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Portes ouvertes

Pep caprin : un leadership consolidé

Riche, vivante et fédératrice : voilà qui définit bien la journée portes ouvertes du pôle d'expérimentation et de progrès
de la filière caprine du Pradel, organisée le 12 octobre. Un état d'esprit qui caractérise aussi ses partenaires dans la perspective d'une rénovation de la ferme expérimentale.
Pep caprin :  un leadership consolidé

Chercheurs de l'institut de l'élevage (Idele), ingénieurs de l'institut national de recherche agronomique (Inra), représentants de la filière caprine régionale et nationale, élèves du lycée professionnel agricole d'Aubenas, élus locaux et régionaux, éleveurs du département et de l'ensemble la grande région Auvergne-Rhône-Alpes (Aura)... Tous étaient réunis, le 12 octobre, à l'occasion des portes ouvertes du pôle d'expérimentation et de progrès de la filière caprine (Pep caprin), au service de la profession régionale depuis 1989. Preuve de la capacité du pôle à fédérer tous les acteurs autour de son projet.
Véritable pont entre la recherche fondamentale et le terrain, la ferme expérimentale du Pradel a proposé tout au long de la journée des conférences sur les derniers résultats de recherche1 et des ateliers pratiques2. Découlant d'expérimentations réalisées à la ferme, ces résultats sont d'application immédiate pour les éleveurs caprins et répondent à des préoccupations concrètes de la profession. Un « apéro-poster » a permis aux éleveurs d'échanger de manière plus informelle et conviviale avec différents interlocuteurs sur des questions techniques. La visite guidée de la ferme, de la chèvrerie au méthaniseur, a également été plébiscitée.

Rénovation de la station

Pionnière en matière de recherche appliquée pour la filière caprine à l'échelle régionale, la ferme du Pradel va être transformée en profondeur. La nouvelle installation devrait voir le jour fin 2018, fruit d'un travail mûri pendant plus de dix ans. « Le cheptel passera de 120 à 240 chèvres en lactation afin de pouvoir mener davantage d'expérimentations. Toute la production ne sera pas dédiée à la transformation, nous livrerons une partie en coopérative », a dévoilé Pierre Ulrich, directeur de la ferme.
Les bâtiments seront rénovés, notamment la chèvrerie qui sera agrandie. Cela permettra d'aménager une nouvelle salle de traite et d'accueillir, non plus deux, mais quatre lots expérimentaux de 48 chèvres, ainsi qu'un cinquième à vocation pédagogique pour l'accueil des scolaires et visiteurs. Le fourrage sera stocké dans un nouveau bâtiment dédié de 500 m2 qui servira aussi à la stabulation des boucs. Ces travaux, intégralement financés par la Région, représentent 1,3 million d'euros (M€).
Troisième axe, le renouvellement du matériel. « Nous investirons dans une machine à traire de 48 places (2x24) en ligne basse avec décrochage et sortie automatiques. Un système neuf de distribution automatisé d'aliments sera installé, de même que valet de ferme, chariot peseur, louve, silos, cornadis, luminaires ou encore abreuvoirs chauffants. » Ces investissements à hauteur de 300 000 € seront pris en charge à part égale par l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole (EPLEFPA) Olivier-de-Serres et la Région. « Ils vont permettre de relancer la dynamique autour du Pradel, qui, il y a une quinzaine d'années, était un véritable modèle pour tous les éleveurs caprins de la région et même au-delà. Ils sont nécessaires pour redonner toute sa force expérimentale à la ferme. Le projet fédère tous les partenaires », a affirmé Patrick Escure, président du comité d'orientation régional de l'élevage (Corel) de la chambre d'agriculture Aura.

Gouvernance collégiale

Une association va également être créée, chargée d'établir la stratégie et les orientations mais également de superviser leur mise en œuvre opérationnelle et de gérer les fonds nationaux et régionaux. Elle regroupera l'EPLEFPA Olivier-de-Serres, l'Idele, le Corel et la Fédération nationale des éleveurs de chèvres (Fnec). Un comité technique, composé de partenaires de terrain et en étroite collaboration avec le comité de filière, assurera le relais des besoins et la diffusion des résultats d'expérimentation dans tout le territoire. Un comité des adhérents permettra de faire le lien avec les acteurs intéressés par les travaux de l'association, y compris les entreprises privées, gage d'un réel ancrage de la ferme dans son environnement.
« Les démonstrations de compétences en matière de recherche qui m'ont été données à voir au Pradel m'ont convaincu de l'importance d'avoir des fermes expérimentales et notamment un PEP caprin à la pointe pour la région, a déclaré Emmanuel Ferrand, nouveau conseiller régional délégué aux fonds européens agricoles. Nous allons d'ailleurs transposer ce système en Auvergne et poursuivrons notre soutien dans les années à venir. La filière caprine représente tout ce que la Région entend développer : des productions de territoire, des emplois non-délocalisables, une consommation en grande partie locale et des produits souvent sous signes de qualité que notre marque "la Région du goût " entend valoriser. » Pour preuve, l'engagement financier en faveur des filières, d'élevage notamment, passé de « 12 à 29 M€ dans le budget agricole régional. Accompagner les travaux d'extension de la ferme du Pradel répond aussi à notre volonté d'orienter nos fonds sur des dépenses d'investissement plutôt que de fonctionnement. À cet égard, nous continuerons nos aides aux bâtiments d'élevage ».

