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Phytos

Plan pollinisateurs : le gouvernement publie l'arrêté abeilles révisé

Le gouvernement a publié le 21 novembre le nouvel «arrêté abeilles» qui étend aux fongicides les restrictions d'usage en vigueur durant les périodes de floraison et précise les conditions d'utilisation de l'ensemble des phytos (fongicides, insecticides, acaricides herbicides) utilisables durant cette période. Si le produit est autorisé par l'Anses pour un usage en période de floraison, «le traitement doit, sauf cas particulier, être réalisé dans les deux heures qui précèdent le coucher de soleil et dans les trois heures qui suivent le coucher de soleil», selon l'arrêté du ministère de l'Agriculture, dont l'entrée en vigueur est fixée au 1er janvier 2022.

Plan pollinisateurs : le gouvernement publie l'arrêté abeilles révisé

Budgété à hauteur de 115 millions d’euros, notamment à partir de la PAC, des fonds de l’Agence nationale de la recherche (ANR), d’Ecophyto et des collectivités locales, le"plan pollinisateurs" contient six axes. Le premier vise l’amélioration des connaissances scientifiques. Le MAA et le MTE veulent « mobiliser le monde de la recherche UE et France pour mieux connaître les pollinisateurs » sur lequel de nombreuses données manquent. Le deuxième axe concerne l’activation de leviers économiques pour préserver les pollinisateurs domestiques et sauvages. Il regroupera quatre actions spécifiques, parmi lesquelles un volet sur la sélection des abeilles et la mise en place de couverts mellifères dans les collectivités locales. Le troisième axe s’appuiera sur la doctrine « éviter, réduire compenser » avec la rédaction prochaine d’un guide. 

Dérogations possibles

Le quatrième axe consistera à préserver le bon état de santé des pollinisateurs contre les risques climatiques, sanitaires, etc. Pour ce faire, plusieurs leviers seront développés comme la formation des agriculteurs et la mise en place d’un observatoire de la mortalité des abeilles.

Le cinquième axe a trait à l’élargissement de l’arrêté de 2003 à l’ensemble des intrants (fongicides, herbicides…) et à la mise en place de créneaux horaires pour épandre les intrants : 2 heures avant le coucher du soleil et jusqu’à 3 heures après. « Cette dernière mesure fera l’objet d’une expérimentation », assure-t-on après des deux ministères. Mais cette expérimentation n’est pas encore cadrée, ajoute-t-on. Cependant, des dérogations pourront être accordées, notamment pour des traitements d’urgence avec des fongicides ou quand des mesures peuvent apporter des garanties équivalentes en termes de protection des pollinisateurs, sous couvert d’une évaluation faite par l’Anses et l’Inrae (1).

Enfin, sixième axe : le partage des bonnes pratiques agricoles. L’objectif est ici de récupérer, compiler et déployer ces bonnes pratiques protectrices des pollinisateurs, notamment à travers le Contrat de solutions initié par la FNSEA. Le plan qui fera l’objet d’un comité de suivi regroupant l’Etat, les filières agricoles, les apiculteurs, les associations environnementalistes, les instituts techniques... prévoit aussi d’évaluer le risque de tous les pesticides, dont les herbicides et fongicides, pour les pollinisateurs en vue d’une possible restriction, voire d’une interdiction de traitement sur les cultures attractives en floraison. 

(1) Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES). Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE)

Apiculteurs mécontents, FNSEA et JA mitigés 

Le nouvel «arrêté abeilles» paru le 21 novembre ne satisfait pas les apiculteurs, qui dénoncent la possibilité de traiter les cultures à des moments où les abeilles butinent. «Deux heures avant le coucher du soleil, sans autre critère, pour nous ce n'est pas acceptable», a déclaré à l'AFP Eric Lelong, président de l'Interprofession des apiculteurs (Interapi). L'organisation voulait que soit également pris en compte le critère de la température. Ainsi, en juillet, deux heures avant le coucher de soleil, «il fait 25 degrés» et «les abeilles sont encore en train de butiner».

A l'inverse, la FNSEA et les JA, saluent, au nom de la lutte contre le travail de nuit des agriculteurs, «l'ouverture permettant de déroger à l'obligation de traiter les cultures attractives seulement après le coucher du soleil, avec l'ajout d'une plage de deux heures avant le coucher du soleil». La FNSEA et les JA dénoncent néanmoins une «surtransposition des règles communautaires» ainsi que «l'insuffisance des moyens financiers pour mettre en œuvre les objectifs». Ce plan prévoit notamment d'évaluer le risque de tous les pesticides, dont les herbicides et fongicides, pour les pollinisateurs en vue d'une possible restriction, voire interdiction de traitement sur les cultures attractives en floraison, aujourd'hui applicable uniquement aux insecticides.

Trois à cinq milliards d’euros

Promis par le gouvernement en août 2020, le plan pollinisateur a été en partie dévoilé le 20 novembre. Il s’appliquera lors des cinq prochaines années a pour objectif de stopper le déclin des insectes pollinisateurs (abeilles, guêpes, bourdons, papillons, coccinelles, mouches…), indispensables à l’agriculture. « Leur fonction est essentielle, y compris économiquement. Les experts estiment la valorisation de leur service rendu entre 3 et 5 milliards d’euros par an », explique-t-on dans l’ entourage du ministre de l’Agriculture. Selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), entre 40 % et 75 % des insectes du globe sont en train de disparaître et pas moins d’une espèce sur dix de pollinisateurs serait au bord de l’extinction. Ce mouvement touche aussi la France avec des taux de mortalité pouvant aller jusqu’à 30 % pour les abeilles domestiques et sauvages.