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nuisibles et cultures

Limiter les dégâts d’oiseaux à la levée du tournesol

Depuis 2016, Terres Inovia s’est investi massivement dans la lutte contre les dégâts d’oiseaux, au semis et à la levée du tournesol. Plusieurs travaux ont été réalisés dans le cadre de projets nationaux et régionaux.
Limiter les dégâts d’oiseaux à la levée du tournesol

Terres Inovia a mobilisé des laboratoires sur l'étude des déplacements et des choix alimentaires des pigeons ramiers, corneilles noires et corbeaux freux. L'institut technique a collecté des informations sur les dégâts et travaillé avec des structures départementales (fédérations de chasse, DDT et chambres d'agriculture) impliquées dans le classement comme « espèce susceptible d'occasionner des dégâts » de certains oiseaux. L'objectif est ici d'accorder une certaine autonomie aux agriculteurs ayant le permis de chasse. Enfin, pour rechercher et évaluer des moyens de lutte à la parcelle, tous les acteurs de terrain se sont largement engagés aux côtés de Terres Inovia pour mutualiser les idées et les résultats : organismes de conseil et de développement, coopératives, firmes phytosanitaires, semenciers, entreprises spécialisées, agriculteurs.
Depuis 2016, Terres Inovia a exploré quatre pistes de lutte contre les dégâts des oiseaux à la parcelle : l'effarouchement, les préparations répulsives, la réduction de la période sensible et la stratégie de confusion.
Effarouchement avec des modèles innovants
La méthode d'effarouchement la plus efficace reste la présence humaine aidée, au besoin, d'équipements type pistolet mais elle est bien entendu difficile à mettre en œuvre sur des surfaces étendues. Trois modèles innovants ont été évalués dans le cadre des partenariats : le modèle « Avitrac », équipement programmable émettant des cris de détresse et de prédateurs, a obtenu de bons résultats par les expérimentateurs de terres Inovia. Les deux autres modèles : « drone terrestre » (drone couplé à un effaroucheur) et « pendule réfléchissant » (utilisant la sensibilité des oiseaux à la polarisation de la lumière) restent encore à perfectionner.
Les fauconniers offrent aussi des prestations efficaces, mais coûteuses pour une seule exploitation. Ainsi, lorsque l'environnement d'un ensemble de parcelles à protéger s'y prête, plusieurs agriculteurs peuvent s'associer pour faire intervenir un fauconnier. Des drones biomimétiques peuvent aujourd'hui remplacer les rapaces, mais la démarche reste la même (Robird® par exemple).

Stratégie de confusion avec semis sous couvert

L'objectif de la stratégie de confusion avec un semis sous couvert est de rendre plus difficile la détection des plantules par les oiseaux. Terres Inovia et ses partenaires ont testé plusieurs espèces de couverts, densités, dates de semis, modes et périodes de destruction. Les résultats obtenus à ce jour montrent un effet du couvert semé sortie hiver sur la réduction des attaques d'oiseaux. La difficulté : le couvert doit être détruit assez rapidement pour limiter le risque de concurrence avec la culture, tout en étant maintenu jusqu'à la première paire de feuilles du tournesol pour jouer son rôle. La destruction du couvert peut être anticipée en fonction de la croissance du tournesol et des prévisions météo.
Des résultats positifs ont été obtenus dans le Gers en semant de la féverole à 50 g/m² environ un mois et demi avant le tournesol, puis en la détruisant au glyphosate au semis de la culture (voir photo). L'orge (semée à 150 g/m²) a aussi démontré un effet de protection dans la plupart des situations, même à un stade peu avancé (avant tallage). Mais elle peut rapidement rentrer en compétition hydrique avec le tournesol.
A ce jour, le binage et les alternatives mécaniques à la destruction chimique du couvert qui ont été testées ne donnent pas de résultats équivalents. Ces techniques sont encore mises à l'épreuve pour confirmer leur intérêt et faisabilité dans des conditions variées. La valorisation d'interculture longue est également envisagée.
L'hersage (herse étrille) est une autre piste à l'étude. En plus de son action reconnue sur les adventices, le passage d'une herse étrille pourrait permettre de masquer les lignes de semis et ainsi perturber la recherche des graines par les corvidés (aucune référence disponible). Cette méthode serait peu contraignante pour l'agriculteur à condition que le matériel et les conditions pédoclimatiques ne génèrent pas un risque de battance. La roto-étrille offre de ce point de vue moins de risque que la herse étrille simple.

Produits répulsifs : pas de miracle à ce jour

Si aucun produit répulsif des oiseaux n'est homologué pour un usage tournesol, diverses préparations à allégation répulsive sont toutefois commercialisées et ont été évaluées par Terres Inovia. De nouveaux produits sont testés également, sur proposition des fabriquants, en amont d'une éventuelle homologation mais à ce jour aucun résultat positif n'a été obtenu (voir tableau).

