Groupe 30 000
Avancer ensemble vers le bas intrants

La chambre d'agriculture de la Drôme accompagne des collectifs d'agriculteurs dans la réduction de l'usage des produits phytosanitaires.
Avancer ensemble vers le bas intrants

Le plan Ecophyto 1 a fédéré plus de 3 000 fermes autour de la baisse de l'usage des produits phytosanitaires. L'ambition du plan Ecophyto 2 est d'accompagner, au plan national, 30 000 agriculteurs volontaires vers l'agroécologie à bas intrants. La chambre d'agriculture de la Drôme est engagée depuis 2017 dans cette démarche appelée communément « Groupe des 30 000 ». Car « la vocation de la chambre d'agriculture est d'anticiper et d'accompagner les agriculteurs pour répondre aux attentes sociétales, réglementaires et environnementales, explique Olivier Durant, chef de service en son sein. L'évolution des pratiques peut aussi se traduire par l'amélioration de l'autonomie de décisions des agriculteurs, l'efficience de leur activité et peut faciliter leur travail au quotidien. »

Un objectif de - 20 à - 40 %

« Pour la chambre d'agriculture, ajoute Olivier Durant, l'enjeu est de montrer que la dynamique collective favorise la synergie et la transmission de solutions fiables et utilisables par tous, source d'efficacité et de revenu. » Ses conseillers ont un rôle d'animateur auprès de ces groupes. Ils apportent des références, transmettent des idées pertinentes adaptées aux exploitations.
L'échange en groupes permet d'identifier, ensemble, des marges de manœuvre atteignables à court et moyen termes car déjà mises en œuvre chez certains d'entre eux. « Globalement, l'adaptation de leurs pratiques se traduit par une baisse de consommation d'intrants de 10 à 20 %, indique Olivier Durant. Ils peuvent la réduire encore d'autant en modifiant leur système de production (en introduisant de nouvelles techniques, faisant évoluer l'assolement, les choix variétaux...). L'objectif est une baisse de 20 à 40 % d'ici trois à quatre ans en maintenant leur performance économique, voire l'améliorant. »

Sept groupes

La chambre d'agriculture de la Drôme accompagne sept groupes d'agriculteurs, soit plus de 70 producteurs, la plupart en lien avec des opérateurs économiques du département : un en ail (le premier constitué, en 2017), en arboriculture, viticulture, maraîchage, semences et deux en grandes cultures. Ils bénéficient de l'appui de conseillers (20 à 40 jours par an) pour construire un programme d'intervention sur des thématiques qu'ils choisissent. L'accompagnement est de trois à cinq ans. Chaque agriculteur définit ses marges de progrès et objectifs à atteindre tous les ans. Ses cultures sont suivies par le technicien, qui dresse un bilan annuel. L'analyse est communiquée à tout le groupe « pour donner une impulsion collective ».

 

Un programme à la carte

Chaque agriculteur progresse à son rythme, c'est un programme à la carte. La première étape est d'utiliser les produits phytosanitaires différemment. La deuxième est de modifier le fonctionnement de l'exploitation, via le désherbage mécanique, des faux semis, des couverts végétaux, des variétés plus résistantes aux maladies, la diversification des productions, l'intégration d'éléments floristiques de biodiversité...
L'Agence de l'eau, le Département et des communautés de communes accompagnent financièrement la démarche. La Région, elle, participe au financement du matériel de désherbage mécanique.

