Après la découverte de la distillerie Bleu Provence, à Nyons, le préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes, Pascal Mailhos, en visite dans le département, a poursuivi sa route en direction du Domaine de Grangeneuve, à Roussas. Aux côtés du préfet de la Drôme Hugues Moutouh et de la sous-préfète Christine Bonnard, l'élu a longuement échangé avec le propriétaire des lieux, Henri Bour. Ce dernier, sur l'exploitation familiale, gère aujourd'hui un vignoble de quatre-vingt hectares en AOC Grignan-les-Adhémar.
Cette appellation est en crise depuis quelques années, notamment à cause des conditions climatiques. « Depuis 2017, je compte 40 % de moins sur ma récolte. Cela n'est pas dû aux éventuelles maladies sur la vigne mais seulement en raison de la sécheresse », a alerté le vigneron.

L'AOC Grignan-les-Adhémar en pleine mutation

Les besoins en eau sont devenus indispensables, d'autant plus après la canicule du mois de juin. « Cela fait cinq semaines que nous n'avons pas eu de pluie », regrette Henri Bour. Et Pierre Combat, en sa fonction de vigneron et de vice-président à la chambre d'agriculture de la Drôme, de rajouter : « J'étais le premier à affirmer que la vigne n'avait aucun besoin en eau. Mais le changement climatique m'a complètement fait changer d'avis sur ces cinq dernières années ».
Les viticulteurs tirent ainsi la sonnette d'alarme. « L'AOC Grignan-les-Adhémar est en pleine période de mutation compte tenu de la pression climatique. Aujourd'hui, nous devons non seulement revoir nos méthodes culturales (utilisation de couverts végétaux) mais aussi trouver des alternatives ». Recherche de porte-greffes, introduction de nouveaux cépages venus du sud de l'Italie ou encore de l'Espagne, etc. « Tout ceci va forcément bouleverser nos productions, voire même modifier le goût du vin, a souligné Henri Bour. Mais nous sommes dans une situation d'extrême urgence et j'espère que l'institut national de l'origine et de la qualité (Inao) et l'Europe seront réactifs sur la validation des changements à venir quant au cahier des charges de l'appellation. »

Protéger l'agritourisme

Pour limiter le stress hydrique et s'assurer une vendange à minima rentable, le Domaine de Grangeneuve a investi dans un système d'irrigation en goutte-à-goutte, pour un montant de 150 000 euros. Dans cet objectif, a été créé un forage de 190 mètres de profondeur, avec 1,5 kilomètre de canalisation et 45 kilomètres de tuyaux. « L'irrigation doit toutefois rester une solution mesurée car les ressources en eau ne sont pas infinies », a souligné le vigneron.
Autre thème abordé en présence du préfet de région, le projet d'extension d'un centre d'enfouissement des déchets de la Coved sur la commune voisine des Granges-Gontardes. « Ce serait désastreux pour l'image de l'appellation Grignan-les-Adhémar ». L'œnotourisme n'en serait que davantage menacé : « Tous les professionnels du monde agricole travaillent en symbiose pour mettre en avant l'agritourisme en Drôme provençale. Aujourd'hui, nous vivons beaucoup du tourisme. Qu'en sera-t-il quand il y aura une décharge au milieu des vignes ? », questionne Henri Bour.
Les inquiétudes et les échanges ont laissé place à une dégustation des vins de l'appellation au cœur d'une nouvelle cave dédiée aux blancs et rosés, dotée d'équipements de production modernes et qualitatifs. 
Amandine Priolet