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Ppam

Ppam : une filière vivante et dynamique

Les plantes à parfum aromatiques et médicinales ont été mises à l’honneur, les 9 et 10 mars dernier à Eurre, lors d’un colloque destiné à la filière.
Ppam : une filière vivante et dynamique

Faire un point sur la situation mondiale de la filière Ppam est un exercice périlleux. Délégué de cette filière à France AgriMer, Claude Chailan a annoncé que les données de production étaient peu fiables, le secteur étant toujours considéré comme marginal. « Les statistiques douanières sont aussi difficiles à analyser, puisque imprécises et regroupant de multiples produits », explique-t-il. Pour les trois secteurs, les marchés mondiaux varient : les épices et aromates s'étendent sur un marché de plus de 4 millards de dollars (Mds $) et sont produits en masse par l'Inde. 450 000 tonnes (t), dont 150 000 sont échangées par an dans le monde. Les plantes médicinales font l'objet de nombreux échanges d'environ 2 Mds $, les principaux exportateurs étant l'Inde, la Chine, ainsi que l'Europe et les Etats-Unis. Les huiles essentielles sont en pleine expansion : la production mondiale était de 180 000 t en 2015 et devrait atteindre les 370 000 t en 2024. Les exportations mondiales, quant à elles, sont de 3 Md € (euros).

Claude Chailan, délégué de la filière Ppam à France Agrimer.


52 800 hectares en France
La production française, elle, se conjugue avec des disparités géographiques importantes. En 2018, 52 800 hectares (ha) de Ppam ont été cultivées, dont 29 000 de plantes à parfum et 23 800 de plantes aromatiques et médicinales. Le lavandin (20 500 ha, soit 64 %) et la lavande (5 120 ha, soit 24 %) représentent toujours une grande majorité des productions françaises. En Outre-Mer, sont produites les plantes traditionnelles en fonction du pays : le géranium bourbon à La Réunion, le bois d'Inde en Guadeloupe, le bois de santal en Nouvelle-Calédonie, etc. En 2017, ont été exportées vers le continent 8,6 tonnes de plantes.
Enfin, pour conclure, Claude Chailan a rappelé l'existence de plusieurs labels visant à affirmer la qualité des Ppam françaises. L'AOP lavande de Haute-Provence, qui compte 88 producteurs, englobe 1 600 des 2 108 ha de lavande fine, soit 13 t de production sur 34 (chiffres 2016). Par ailleurs, la production biologique des Ppam est en constante augmentation, avec aujourd'hui une part proche de 15 % (8 000 ha environ), parmi lesquels 50 % de lavande et lavandin et 3 % de sauge sclarée. 

Amandine Priolet

Près de 200 personnes ont assisté au colloque Ppam.

CIHEF / Alain Aubanel : « Changer les pratiques culturales »

Présent au colloque, Alain Aubanel, président du syndicat des Ppam de France et du Cihef (comité interprofessionnel des huiles essentielles françaises), s’est montré ravi d’un tel événement au cœur de la Drôme. « S’il existe des colloques un peu partout en France sur des thèmes bien précis (plantes aromatiques, huiles essentielles ou encore réglementations), il s’agit du premier dans la Drôme. C’est intéressant de parler des Ppam sur leurs lieux de production et de recevoir des professionnels de la France entière sur notre territoire », observe-t-il. Ce colloque a été également l’occasion de parler de l’actualité de la filière : « Il faut être prudent car une baisse de prix est attendue. Tout peut très vite changer », met-il en garde. Mais aujourd’hui, le président du Cihef travaille sur le changement des pratiques culturales des agriculteurs, pour aller vers des champs « plus verts ».
« Les attentes sociétales quant à la réduction des produits phytosanitaires sont là et c’est notre devoir, dans la profession, de travailler en ce sens, fait remarquer Alain Aubanel. Tous les agriculteurs doivent comprendre qu’on le fait pour les citoyens mais aussi pour nous avant tout. Il est aujourd’hui plus valorisant de conjuguer avec de nouvelles techniques culturales nous permettant de réduire de 80 % notre utilisation de pesticides. Avant, nous n’avions pas la science. Aujourd’hui, on sait que des produits phytos ne servent à rien et qu’il vaut mieux travailler sur les produits de biocontrôle. Les agriculteurs doivent changer leurs pratiques culturales. C’est un message que tout un chacun est capable de comprendre. » Mais aujourd’hui, les producteurs de Ppam semblent être plus inquiets par un autre aspect : « La plus grosse préoccupation de nos agriculteurs, aujourd’hui, porte sur le changement climatique. Il s’agit d’un sujet en or car tout le monde est touché. Et, dans ce cas-là, ce n’est pas le glyphosate qui est en cause mais bien le carbone. Nous devons tous, à notre mesure, réduire l’utilisation de l’énergie fossile ». Alain Aubanel encourage d’ailleurs les agriculteurs à broyer leurs végétaux, plutôt qu’à les brûler : « Au-delà de l’aspect environnemental, cela permet également d’apporter de la matière organique à nos sols », assure-t-il. 
A. P.

