Marché des céréales : l'espoir d'une reprise

Alain Daussan, quel bilan dressez-vous de la dernière campagne céréalière ?
Alain Daussan : « 2015 est à nouveau une grosse année de production, au niveau mondial. La barre du milliard de tonnes a été franchie en maïs et la récolte avoisine les 700 millions de tonnes en blé. Pour la troisième année consécutive, la production mondiale est excédentaire par rapport aux besoins. Par conséquent, elle pèse sur le marché. Depuis trois ans, les stocks gonflent régulièrement. »
Et quelles sont les tendances commerciales ?
A. D. : « En 2014, le marché européen avait été pénalisé par des problèmes de qualité du blé (liés à la pluie pendant la récolte). En 2015, un niveau de qualité correct a été retrouvé alors qu'une catastrophe était crainte en raison des coups de chaleur de juin et juillet. Avec une collecte de 40 millions de tonnes de blé, la production française a battu un record absolu (de l'ordre de 38 millions de tonnes en 2014). Pour cette récolte 2015, nous sommes dans des perspectives de prix à peine supérieures à celles de 2014. Et le marché se dégrade depuis l'automne dernier, du fait que la France n'est pas placée à l'export sur les pays tiers. Et ce pour des raisons de parité entre l'euro et le dollar mais aussi d'une réelle concurrence de la Russie ainsi que de l'Ukraine. Vendant à faible prix, ces deux pays nous prennent des marchés. En plus, la chute du coût du transport maritime et le changement politique en Argentine ont eu une incidence sur l'un de nos débouchés. Celui de l'Algérie, qui a récemment acheté des blés argentins. Il faut noter aussi que la part export de la France, comme de la CDC, est habituellement de l'ordre de 50 %. C'est donc problématique.
En maïs, après un record en 2014, la récolte 2015 est moyenne. Mais, là encore, nous avons besoin des exportations pour écouler notre marchandise. Et nous nous battons avec l'Ukraine, qui exporte la quasi-totalité de sa production de maïs. »
Selon vous, quelles sont les perspectives ?
A. D. : « A l'heure actuelle, c'est la trêve hivernale. A la sortie de l'hiver, nous verrons comment se présente la nouvelle production dans les différents coins de la planète, surtout vers la Mer Noire. En fonction des estimations de production, nous pourrons peut-être espérer une reprise des marchés.
Au niveau de la CDC, nous sommes dans l'attente. Notre avantage est d'avoir des débouchés importants dans nos propres outils, l'Ucab(1) notamment. Et notre historique auprès de certains acheteurs qui nous font confiance est aussi une chance. Grâce à eux, nous pouvons un peu "sauver les meubles ".
En production biologique, Ucabio(2) est dans sa deuxième année de fonctionnement et toujours en phase de développement. Cette usine nous aide à écouler une partie de notre production. Là encore, nous bénéficions de partenariats avec des acheteurs depuis plusieurs années nous permettant d'écouler de la marchandise. Cependant, nous devons nous attendre à une révision des prix à la baisse car une forte hausse de la production bio française est prévisible dans les années à venir. »
Propos recueillis par Annie Laurie
(1) Ucab : usine d'aliment du bétail (Crest).
(2) Ucabio : usine d'aliment du bétail biologique (Chabeuil).