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Atelier

Loi Egalim : le député Moreau venu discuter avec des Drômois

La députée de la Drôme Célia de Lavergne a invité son collègue Jean-Baptiste Moreau, rapporteur du projet de loi pour l'agriculture et l'alimentation, à venir débattre avec les parties prenantes à Chabeuil.
Loi Egalim : le député Moreau venu discuter avec des Drômois

Le 3 décembre à Chabeuil, Célia de Lavergne, députée drômoise et coordinatrice des Etats généraux de l'alimentation, a organisé un atelier sur la loi « pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous » (publiée au Journal officiel du 1er novembre). Objectif de la rencontre : « accompagner les acteurs du monde agricole et de l'alimentation dans l'appropriation de cette loi ». Pour cela, elle avait convié Jean-Baptiste Moreau, député de la Creuse, rapporteur du projet de loi (et éleveur de vaches limousines). Après avoir rappelé l'essentiel de cette loi, il a échangé avec les participants.

Améliorer les prix agricoles

Côté agriculteurs, cette loi vise une juste rémunération et une meilleure répartition de la valeur. Cela, en inversant le calcul du prix avec prise en compte des coûts de production, une obligation de contractualisation entre agriculteurs (de préférence en organisation de producteurs pour être plus forts) et acheteurs... La loi renforce le pouvoir du médiateur des relations commerciales. Il peut s'autosaisir en cas de non-respect de la contractualisation. Le délai de médiation passe de deux à un mois. Le médiateur a la possibilité de publier des décisions de sanction dans les journaux ou services de communication au public. Dans les plans de filières, les interprofessions s'engagent à réaliser des indicateurs de marchés et coûts de production. L'observatoire de formation des prix et des marges pourra être sollicité pour appuyer ces démarches, sans se substituer aux interprofessions.

Des mesures testées sur deux ans

La loi prévoit l'encadrement des promotions et le relèvement du seuil de revente à perte (SRP), à titre expérimental sur deux ans ; ces mesures s'appliqueront le 1er janvier 2019. Les remises sur les produits alimentaires ne pourront concerner que 25 % du volume annuel écoulé par l'enseigne et seront plafonnées à 34 % de la valeur. « Deux produits achetés plus un gratuit » sera possible mais pas « un payé pour un gratuit ». Le but est « d'éviter la guerre des prix, qui détruit de la valeur dans la filière agroalimentaire ». Le relèvement du SRP, lui, vise à obliger la grande distribution à prendre 10 % minimum de marge, y compris pour les produits d'appel (tels que Coca Cola, Nutella...). Des produits sur lesquels aujourd'hui elle ne marge pas ou peu. Elle se rattrape sur les produits agricoles. « Une évaluation sera faite fin 2019 pour vérifier si ce relèvement a un effet sur la rémunération des producteurs, a signalé Célia de Lavergne. Et une commission de suivi de cette loi va être mise en place. » Le respect du bien-être animal, une alimentation saine, de qualité et accessible, la protection des cultures sont d'autres volets de cette loi (voir page 11 de L'Agriculture Drômoise du 11 octobre).

Les participants à cet atelier sur la loi « pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous ».

Un premier pas

Au cours du débat, la loi Egalim est « un premier pas », a-t-il été souligné dans les rangs des participants agricoles. Elle est « intéressante sur le fond mais il reste des verrous à faire sauter ». Le droit à la concurrence européen réduit les marges de manœuvre, notamment sur l'idée de la fixation des prix par les interprofessions plutôt que par l'observatoire de formation des prix et des marges. « Il faut le faire évoluer. » Dans certaines interprofessions, « il sera compliqué de déterminer le prix "qui va bien" ». Par ailleurs, pour les agriculteurs français, il est « difficilement concevable » que les règles leur étant appliquées ne le soient pas pour les importations. « On est sur une problématique de revenu, avec des pratiques de concurrence faussée », a-t-il été appuyé. Pour renforcer les moyens de contrôle de FranceAgriMer et de la DGCCRF, Jean-Baptiste Moreau a déposé un amendement dans le projet de loi de finances. Mais « cela ne réglera pas le problème des importations extra-européennes », a-t-il observé. Pour être efficace, l'Union européenne doit se doter d'une agence et aller contrôler les produits dans leur pays d'origine, comme le fait la Chine et d'autres.

Consulter les corps intermédiaires

Par ailleurs, Jean-Baptiste Moreau prône une convergence des coûts de main-d'œuvre en Europe « le plus vite possible » mais aussi de miser sur la montée en gamme des produits, pour une valorisation supérieure. Sur les promotions, « il faut une police », a-t-on noté, côté agriculteurs. Et le médiateur des relations commerciales ne doit pas hésiter à utiliser le « nommé et dénoncé » car « ça fonctionne, les enseignes ont peur pour leur image ». La séparation du conseil et de la vente des produits phytosanitaires, elle, inquiète les coopératives ayant une activité approvisionnement. Que vont devenir leurs techniciens... ? « Il faut trouver le meilleur compromis », a-t-il été remarqué. Et aussi : « Une transition est à opérer. Il faut jouer le jeu de l'intelligence collective ». A ce sujet, Jean-Baptiste Moreau a noté : « L'ordonnance n'est pas encore rédigée. Il faut voir comment elle sera écrite et adoptée. Il ne faut pas créer une usine à gaz et avoir un conseil objectif ». Lors de cette rencontre aussi, l'agribashing a été dénoncé. Il s'est encore dit que, pour l'écriture de décrets, le gouvernement serait bien inspiré de consulter les corps intermédiaires...

Annie Laurie