Sica Bio Plantes : une filière bio et équitable intégrée en Biovallée

En partenariat commercial exclusif avec la société Elixens France, qui achète la totalité des matières produites, la société d’intérêt collectif agricole (Sica) Bio Plantes, basée à Eurre, repose sur la culture de plantes à parfum, aromatiques et médicinales (Ppam). Elle est composée d’une cinquantaine d’agriculteurs en Dauphiné-Provence cultivant au total 36 espèces de plantes sur une surface de 400 hectares en agriculture biologique. Ainsi, la Sica Bio Plantes a pour mission de gérer l’organisation de la production de Ppam par ses adhérents selon les règles de l’agriculture biologique contrôlée, de collecter les produits issus de la transformation et d’en assurer la commercialisation. « Cela représente environ 6 à 7 tonnes (t) d’huiles essentielles par an, 25 à 30 t de plantes sèches et 25 à 40 t d’hydrolats », idique Jean-Pascal Abdelli, directeur d’Elixens France, qui gère la commercialisation. « L’objectif est d’agrandir régulièrement le cercle des producteurs pour assurer une croissance durable à cette coopérative », poursuit-il.
Par ailleurs, la Sica Bio Plantes bénéficie de l’appui technique du lycée horticole Terre d’Horizon. Grâce au partenariat entre les structures, les producteurs sont invités à se rassembler lors de visites de parcelles, réunions techniques ou encore mise en place d’expérimentations. « Ce fonctionnement permet de répondre aux problématiques rencontrées par les producteurs de Ppam, qui ont besoin d’engagement dans la durée pour rentabiliser leurs plantations de cultures pérennes », conclut Jean-Pascal Abdelli. 
A. P.

Jean-Pascal Abdelli, directeur d’Elixens France, a présenté le partenariat avec la Sica Bio Plantes, une filière bio et équitable intégrée en Biovallée.

Produire autrement avec le lycée Terre d’Horizon

Dans un souci de mise en place de nouvelles productions, le lycée horticole Terre d’Horizon de Romans-sur-Isère contribue à l’expérimentation et à la diffusion de techniques nouvelles. Plusieurs essais sur les Ppam sont réalisés, grâce notamment aux actions Récital (culture de la lavande et changement climatique) et Récoltant (réseau collectif des lycées techniques agricoles-nature et territoires). L’une des actions engagées par le lycée est le développement de la marque Végétal Local, qui s’applique à la production de Ppam.
Par ailleurs, le lycée suit un essai sur la culture et la récolte du tilleul des Baronnies en agriculture biologique. Dans un contexte de forte concurrence étrangère, soutenue par des coûts de main-d’œuvre largement inférieurs à ceux que supportent les producteurs locaux, « l’objectif de cet essai est de faciliter la récolte, en diminuer les coûts, tout en sauvegardant les variétés locales et soutenant l’agriculture en montagnes sèches », souligne Caroline Baconnier, chargée d’expérimentation au lycée. Ont ainsi été sélectionné des arbres en local pour étudier le comportement des aromatiques dans un système en agroforesterie. Avec le soutien de la chambre d’agriculture de la Drôme, d’Elixens et de la Sica Bio Plantes, les professionnels de la filière peuvent s’appuyer sur les premiers résultats de l’essai tilleul. « Dans l’avenir, Terre d’Horizon a pour mission de mettre en place de nouvelles cultures expérimentales avec une forte implication des équipes pédagogiques et des apprenants, dans l’objectif d’enseigner à produire autrement… et ainsi voir un nouvel horizon », conclut Caroline Baconnier. 

A. P.