Accès au contenu
SEMIS

Les variétés de triticale en revue

Arvalis-Institut du végétal nous livre ses observations et préconisations pour les variétés de triticale testées dans ses essais. En 2020, neuf nouvelles variétés sont venues enrichir le catalogue français.

Les variétés de triticale en revue
La teneur en protéines des triticales est généralement équivalente au blé lorsque la fertilisation azotée n’est pas limitante.

Outre sa productivité en grain et en paille (+ 50 % en paille par rapport à un blé), le triticale possède des caractéristiques spécifiques qu’il est nécessaire de rappeler. Concernant la qualité, et plus précisément le poids spécifique, celui du triticale est inférieur de 4 à 5 points en moyenne par rapport au blé, ce qui correspond aux écarts de réfaction pris en compte par les organismes stockeurs entre les deux espèces. Ce critère doit être pris en compte uniquement lorsque le triticale est commercialisé.
La teneur en protéines, autre critère qualitatif, est généralement équivalente au blé lorsque la fertilisation azotée n’est pas limitante. Les besoins en azote sont voisins de 2,6 kg N/q. Comme sur blé, il est conseillé de fractionner et de limiter dès que possible les apports précoces avant le stade épi 1 cm. Outre les gains de rendement et de teneur en protéines, le fractionnement des apports d’azote, en limitant les apports précoces, réduit les risques de verse et de présence d’oïdium sur cette espèce assez sensible. Enfin, la germination sur pied est l’un des points faibles du triticale du fait de l’origine de l’espèce (croisement entre des espèces sensibles blé dur, seigle notamment). Comme pour toutes les espèces, il existe des différences entre variétés. Seules Grandval (7) et Kaulos (5) présentent une sensibilité plus faible à ce risque. Pour Tribeca (2), Trias (2), Dublet (2), RGT Bivouac (2), RGT Ruminac (2), RGT Suliac (2), le risque est important. L’implantation de ces variétés dans les zones tardives est donc risquée.

Un impératif : semer clair !

En termes d’implantation, comme sur blé, la gamme de précocité est large et le choix de la date de semis doit s’adapter à ces caractéristiques. A l’exception des variétés précoces, il est préférable de semer tôt. La maîtrise des densités de semis est impérative pour atteindre le potentiel et limiter les risques de verse et d’oïdium sur cette espèce sensible. Les densités trop élevées sont préjudiciables au rendement. Elles ne doivent pas dépasser 85 % des préconisations du blé tendre.
Le triticale est assez sensible à la verse et il doit être généralement protégé. La lutte contre la verse commence par la maîtrise impérative des densités de semis, le fractionnement des apports d’azote en limitant les apports précoces et par le choix variétal. RGT Suliac est très sensible ; KWS Fido, Anagram, Kitesurf, Lumaco, RGT Omeac, Ruche et Vivier sont sensibles. Vuka, Kasyno, Trias et Rivolt sont les variétés les plus résistantes du réseau. Outre les pertes de rendement, la verse accentue les risques de germination sur pied.
Le triticale est peu concerné par le piétin-verse et la lutte contre cette maladie est inutile. Celui-ci développe un grand nombre de maladies communes avec le blé. À noter, il développe également la rhynchosporiose qui présente les mêmes symptômes que sur l’orge. La détermination de la nuisibilité de la rhynchosporiose du triticale est variable selon les contextes et sa détermination reste à préciser. 

Lutte contre l’oïdium et la rouille jaune

La principale difficulté du triticale concerne la lutte contre l’oïdium et la rouille jaune. Pour l’oïdium, surveiller les variétés sensibles : Bikini, KWS Fido, Ramdam, RGT Epiac, Tribeca, Vuka. L’oïdium provoque de fortes pertes de rendement surtout lorsqu’il atteint l’épi (souvent observé sur Bikini). Quant à la rouille jaune, peu présente en 2020, elle reste une préoccupation sur triticale, et devient parfois difficile à maîtriser sur les variétés les plus sensibles : Rivolt, KWS Fido, Kaulos.
La maîtrise de la rouille brune doit être suivie avec attention sur Bikini, Jokari, Kitesurf, RGT Omeac, RGT Ouessac et surtout Vuka. Enfin, la prise en compte de la lutte contre la fusariose se réalise de la même manière que sur le blé. Il sera préférable de ne pas implanter Kaulos, RGT Eleac, Brehat, RGT Bivouac, Vivier et surtout Kasyno dans les situations à risque (précédent maïs grain, non labour en particulier). En cas de risque fusariose, la protection fongicide est impérative.

Commentaires variétaux

Les variétés de référence
Ces variétés sont testées depuis trois ans et plus.

