Les vins du Bugey hostiles à la clairette de Die rosée
Rosira-t-elle ? Cette question, les producteurs de clairette de Die se la posent depuis maintenant trois ans. Conformément à la procédure prévue par l'Inao, les expérimentations pour obtenir une version rosée du fameux effervescent ont débuté avec le millésime 2011. Dans le Diois, on espérait aboutir à la validation du cahier des charges modifié cette année. C'était sans compter sur le syndicat des vins du Bugey, lequel a déposé une opposition contre le projet de modification. Par ce recours, les producteurs du Bugey souhaitent empêcher ce qu'ils estiment être une concurrence déloyale envers l'AOC cerdon.
Des arguments économiques
Le 9 juillet, par communiqué de presse, le syndicat de la clairette de Die a publiquement adressé une réponse au syndicat des vins du Bugey. En matière économique, « si les deux appellations sont voisines, la clairette de Die n'a pas pour but de faire de l'ombre à l'AOC cerdon », indique-t-il. Il rappelle que le cerdon reste le plus important producteur d'effervescent rosé en méthode ancestrale avec 15 000 hectolitres annuels. Se voulant rassurant, le syndicat ajoute que la version rosée ne représenterait « que 10 % du marché de la clairette de Die, soit environ 9 000 hl ». Un autre argument évoqué est le fait que les vignerons du cerdon ont un rendement supérieur de 15 % à celui de la clairette de Die, « lequel est un vignoble de montagne avec toutes les conséquences économiques que cela entraîne sur les coûts de production ». En outre, le syndicat met l'accent sur le caractère familial des exploitations en clairette de Die (5 ha en moyenne) et sur le fait que les deux appellations existent sur des circuits de distribution différents. « Le marché de la clairette de Die est principalement national et international, argumente le syndicat, tandis que celui du cerdon est régional en CHR* et au particulier. »
Un procédé d'élaboration différent
S'agissant du procédé d'élaboration de la clairette de Die rosé, il diffère de celui du cerdon, fait remarquer le syndicat de la clairette. « Comme précisé dans le cahier des charges, la clairette de Die rosé sera faite à titre principal avec du muscat blanc à petits grains et du muscat rouge, indique-t-il. La proportion de l'ensemble de ces cépages est supérieure ou égale à 75 %. Le gamay, limité à 10 % et sans limite inférieure, sera utilisé seulement à titre accessoire », sachant qu'il n'est pas obligatoire dans la clairette de Die rosé. Le syndicat rappelle que les deux cépages rouges sont historiquement présents dans le vignoble diois, « le muscat rouge suite à une mutation naturelle du muscat blanc et le gamay planté depuis 300 ans sur l'aire d'appellation ». Ainsi, « la clairette de Die rosé ne sera pas un nouveau produit mais bien une modification du cahier des charges, ajoute le syndicat. Elle conserve la typicité d'une clairette de Die et est élaborée avec les mêmes cépages en majorité. Elle pourra être produite avec 100 % de muscat. »
Le point commun entre ces deux appellations, outre la couleur que les vignerons du cerdon ne peuvent s'attribuer, reste la méthode de vinification dite « méthode ancestrale ». « La clairette de Die rosé ne peut absolument pas être considérée comme étant une copie de cerdon, affirme le syndicat. Les deux vins ont des profils aromatiques distincts. Leurs typicités et leurs réputations font qu'ils ne sont pas et ne peuvent pas être comparés. »
En conclusion de sa réponse au syndicat des vins du Bugey, « en aucun cas, la production d'une clairette de Die rosé ne mettra en péril l'AOC cerdon, estime le syndicat de l'effervesent du Diois. Le consommateur saura, sans difficultés, faire la différence entre ces deux vins en AOC puisque par définition il n'y a pas deux AOC identiques. »
* CHR : cafés hôtels restaurants.