Réduire la période sensible

Diminuer la durée de la phase sensible, de la levée à la première paire de feuilles, permettrait de réduire les risques de dégâts. C'est pourquoi l'usage d'un engrais dit « starter » réputé pour donner de la vigueur au démarrage a été testé. Les essais ont porté sur trois produits qui ont été utilisés selon les recommandations des fabricants : Ecobios, Trika® Expert et Microplus. Aucun de ces trois produits n'a montré de différence sur la durée de phase sensible aux oiseaux par rapport au témoin non traité. Le respect des fondamentaux d'un semis réussi sera ici le meilleur levier : date de semis, état du lit de semence, conditions météo, réglage et conduite du semis.
L'amélioration de la vigueur à la levée des variétés sera une autre piste à explorer. La preuve d'une éventuelle variabilité génétique sur ces caractères n'a toutefois pas été apportée à travers les notations menées sur nos réseaux d'essais. L'analyse se poursuit avec d'autres jeux de données.

Nécessité d'une gestion territoriale

La lutte localisée à la parcelle est limitée car, si les parcelles alentours ne font l'objet d'aucune mesure de protection, les attaques y seront déportées. Si, au contraire, toutes les parcelles alentours font l'objet de la même mesure de protection, les oiseaux pourront s'habituer et ajuster leur consommation à leurs besoins. La coordination des semis est une première stratégie, qui permettrait de maximiser la surface en tournesol consommable au même moment de manière à diminuer l'ampleur des dégâts sur l'ensemble du bassin de production. Une autre stratégie concerne la gestion des habitats, cultivés et non cultivés, et des populations pour diminuer la pression des oiseaux.
La synchronisation des semis n'a pas fait l'objet d'une évaluation réelle. Mais les observations et les retours d'expérience montrent qu'un regroupement des semis sur un secteur permet de diluer les attaques et diminuer globalement les dégâts d'oiseaux. Les nouvelles technologies de cartographie dynamique et participative sont à même de faciliter l'échange d'information sur un territoire. Terres Inovia a développé un démonstrateur type « Waze » dont l'utilisation est envisageable en appui à des projets territoriaux ou de filière. Les acteurs intéressés par ces stratégies et technologies peuvent contacter leurs interlocuteurs locaux Terres Inovia ou Christophe Sausse, chargé du dossier à Terres Inovia ([email protected]).

Claire Martin-Monjaret et Christophe Sausse (Terres Inovia)

Contact régional : Alexis Verniau ([email protected])
Pour en savoir plus : la synthèse complète de l'ensemble des pistes explorées, avec une estimation de leurs coûts est disponible sur www.terresinovia.fr

 

SURVEILLANCE / La régulation des populations (tir, piégeage, secours...) est un moyen d’action, à condition toutefois de respecter les autorisations départementales. Le signalement des dégâts est aussi un moyen de lutte essentiel.

Réguler les populations et signaler les dégâts

La liste des espèces classées susceptibles d’occasionner des dégâts est revue chaque année à l’échelle départementale*, sur la base d’un dossier chiffrant notamment les dégâts sur les cultures. Il est donc indispensable de signaler les dégâts, une large mobilisation est essentielle.
Comment signaler les dégâts ?
Le formulaire 2020 pour signaler les dégâts d’oiseaux et gibiers sur vos oléoprotéagineux est à disposition sur le site :  www.terresinovia.fr
Au-delà d’un suivi pluriannuel, ces données permettront d’instruire les dossiers en vue d’un éventuel classement des espèces, en particulier le pigeon ramier ou les corvidés dans la catégorie des Esod sur votre département pour la prochaine campagne.
Où trouver le formulaire ?
Sur www.terresinovia.fr : Aller dans la rubrique produits (panier) / outils / page Déclaration de dégâts d’oiseaux ou ouvrir l’article tournesol « Déclarer ses dégâts d’oiseaux et visualiser les zones à risque ».
Les bilans des enquêtes précédentes sont en téléchargement à partir de ces deux pages.
*. Pour tout renseignement, consultez les services préfectoraux et la fédération départementale des chasseurs de la Drôme (informations disponibles sur www.terresinovia.fr « Tirs et piégeages d’oiseaux et petits gibiers : agir dans le respect de la réglementation »)
Que faire en cas d’attaque ou de dégâts ?
En fonction de l’espèce de l’oiseau et du stade du tournesol au moment de l’attaque, les dégâts sont plus ou moins nuisibles pour la culture. Lorsque la plantule est déracinée ou l’apex sectionné par le bec de l’oiseau, le pied est perdu. Cependant, quand les cotylédons sont sectionnés, même totalement, la majorité de ces plantules va donner un capitule, même si l’ablation de ces organes de réserve provoque une réduction de vigueur des plantules jusqu’au stade bouton étoilé (résultats des essais Terres Inovia 2016-2017). Ainsi, quels que soient le type de sol et sa réserve hydrique, les tournesols sont capables de compenser une perte de vigueur due à des dégâts d’oiseaux sur cotylédons et conduire à un rendement équivalent à une parcelle non attaquée.