Annie Laurie
Collectifs / Des agriculteurs adhérant à un « groupe 30 000 » témoignent.
Des agriculteurs investis dans un « groupe 30 000 »
En complément de l'appui technique individuel, la chambre d'agriculture anime des temps collectifs entre producteurs pour échanger sur leurs pratiques alternatives, ici en juin 2018 au Fontanil (38) : paillage, occultation, solarisation, désherbage mécanique, auxiliaires des cultures... (Crédit photo : C. Robert).
Damien Besson (Montmeyran) s'est équipé en autoguidage RTK en 2018. Et il utilise la modulation intraparcellaire pour ses apports d'azote sur blé dur depuis l'an passé. Cette année, il s'en sert aussi sur ses colzas semences. « C'est sensationnel, constate-t-il. Cela a un coût mais permet des économies. En plus, avec l'autoguidage RTK, il n'y a pas de recoupement, c'est tip top ». En outre, cet agriculteur utilise Optiprotect (avec Mes P@rcelles), un outil d'aide à la décision (OAD) pour la protection fongicide des blés (décider si traiter est nécessaire ou non et, si oui, intervenir au bon moment avec la bonne dose).
« Avec l'accompagnement de la chambre d'agriculture, il va par exemple réduire ses traitements fongicides sur blé dur tout en gardant une protection optimale », note Anne Court, conseillère de la chambre d'agriculture (06 22 42 53 99). Elle signale en outre que « les solutions de guidage RTK d'outils seront présentées au salon Tech & Bio 2019 par les entreprises partenaires et sous l'impulsion de la chambre d'agriculture ».
2018 est également l'année d'entrée de Damien Besson dans le « groupe 30 000 » grandes cultures de Valence, que suit cette conseillère. Via celui-ci, il a participé à une formation qu'il estime « très intéressante » sur le RTK dispensée par un intervenant d'Arvalis, qui a testé différents systèmes, fait des comparatifs et donné des conseils sur la pratique, les réglages... Cet agriculteur voit ce groupe comme un moyen d'échanger, notamment sur différentes pratiques d'autoguidage, sur des astuces pour régler les outils...
Lilian Moulin (Montmeyran) fait également partie du « groupe 30 000 » grandes cultures de Valence depuis 2018. Il bine des légumes avec guidage manuel depuis 30 ans et le fait toujours pour des tomates d'industrie et courgettes semences. « Je suis entré dans le "groupe 30 000" pour avancer avec le guidage RTK en binage, herbicides, engrais en vue de limiter les dosages par la précision car j'ai des parcelles en pente, très hétérogènes, explique-t-il. Il y a des limites et je voudrais les faire tomber. Je voudrais obtenir, avec le RTK, la précision que j'ai aujourd'hui avec une bineuse guidée manuellement. J'ai intégré le groupe pour échanger, profiter de l'expérience des autres, voir quelles difficultés rencontrent ceux qui l'utilisent et comment les résoudre. »
Lilian Moulin souligne encore : « Aujourd'hui, le RTK d'un tracteur peut être combiné à celui d'un outil attelé derrière, la précision est ainsi supérieure. C'est bien pour les semis décalés des productions de semences et leur binage, qui demandent une grande précision. Je suis aussi intéressé par la modulation intraparcellaire. Autre plus, le guidage RTK ne fatigue pas la vue, contrairement au guidage manuel qui impose de la concentration tout le temps. Ça soulage quand on fait de longues journées de binage. »
Rodolphe Ravoux (Mirabel-aux-Baronnies) adhère depuis 2018 au « groupe 30 000 » maraîchage. Christel Robert, conseillère de la chambre d'agriculture (06 98 02 12 58), assure un appui technique individuel (visites, suivi et bilan des pratiques) et une animation collective auprès de ce Groupement des maraîchers Isère et Drôme (réunion bilan pour comparer et échanger sur les pratiques, visites d'exploitations et témoignages...). Les axes de travail définis par ce groupe sont la gestion alternative de l'enherbement (paillage, occultation, solarisation, désherbage mécanique...) ainsi que des maladies et ravageurs (renforcement des observations des cultures, suivi des bulletins d'avertissements, produits de biocontrôle, auxiliaires des cultures, filets de protection, gestion du climat sous abris...).
On se rend compte qu'il existe une bonne marge de progression en termes de réduction de l'utilisation de produits phytos, indique Rodolphe Ravoux. Le but est de moins traiter sans perdre en production. Sur l'exploitation, nous utilisons des filets pour protéger les légumes de plein champ contre les ravageurs et lâchons des auxiliaires dans les serres. En mars, dans le cadre du groupe, une formation sur les auxiliaires a eu lieu. Lorsque Christel vient sur notre exploitation, nous faisons un tour des cultures, exposons nos problèmes. Son avis pertinent sur nos pratiques est important pour progresser. »
Annie Laurie