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Conseils

Photovoltaïque : la prudence est de mise avant de s’engager

Faire construire un hangar agricole soit disant « gratuitement » par une société photovoltaïque est tentant. « Mais soyez vigilant avant de verser le moindre acompte », prévient un conseiller des chambres d’agriculture de Rhône-Alpes.
Photovoltaïque : la prudence  est de mise avant de s’engager

Certaines sociétés du secteur photovoltaïque proposent actuellement de fournir aux exploitants agricoles un hangar « gratuitement ». On trouve même des publicités sur le site internet du « Bon coin ». Le montage est le suivant : l'agriculteur loue son terrain à la société. Celle-ci y édifie un bâtiment sur lequel sont posés des panneaux photovoltaïques et se rémunère par la vente d'électricité. Le bâtiment est loué à l'agriculteur pour un usage agricole. Généralement, la société prend à sa charge les frais de permis de construire et les autres démarches. Les frais de terrassement sont à la charge de l'agriculteur. Les éventuels aménagements intérieurs et le bardage sont également à la charge de l'exploitant agricole. Le bâtiment peut être utilisé gratuitement par l'agriculteur pendant toute la durée du bail. A la fin du bail, le bâtiment et son installation photovoltaïque sont remis gratuitement à l'agriculteur.
Si cette proposition peut paraître séduisante de prime abord, il est fortement recommandé d'être très prudent avant de signer quelque accord que ce soit et surtout avant de verser une quelconque somme d'argent. Confier à un juriste la relecture de l'accord et des clauses du bail proposé est un préalable indispensable. En effet, dans certains cas, de nombreux points restent flous et peu précis, pouvant donner lieu à toutes les interprétations, et par là même, potentiellement, à des abus. En Rhône-Alpes, plusieurs agriculteurs ont signé des contrats depuis plus de deux ans en versant de fortes sommes d'argent, et les bâtiments ne sont toujours pas construits !

Attention aux avances de frais

Dans certains cas, des sommes importantes (jusqu'à 8 000 euros, voire plus pour plusieurs bâtiments) de « frais administratifs » sont demandées dès le départ, pour payer la demande de permis de construire et les « autres frais ». Cette somme, élevée et demandée dès la signature, doit alerter et amener à poser des questions : à quoi sert-elle ? Qu'est-ce qui justifie ce paiement par l'agriculteur alors que c'est la société qui sera propriétaire du bâtiment ? A quelles conditions cette somme peut-elle être remboursée ? Que deviennent ces frais si la société décide de ne pas poursuivre le projet parce qu'elle le juge non rentable (en particulier si les frais de raccordement au réseau d'électricité s'avèrent trop élevés) ou si le projet n'aboutit pas pour d'autres raisons ? Quelles garanties donne la société vis-à-vis de l'aboutissement du projet ? La plupart de ces questions n'est pas abordée dans l'accord proposé, ou alors de manière imprécise, voire contradictoire, laissant la porte ouverte à toutes les interprétations...

Des questions à se poser

D'autres points doivent être regardés attentivement et éclaircis impérativement avant d'apposer sa signature sur des documents : y a-t-il un engagement sur les délais de réalisation ? Que se passe-t-il si ces délais ne sont pas respectés ? L'agriculteur peut-il retrouver la liberté d'utiliser sa parcelle à sa guise si les délais sont trop longs ? Ces délais sont-ils compatibles avec les besoins de l'agriculteur ? Les clauses de sortie prévues pour l'exploitant agricole sont généralement très succinctes, voire inexistantes.
Au niveau des assurances : qui assure quoi ? Le terrain est loué à la société qui construit le bâtiment et le met à disposition de l'agriculteur. Quelle est la responsabilité de chacun en cas de sinistre ? Quelle assurance complémentaire l'agriculteur doit-il souscrire ? Que devient le bâtiment en cas de sinistre important entraînant sa destruction totale ?
Certains accords n'évoquent même pas les points suivants : conditions d'utilisation du bâtiment par l'agriculteur, activités permises (ou interdites) dans le bâtiment, type d'aménagements pouvant être fait. Dans ces conditions, quelle certitude a l'agriculteur de pouvoir utiliser le bâtiment conformément à ses besoins ? Il est très fréquent que la part du bâtiment dédiée au stockage de fourrage soit limitée à 30 %. Si cela n'a pas été annoncé au départ, c'est la douche froide pour l'éleveur qui avait besoin de plus d'espace.

