l'épi s'exprime dans le Sud-Ouest ; beaucoup moins dans le Sud-Est où ses résultats sont irréguliers. Sensible aux maladies foliaires (septoriose, rouilles). Sa qualité technologique est bonne, et sa teneur en protéines est moyenne compte tenu de son rendement. Pour les situations à risque fusarioses (précédent maïs, humidité en mai) ou à VSFB.
• RGT Fabionur (RAGT 2014) : un cumul de tolérances intéressant. Mais rendement et PS sont en retrait. Fabionur cumule des tolérances utiles (verse, oïdium, mosaïques, septoriose et rouilles) mais est pénalisée par une finition médiocre qui la handicape en rendement (7 % inférieur à celui d'anvergur) et en PS. Elle apparaît sensible à la sécheresse notamment en montaison. Sa tolérance aux maladies foliaires est globalement bonne, mais inférieure à celle des nouveautés les plus solides. Sensible aux taches physiologiques. De teneur en protéines un peu supérieure à la moyenne, sa qualité est surtout handicapée par un PS inférieur à la moyenne et fragile en cas d'échaudage.
Variétés récentes
• Heraklion (Syngenta 2017) : proche des leaders actuels. Bonne tolérance à la moucheture mais sensibilité marquée à la septoriose. Élaboration de rendement de type miradoux : assez peu d'épis de bonne fertilité et gros grain. Sa capacité de compensation est inférieure à celle des meilleures : anvergur, nobilis, voilur. Il faut donc réussir son implantation.
A bien maintenu son PMG dans le contexte de 2018. Très jolie couleur et bonne tolérance à la moucheture. Nettement sensible à la septoriose, il faut prévoir un T1. PS assez faible, du niveau de celui d'anvergur, et teneur en protéines dans la moyenne.
• Santograal (Actisem 2016) : variété italienne (Fratelli Cozzi snc) précoce, à gros grain, sur le créneau d'atoudur. Son rendement est identique à celui d'atoudur. Il se construit de façon assez originale avec peu d'épis, de fertilité moyenne et un gros grain. Sa précocité stable est intéressante ; elle ne s'emballe pas comme celle de claudio en cas d'hiver doux. De paille assez haute, il est un peu sensible à la verse. Assez sensible à la rouille brune. PS et teneur en protéines dans la moyenne. Pour les milieux intermédiaires (potentiel 40 à 55 q/ha) où elle fait mieux que qualidou et aussi bien qu'atoudur.
Variétés nouvelles
• Durofinus (Agri Obtentions 2018) : rendement très variable. Très jolie couleur. La moyenne des années d'inscription et de 2018 place son rendement 8 % au-dessous de celui d'anvergur, mais avec une grande variabilité selon les essais. Élaboration de rendement peu commune, basée sur un fort tallage, une fertilité épi assez faible et un PMG moyen. En 2018, il maintient un bon PS, mais son PMG est inférieur à celui de son inscription et proche de celui de voilur. Une certaine tolérance aux maladies de l'épi a été notée. Sensibilité moyenne aux maladies foliaires. Indiscutablement originale, peut-être des points forts à valoriser.
• RGT Aventadur (RAGT – Italie 2018) : ultra-précoce inscrite en Italie. 2018 est la seule année de référence, on sera donc prudent sur les classements. Elle a épié en moyenne 2 jours avant claudio ; le risque de gel montaison est donc élevé. Elle est très courte (comme sculptur). Elle a fait son rendement avec beaucoup d'épis, peu fertiles et un gros PMG (type qualidou, toscadou). Son PS est moyen (anvergur + 1 point). A priori sur le créneau claudio mais il faudra voir son PS en année séchante en fin de cycle.
• RGT Encablur (RAGT 2018) : potentiel de rendement limité. Très jolie couleur. La moyenne des années d'inscription et de 2018 place son rendement 9 % au-dessous de celui d'anvergur. Élaboration du rendement moyenne pour toutes les composantes. Variété nettement tardive, comme relief, et haute (environ 1 m). Couleur parfaite et très bonne tolérance à la moucheture. Sensible au mitadinage. En 2018, une certaine tolérance aux maladies de l'épi a été notée. Sensibilité moyenne aux maladies. Rendement limité par sa tardiveté dans notre région ; comportement aux maladies de l'épi à étudier.
Yves Pousset, Arvalis - Institut du végétal