Bikini (Lemaire Deff, 2016) : Bikini se situe au niveau de la moyenne sur 5 ans. Bons critères qualitatifs associant un très bon PS à une bonne aptitude à faire des protéines (sa teneur en protéines est supérieure de 0,4 point par rapport aux variétés qui présentent le même niveau de rendement). Variété très précoce, elle ne doit pas être semée tôt. Elle montre une très bonne tolérance à la rouille jaune et se comporte bien vis-à-vis de la rhynchosporiose. En revanche Bikini est très sensible à l’oïdium, souvent présent sur épi et donc difficile à contrôler, ce qui peut provoquer de fortes pertes de rendement. Bon niveau de tolérance à la verse. Conclusion : cette variété présente des atouts : un potentiel correct et régulier, et de très bons critères qualitatifs. Sa sensibilité oïdium doit impérativement être contrôlée afin d’éviter les attaques sur épi. 

Brehat (Florimond Desprez, 2018) : potentiel au niveau de la moyenne sur 3 ans. PS et teneur en protéines sont dans la moyenne. Brehat est sensible au risque de présence de mycotoxines (DON). Variété demi-précoce qui montre une très bonne tolérance à l’ensemble des maladies. Sensibilité à la verse dans la moyenne. Conclusion : Brehat présente un potentiel correct associé à une bonne tolérance aux maladies et des critères qualitatifs sans défauts majeurs.

Elicsir (Caussade semences, 2014) : potentiel en retrait à 96 % des témoins. PS et teneur en protéines sont d’un bon niveau. Bonne tolérance au risque de présence de mycotoxines (DON). Variété demi-précoce à demi-tardive, elle est moyennement sensible à la rouille jaune et à l’oïdium, mais a une bonne tolérance à la rhynchosporiose. Bon niveau de résistance à la verse. Conclusion : malgré un potentiel moyen, Elicsir présente de bons atouts qualitatifs et agronomiques. Sensibilité rouille jaune à surveiller.

Jokari (Lemaire Deffontaines, It 2014) : potentiel en retrait à 97 % des témoins. Très bon PS et aptitude à faire des protéines d’un bon niveau. Variété très précoce. Jokari est moyennement sensible à la rouille jaune mais présente une très bonne tolérance à l’oïdium et à la rhynchosporiose. Conclusion : malgré un potentiel moyen, Jokari présente comme Elicsir de bons atouts qualitatifs et agronomiques. Sensibilité rouille jaune à surveiller.

Ramdam (Agri obtentions, 2018) : très bon potentiel sur 3 ans à 103 % des témoins. Son PS est faible (- 1,5 point par rapport à Bréhat) ainsi que sa teneur en protéines (inférieure de 0,3 point par rapport aux variétés qui présentent le même niveau de rendement). Variété demi-précoce. Elle montre une sensibilité à l’oïdium. Sensibilité rouille jaune à surveiller. Bonne tolérance à la verse. Conclusion : malgré des critères qualitatifs en berne, le potentiel de Ramdam est un atout. Sensibilité rouille jaune et surtout oïdium à surveiller. 

RGT Omeac (RAGT, 2017) : potentiel régulier au niveau de la moyenne sur 4 ans. Excellents critères qualitatifs : son PS (+ 4,1 points par rapport à Bréhat), et sa teneur en protéines (supérieure de 0,4 point par rapport aux variétés qui présentent le même niveau de rendement) sont les meilleurs du réseau. Variété précoce qui montre une bonne tolérance globale aux maladies et à la rouille jaune en particulier. Variété assez sensible à la verse. Conclusion : de sérieux atouts : potentiel, PS, protéines, sensibilité maladies. Surveiller la verse.
Rivolt (Agri obtentions, 2018) : le meilleur potentiel du regroupement à 106 % des témoins ! PS assez faible et aptitude à faire des protéines dans la moyenne. Bonne tolérance au risque de présence de mycotoxines (DON). Variété précoce qui montre une forte sensibilité aux maladies et à la rouille jaune en particulier. Très bon niveau de tolérance à la verse.
Conclusion : son fort potentiel associé à une très bonne tolérance à la verse sont de sérieux atouts. En revanche, la lutte contre les maladies doit être suivie avec attention, en particulier sur rouille jaune.
Variétés récentes
Ces variétés sont testées depuis deux ans.

• RGT Epiac (RAGT, 2019) : potentiel proche de la moyenne des témoins. Bonne aptitude à faire des protéines et PS correct. Assez sensible au risque de mycotoxines (DON). Variété précoce qui montre une sensibilité à l’oïdium et à la rhynchosporiose. Sensibilité rouille jaune à surveiller. Sensibilité à la verse dans la moyenne. Conclusion : critères qualitatifs corrects mais son potentiel moyen et sa sensibilité aux maladies sont des handicaps. 

RGT Suliac (RAGT, 2019) : bon potentiel à 102 % des témoins. Aptitude à faire des protéines et PS dans la moyenne. RGT Suliac est sensible à la germination sur pied (note Geves 2). Bonne tolérance au risque de mycotoxines (DON). Variété demi-tardive à demi-précoce. Assez bonne tolérance globale aux maladies, mais sensibilité rouille jaune à surveiller. Son principal point faible est sa très forte sensibilité à la verse. Conclusion : RGT Suliac présente un bon potentiel mais sa très forte sensibilité à la verse et sa sensibilité à la germination sur épi sont de gros points faibles. 