Attention à la fiscalité

Il faut aussi se poser la question de la fiscalité au moment de la récupération du bâtiment par l'agriculteur. Celle-ci se faisant gratuitement à l'issue du bail, cela constitue un revenu foncier, qui sera imposable. S'il s'agit d'un bail emphytéotique, le montant de ce revenu foncier correspondra à la valeur vénale du bâtiment à l'issue du bail. Mais quelle sera cette valeur, et donc l'imposition qui en découle ?
S'il s'agit d'un bail à construction, la valeur du bâtiment au moment de la rétrocession est calculée à partir de la valeur à neuf avec un abattement de 8 % par an à partir de la 18e année. Dans ce cas, si le bail n'est que de 20 ans, la valeur du bâtiment sera très élevée la 20e année (84 % de la valeur à neuf !). L'imposition sera donc conséquente. En revanche, si le bail a une durée de 30 ans, la valeur au moment de la rétrocession sera nulle et il n'y aura donc pas d'imposition. Dans ce cas, il est donc important de prévoir un bail d'une durée proche de 30 ans.
Enfin, des questions se posent quant à l'obtention du permis de construire. Pour pouvoir obtenir un permis en zone agricole, le bâtiment doit avoir avant tout une fonction agricole. Si la surface du bâtiment est disproportionnée par rapport aux besoins de l'exploitation, le projet s'expose à un refus de permis. De nouveau se posera alors la question du remboursement ou pas des frais administratifs versés par l'agriculteur. Certains accords le prévoient, d'autres pas...
Tous ces points doivent être travaillés avec l'aide d'un juriste indépendant avant de signer un accord, quel qu'il soit, et de verser une quelconque somme d'argent. En effet, une fois ces sommes versées, vous ne serez plus en position de force pour négocier un contrat qui vous sécurise. 

Vincent Caussanel, chargé de mission énergie au sein des chambres d'agriculture de Rhône-Alpes

 

Une installation de 9 kWc pour 20 000 euros
En dessous de 9 kWc (environ 60 m²), le tarif de vente de l’électricité est plus élevé : actuellement 24,12 centimes d'euro par kilowatt-heure contre 12,12 pour une installation de 100 kWc. Il peut donc être intéressant d’investir dans une petite installation de 9 kWc si le coût d’investissement reste raisonnable.
De nombreuses sociétés proposent ce type d’installation pour un montant aux environs de 20 000 euros HT. Le type de panneaux, la garantie sur les onduleurs sont des critères qui peuvent faire varier légèrement cette somme. Pourtant, les prix pratiqués sur le terrain sont très variables. Dans tous les cas, consultez toujours plusieurs sociétés pour avoir plusieurs devis et demandez des références. 

 

Sociétés photovoltaïques : faire le tri

Avant de choisir une société pour un projet photovoltaïque, il faut s’assurer un minimum de son sérieux. Certaines prennent l’habitude de se recommander d’organismes officiels ou connus (chambre d’agriculture, banques, fournisseurs d’énergie, etc.) ou mettent en avant des partenariats avec certains de ces organismes. Il s’agit avant tout de vérifier ces dires qui, dans certains cas, ne recouvrent aucune réalité.
De même, il ne faut pas hésiter à demander des références d’agriculteurs ayant déjà eu recours à cette société et prendre le temps de les contacter ou d’aller les voir pour se rendre compte par soi-même du sérieux de la société en question.
Dans tous les cas, mieux vaut toujours consulter plusieurs sociétés pour comparer les prestations proposées et les tarifs.
Enfin, pour évaluer la rentabilité de l’investissement et analyser juridiquement les contrats proposés, mieux vaut se faire accompagner par des conseillers indépendants. Le sérieux des contrats proposés est aussi un indicateur de la fiabilité de l’entreprise. 
Pour plus d’informations : chambre d’agriculture de Rhône-Alpes, Olivier Thiercy, conseiller énergie Drôme-Ardèche (tél : 06 33 25 27 64 - mail : [email protected])