Lucie Mazard : deux entreprises à conduire
Arboricultrice sur la commune de Loriol-sur-Drôme, Lucie Mazard produit des fruits à noyau et à pépin, en agriculture conventionnelle et biologique. Le point alors à quelques jours du congrès de la Fédération nationale des producteurs de fruits (FNPF) organisé à Valence.

Fille d’arboriculteurs, Lucie Mazard a grandi au sein de l’exploitation familiale située à Loriol-sur-Drôme. « J’ai toujours aimé voir que l’on pouvait maîtriser la production de A à Z », dit-elle. A 29 ans, après des études agricoles réalisées au lycée agricole Le Valentin à Bourg-lès-Valence et au lycée Pétrarque à Avignon, elle s’installe - en même temps que sa sœur - et rejoint l’EARL Chareyre, déjà tenue par son père et son oncle. « A l’époque, nous cultivions 40 hectares de fruits à noyau et à pépin, dont 50 % de pêchers (80 % des pêches sont des sanguines, ndlr), en conventionnel. En 2019, à la retraite de mon père, nous avons créé une autre structure dédiée à l’agriculture biologique, appelée l’EARL « Les B’O Fruits », en récupérant près de neuf hectares sur notre surface agricole utile globale, pour produire pêches, prunes, abricots, cerises ainsi que des kiwis en zéro résidu de pesticides », explique-t-elle.
A terme, l’idée est de réduire les vergers conventionnels. Avec prudence toutefois car la gérante et ses associés se heurtent à de nombreuses problématiques en bio du fait de l’interdiction de nombreuses molécules et de la rareté de produits homologués. Pour autant, il est délicat pour Lucie Mazard de faire un bilan sur la valeur ajoutée de cette reconversion progressive, en raison des aléas climatiques de ces dernières années. « On a gelé à 70 % en 2020 et à 90 % en 2021, et ce malgré des tours à vent, des bougies, etc. », souligne-t-elle.
Au niveau de la commercialisation, l’arboricultrice travaille exclusivement avec la coopérative Lorifruit, qui vend, par le biais de son bureau de vente Fruits Union, les productions fruitières à des centrales d’achat ou des grossistes. Face à l’offre de fruits importante dans son secteur, elle n’envisage pas de faire de vente directe afin d’éviter toute concurrence malsaine avec ses confrères. Elle réfléchit cependant à faire évoluer le verger et anticiper le réchauffement climatique. « A l’avenir, mon projet serait de simplifier l’exploitation par des cultures mécanisables, et plus facilement récoltables », confie Lucie Mazard. Parmi ses idées, mettre en place des vergers d’oliviers et d’amandiers. « Ce sont des cultures provençales qui craignent moins le gel que nos pêchers ou abricotiers… On garderait toutefois des espèces phares comme les cerises et les prunes, qui nécessitent moins de travail technique au fil de la saison. » En attendant, les deux structures embauchent chaque année une vingtaine de saisonniers fidèles, avec l’aide d’Agri-Emploi.
Amandine Priolet
Sa préoccupation du moment : les ZNT
Lucie Mazard : « Aujourd’hui, l’une des problématiques phares du métier d’arboriculteur.trice réside selon moi autour des zones de non-traitement (ZNT). Nos vergers sont situés au beau milieu de zones d’habitations et la réglementation est difficile à respecter : en effet, on ne peut parfois pas se permettre de laisser une distance de vingt mètres, ce qui équivaudrait à laisser quatre rangées non traitées et perdre potentiellement 10 tonnes de fruits. A l’heure actuelle, ce n’est pas réalisable sur des vergers déjà existants contrairement aux nouvelles plantations où il est encore possible de s’adapter. Cette réglementation a pris en compte les attentes sociétales mais pas la faisabilité technique au niveau agricole. Il serait bon qu’une tolérance soit appliquée dans les années à venir. Nous ne sommes pas réfractaires à ce type de loi, nous nous attachons à faire attention à nos voisins, mais il est certain que le sujet des ZNT doit être revu. Dans le cas où il faudrait arracher nos arbres dans ces zones, une indemnisation serait à prévoir, même s’il est regrettable de perdre toute une surface agricole dédiée à l’arboriculture… ».