Maintenir la pression syndicale

Administrateurs de la FDSEA de la Drôme et présidents des syndicats locaux se sont retrouvés le 27 octobre à Crest pour une réunion du conseil départemental de la fédération. Après une saison marquée par les crises de diverses filières, et plus particulièrement en élevage, la politique des prix reste une préoccupation majeure. « Malgré notre travail, nos marges diminuent et l'on n'est jamais maître de nos prix, on ne fait que subir », ont déploré certains responsables syndicaux. Les distorsions de concurrence mais aussi la volatilité des cours, les spéculations ou encore l'accumulation de contraintes réglementaires ont été largement pointées du doigt. Céline Ferlay, vice-présidente de la FDSEA, éleveuse en Nord-Drôme, a évoqué une situation de « désespoir » et de « désarroi », ainsi que la nécessité de « vrais prix », à même de reconnaître la valeur du travail fourni. Avec la crise, la sécheresse et maintenant la FCO, un autre éleveur a confié sa décision d'arrêter son élevage. La fatigue et le découragement sont là. Et les mesures obtenues après les actions syndicales sont jugées insuffisantes, d'autant plus que des critères imposés par Bercy en limite la portée.
Pas de recette miracle
« Il n'y a pas de recette miracle pour obtenir des prix couvrant les coûts de production », a expliqué Henri Brichart, second vice-président de la FNSEA. Il a mis en avant l'origine France à même de susciter le « patriotisme alimentaire », la stratégie des filières pour faire évoluer les offres de production ou encore le développement de l'export.
L'autre volet est celui de la maîtrise des coûts. « Les charges sociales ne doivent pas toutes peser sur le coût du travail », a-t-il indiqué, rappelant les débats avortés sur la TVA sociale. Sur les réglementations, « on sent une volonté du Premier ministre de progresser après l'annonce d'un moratoire, mais encore faut-il que les administrations suivent. »
Concernant l'origine France, les contrôles réalisés par les équipes syndicales, l'été dernier, ont pointé l'insuffisance de produits agricoles français dans les rayons de grandes surfaces et dans certaines cantines centrales. « A l'hôpital de Romans, où sont servis 6 000 repas chaque jour, 98 % des produits alimentaires sont d'origine étrangère », a rappelé un responsable. Une situation qui irrite les producteurs alors qu'ils sont en capacité de fournir des produits locaux. Didier Beynet, président de la FDSEA, a annoncé des rencontres avec les collectivités territoriales, les 6 et 9 novembre, puis avec les parlementaires drômois le 27 novembre. Maintenir la pression, telle est la stratégie définie par la fédération.
Se donner des capacités à communiquer
Au lendemain du rapport de l'OMS sur les liens supposés entre viande rouge et cancer, les responsables syndicaux ont dénoncé ce type d'étude. Avant les produits carnés, d'autres campagnes de dénigrement ont ciblé le vin, les fruits, les légumes... « Cela ruine nos efforts de communication », a déploré un responsable syndical. Henri Brichart a dénoncé « des courants de pensée anti-viande et anti-tout ». Il a fait part d'une prochaine campagne d'affichage de l'association L214 dans le métro parisien lors de la conférence sur le climat (Cop21). Pour rester audible et rétablir la vérité, les filières doivent se donner des capacités à communiquer, préconise-t-il. « C'est aussi un des axes de la FNSEA », a-t-il confié, indiquant qu'un projet est en réflexion au sein de la centrale syndicale.
D'autres sujets ont été évoqués, notamment celui de la nouvelle politique agricole commune, jugée bien trop complexe. « Cette complexité est le fruit d'un consensus entre Etats membres, a indiqué Henri Brichart. Mais cette Pac ne donne pas tous les outils pour faire face à la dérégulation des marchés et à la volatilité des prix. » Entre ceux prônant la simplification et ceux exigeant la prise en compte de multiples spécificités (filières, territoires...), Jean-Pierre Royannez a mis l'accent sur les difficultés à définir un objectif unique.
Par ailleurs, alors que les soutiens publics des stations d'expérimentation sont menacés, a été soulignée la nécessité de conserver des moyens de recherche et développement pour les filières agricoles. Un combat de plus à mener.
Christophe Ledoux
Intervention / Henri Brichart a fait le point sur les politiques agricoles nationales, européennes et internationales.
Simplifier la Pac ? Oui, mais…
Lors conseil départemental de la FDSEA, Henri Brichart est intervenu sur les politiques agricoles nationales, européennes et internationales. Il a abordé la question des enjeux et des perspectives pour la Pac. En Europe, dans un contexte de volatilité des prix et d’instabilité des marchés agricoles, une réflexion en profondeur sur les évolutions possibles de la Pac est engagée. Ces discussions sont complexifiées par la grande diversité des productions agricoles et des climats des pays européens. Les attentes des différents pays sont très diverses.
Adapter complexifie
Une Pac simplifiée serait plus facile à appliquer mais serait loin de répondre aux besoins des agriculteurs de tous les territoires. Henri Brichart a illustré son propos en prenant l’exemple de la diversité des cultures. Soumise à la conditionnalité des aides Pac, cette diversité peut poser problème à certains territoires en monoculture. Ainsi, a-t-il fallu trouver des moyens d’adapter les règles pour répondre aux spécificités de ces territoires. La complexité de la Pac vient, entre autres, de ces diverses adaptations.
Un système américain plus souple
Dans ce contexte, s’intéresser aux politiques agricoles et à leurs applications dans les autres pays paraît incontournable. La politique agricole américaine, basée sur la gestion des aléas climatiques, conjoncturels et économiques a été citée. Le système américain a une plus grande souplesse dans la gestion de ses enveloppes financières. A la différence du système américain, le budget européen de la Pac est, quant à lui, annualisé.
La question de la gestion des risques agricoles et économiques et celle de la volatilité des prix a également été largement évoquée. En plus des enjeux forts sur l’avenir de la Pac, Henri Brichart a fait le point sur la construction des prix agricoles, la contractualisation et le prix du lait.
Henri Brichart a été nommé président du conseil d'administration de FranceAgriMer, établissement national des produits de l'agriculture et de la mer par décret du 30 octobre 2015, publié au Journal Officiel de la République Française le 4 novembre 2015.
Né le 15 septembre 1956 à Saint-Dizier en Haute-Marne, Henri Brichart est agriculteur-éleveur, associé en GAEC, en Thiérache dans le département de l’Aisne sur une exploitation de 225 hectares produisant du lait, des vaches allaitantes, des ovins et des céréales.
Henri Brichart est également le deuxième vice-président de la FNSEA et le Président du comité de coordination des associations spécialisées de la FNSEA, depuis 2011.
Il siège aussi au COPA-COGECA (Comité des organisations professionnelles agricoles de l'Union européenne et Comité général de la coopération agricole de l'Union européenne).
Il exerce aussi des responsabilités locales (vice-président de la chambre d’agriculture de l’Aisne, conseiller municipal et président de la Cuma d’Ėparcy…).
Henri Brichart a également été Président de la FNPL (Fédération Nationale des Producteurs Laitiers) et de l’interprofession laitière (CNIEL) pendant 10 ans.