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Maïs

Préservons les territoires maïsicoles !

Les travaux de la réforme de la Pac sont largement engagés et la Commission européenne doit présenter ses propositions le 29 mai. Le verdissement, jugé trop complexe et inefficace, passera inexorablement à la moulinette de la réforme. L’avenir des zones spécialisées maïs est donc au cœur des préoccupations de l’Association générale des producteurs de maïs (AGPM) qui se mobilise pour faire connaître les spécificités de ces territoires. Explications avec Patrick Brugière, administrateur de l’AGPM à Pierrelatte.
Préservons les territoires maïsicoles !

Alors que la Commission européenne s'apprête à livrer ses propositions pour la prochaine Pac à la fin du mois, qu'est ce qui pourrait changer pour la production de maïs ?
Patrick Brugière : « Outre les interrogations sur le budget et le risque de subsidiarité accrue qui impacterait l'ensemble des agriculteurs français, le verdissement est fortement remis en cause. Dans son rapport de fin 2017, la Cour des comptes européenne pointe du doigt ce dispositif qu'elle estime inefficace du point de vue environnemental et prône la rotation à la parcelle. L'enjeu est donc de taille pour quelques 600 000 ha de maïs, cultivés en monoculture en particulier en Aquitaine, mais aussi en Alsace et en Rhône-Alpes. Dans ces zones, le maïs est une culture ancestrale. Lors de la dernière réforme, l'AGPM et la CEPM étaient parvenues à sensibiliser la Commission européenne à la pertinence économique et environnementale de ces exploitations - le plus souvent de petite taille et où la transformation du maïs est réalisée sur place (par des élevages) ou à proximité immédiate de la production (usines au pied des champs). Nous avions donc obtenu la certification maïs comme équivalence au verdissement. »

La monoculture reste toujours pointée du doigt comme n'étant absolument pas durable. Qu'avez-vous comme arguments pour convaincre la Commission et l'État français de ne pas imposer partout la rotation ?
Patrick Brugière : « Nous avons aujourd'hui le bilan de trois années de certification maïs qui concerne 1 400 exploitations et 80 000 ha de maïs. Les exploitations engagées dans la certification ont développé les couverts hivernaux sur la totalité de leurs parcelles qui présentent d'incontestables bénéfices pour l'environnement. Les agriculteurs certifiés contribuent davantage aux objectifs environnementaux de la Pac que les exploitations qui se sont diversifiées pour répondre aux exigences du verdissement. Mais les préjugés sont nombreux sur le maïs. Les inquiétudes portent essentiellement sur les sols, la biodiversité, les paysages et le recours à l'irrigation comme l'avait évoqué Jean-Claude Bévillard, vice-président de FNE, à notre dernier congrès. Autant de points sur lesquels nous avons demandé l'expertise de l'institut Arvalis. Nous avons à présent tous les résultats pour affirmer que le maïs, y compris en monoculture, bien loin de menacer l'environnement, contribue à le préserver. »

Comment cela ?
Patrick Brugière : « Déjà, le maïs est la grande culture nécessitant le moins de produits phytosanitaires à l'hectare : pas de fongicide, peu d'insecticides, quelques interventions herbicides pouvant parfois être remplacées par du désherbage mécanique. Ensuite, la plante est particulièrement efficace pour stocker le carbone dans le sol grâce à son abondante biomasse laissée au sol après la récolte. En outre, les mesures de biodiversité dans le sol ont montré une très forte activité biologique et ce, même après cinquante ans de monoculture. Il en est de même pour la végétation qui abrite autant d'insectes que dans les jachères apicoles proches*. Loin de s'appauvrir, les sols conservent leur richesse en matière organique, en témoigne d'ailleurs l'augmentation régulière des rendements dans ces zones. Quant au recours à l'irrigation, il est loin d'être systématique (près de 50 % des parcelles en monoculture sont en culture pluviale). »
Comment comptez-vous faire reconnaître ces résultats auprès de la Commission européenne ?
Patrick Brugière : « La Confédération européenne de la production de maïs rassemble le maïs européen représenté par ses dix pays membres (Allemagne, Bulgarie, Espagne, France, Hongrie, Italie, Pologne, Portugal, Roumanie et Slovaquie) et présidé par Daniel Peyraube, président de l'AGPM. Elle se mobilise en ce moment à Bruxelles, avec l'AGPM, pour présenter ces résultats aux directions générales de l'agriculture et de l'environnement de la Commission européenne mais aussi à toutes les parties prenantes (ONG, parlementaires...). L'objectif est de montrer toute la richesse de ces petits territoires à très hautes valeurs, avant tout humaines, économiques, environnementales mais également paysagères, qu'il est impératif de préserver. Autant d'arguments pour convaincre que la Pac ne doit pas imposer des mesures systématiques, parfois contreproductives, mais au contraire permettre des adaptations locales et efficaces pour l'environnement et économiquement viable à l'image de la monoculture dans les territoires maïsicoles. » 
La Monoculture de maïs est le système Grande Culture présentant le plus faible Indice de Fréquence de Traitement (IFT) et ce avec une très faible variabilité.
*données du réseau biodiversité abeilles