De nombreux projets de recherche

Les enjeux qui mobilisent la profession sont nombreux. Quatre thématiques de travail occuperont notamment le Pep caprin ces prochaines années. Dans la continuité des travaux sur l'optimisation du pâturage et de l'alimentation, la maîtrise des coûts de production est une priorité. D'autres essais zootechniques, concernant la maîtrise du parasitisme, la valorisation des espèces fourragères ou encore celle des coproduits, seront engagés pour y répondre. Deuxième axe de travail : la transformation du lait cru à la ferme avec la poursuite des essais sur la technologie fromagère, la typicité et la qualité des produits, l'amélioration des conditions de travail et des matériels. Diminuer l'empreinte environnementale des exploitations caprines, par la maîtrise de la consommation d'énergie ou le traitement des eaux usées, constitue le troisième axe. Enfin, les nouvelles technologies seront pleinement intégrées aux recherches avec la volonté d'inventer la « ferme connectée » de demain. Frédéric Blanchard, président du comité de région de la filière caprine régionale, en est convaincu : « La station du Pradel est aujourd'hui leader de l'innovation et de la recherche expérimentale dans la région. Le projet de rénovation en fera, demain, la ferme caprine de référence sur le plan national ». 

Mylène Coste
1 Conduite du pâturage, rendements fromagers et utilisation du lait maternel acidifié dans l'alimentation des cabris.
2 Taux d'urée du lait, maîtrise du salage en transformation fromagère, installation d'un séchoir en grange ou encore allaitement des chevreaux au lait acidifié.

 

Enseignement agricole
Le 12 octobre, un repas à base de produits estampillés « la Région du goût », a été servi par les élèves de l’EPLEFPA Olivier-de-Serres, dont une antenne est située au Pradel. Présents en nombre, ils ont plus largement été associés à la logistique dans le cadre de leur formation. « Les exploitations sont les lieux privilégiés de l'apprentissage et de la formation des jeunes. C'est là aussi qu'ils mettent un pied dans le monde agricole et s'insèrent dans le milieu rural. La rénovation du Pradel va permettre aux élèves de bénéficier de conditions toujours plus performantes, précieuses pour leur réussite », s'est réjoui Marc Chile, chef du service régional de la formation et du développement de la Draaf1. 
1 Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt.

 

Questions à / François Bacis, président du Pep caprin et membre du conseil d'administration de la Fédération nationale des éleveurs de chèvres (Fnec).

“ Le lien avec le terrain fait notre force ”

Quels sont les principaux enjeux de la filière caprine au niveau national ?
François Bacis : « Nous sommes actuellement mobilisés sur deux sujets centraux. Tout d'abord le bien-être animal, sur lequel nous sommes très fortement sollicités, dans un contexte global où la question est très saisie par les médias. Nous avons d'ailleurs entrepris une réflexion sur les plantes et la santé caprine, en lien avec la Fédération régionale des groupements de défense sanitaire Auvergne Rhône-Alpes (FRGDS Aura). Notre but est de recenser les pratiques les plus courantes des éleveurs caprins du territoire en la matière et d'observer leur efficacité ainsi que  leur possible développement.
Le renouvellement des générations est le second gros chantier pour les années à venir, avec tout un travail sur la disponibilité du foncier, l'installation et la transmission. Nous planchons déjà sur la question en coopération avec différentes associations. »

Quel rôle peut jouer le Pradel au regard de ces enjeux ?
F.B. : « La ferme du Pradel joue déjà un rôle important d'expérimentation sur ces thèmes qui font avancer la profession. Cela sera conforté avec les travaux de rénovation. La recherche qui y est menée sur les traitements alternatifs aux antibiotiques dans le sens du bien-être animal en est une bonne illustration. Par exemple, l'alimentation des chevreaux à la poudre de lait de vache n'a pas bonne presse et devrait même être interdite par le nouveau cahier des charges de l'élevage bio d'ici à la fin 2018. Grâce au financement du partenariat européen d'innovation“productivité et développement durable de l'agriculture”, nous avons pu étudier leur alimentation afin d'y trouver une alternative. Les travaux sur le lait acidifié vont dans ce sens et donnent des résultats encourageants, en termes de lutte parasitaire ou de contraintes de distribution pour l'éleveur. »

Quelle place tient la Ferme du Pradel au niveau du territoire ?
F.B : « Vous le voyez aujourd'hui : de très nombreux éleveurs locaux et des environs sont présents. Le lien avec le terrain est au cœur du projet du Pep, c'est d'ailleurs la raison pour laquelle, d'une année sur l'autre, nous alternons les journées portes ouvertes au pôle du Pradel et les rencontres sur des sites spécifiques de la région pour répondre aux demandes particulières des producteurs. Ce lien fort avec le terrain fait la force du Pep. » 

Propos recueillis par M. C.