Yves Pousset, Arvalis-Institut du végétal

Nouvelles variétés

Neuf variétés sont venues enrichir le catalogue. Pour ces nouveautés, nous ne disposons que d’une année d’expérimentation, leur potentiel et leurs caractéristiques seront donc à confirmer. Attention, ces variétés sont peu multipliées et la disponibilité en semences peut être limitée.

Asellus (Florimond Desprez, 2020) : faible potentiel et dernière du regroupement à 94 % des témoins. Aptitude à faire des protéines dans la moyenne, mais très bon PS (le meilleur du réseau !) 
Variété précoce qui montre une très bonne tolérance aux maladies, à l’exception d’une sensibilité à la rhynchosporiose. Conclusion : bon profil global, mais son potentiel nettement en retrait constitue un handicap majeur. 

Bilboquet (Lemaire Deffontaines, 2020) : potentiel proche de la moyenne à 99 % des témoins. Aptitude assez faible à faire des protéines et PS dans la moyenne. Variété demi-tardive à demi-précoce qui présente le meilleur profil agronomique du réseau avec un très bon niveau de tolérance aux maladies (à l’exception d’une sensibilité à la rhynchosporiose) et une très bonne tolérance à la verse. Conclusion : malgré un potentiel moyen, Bilboquet présente de bons atouts agronomiques.

Kitesurf (Lemaire Deffontaines, 2020) : potentiel en retrait à 97 % des témoins. Aptitude à faire des protéines dans la moyenne, et bon PS. Variété demi-précoce qui montre une bonne tolérance à l’oïdium et à la rouille jaune mais qui présente une forte sensibilité à la rouille brune et surtout une très forte sensibilité à la rhynchosporiose. Elle est sensible à la verse. Conclusion : le potentiel en retrait et la sensibilité à la verse de Kitesurf constituent de sérieux handicaps. 

Lumaco (Agri obtentions, 2020) : meilleure inscription 2020 à 111 % des témoins, Lumaco est légèrement supérieur à la moyenne dans le réseau post-inscription avec un potentiel à 101 % des témoins. Très bons critères qualitatifs qui associent une très bonne aptitude à faire des protéines à un très bon PS. Variété demi-précoce qui montre une très bonne tolérance aux maladies, à l’exception de la rhynchosporiose. Variété sensible à la verse. Conclusion : variété qui possède de nombreux atouts : un bon potentiel, un très bon niveau qualitatif et une bonne tolérance à la plupart des maladies. Surveiller la verse.

RGT Molinac (RAGT, 2020) : bon potentiel à 102 % des témoins. Aptitude à faire des protéines dans la moyenne, mais faible PS. Variété demi-précoce qui montre une très bonne tolérance aux maladies et un bon niveau de tolérance à la verse.
Conclusion : beaucoup d’atouts pour cette variété (potentiel, tolérance maladies, verse). Son seul handicap est son faible PS.

RGT Ouessac (RAGT, 2020) : potentiel dans la moyenne pour cette 1ère année en post-inscription. Aptitude à faire des protéines et PS dans la moyenne. Variété demi-précoce. Bon niveau de tolérance aux maladies et à la verse. Conclusion : bon profil général pour RGT Ouessac avec un potentiel correct et l’absence de défauts agronomiques et qualitatifs. 

RGT Rutenac (RAGT, 2020) : potentiel en retrait à 98 % des témoins. Bons critères qualitatifs (PS, aptitude à faire des protéines). Variété demi-tardive à demi-précoce qui montre une très bonne tolérance globale aux maladies (la meilleure du réseau !) Sensibilité à la verse dans la moyenne. 
Conclusion : bon profil global, mais son potentiel en retrait constitue un handicap. 

Ruche (Limagrain, 2020) : bon potentiel à 102 % des témoins. Très faible aptitude à faire des protéines (inférieure de 0,5 point par rapport aux variétés qui présentent le même niveau de rendement) mais bon PS. Variété demi-précoce qui montre un très bon niveau de tolérance à l’ensemble des maladies. En revanche, Ruche est sensible à la verse. Conclusion : le potentiel et la bonne tolérance aux maladies sont les principaux atouts de Ruche. Être attentif au risque de verse.

Trias (Unisigma, 2020) : potentiel proche de la moyenne à 99 % des témoins. Aptitude à faire des protéines et PS dans la moyenne. Variété demi-précoce. Sensibilité oïdium à surveiller, mais très bon niveau de tolérance à la rouille jaune. Très bon niveau de tolérance à la verse (le meilleur du réseau). Conclusion : bon profil global mais son potentiel moyen constitue un handicap.