Agroécologie
Des diagnostics destinés à favoriser la biodiversité

La chambre d'agriculture de la Drôme propose un diagnostic aux agriculteurs pour mettre en lumière et améliorer leurs pratiques et aménagements favorisant la biodiversité.

Des diagnostics destinés à favoriser la biodiversité

En matière de biodiversité, la chambre d'agriculture de la Drôme propose un accompagnement individuel aux agriculteurs depuis 2017. Il consiste à réaliser un diagnostic de leur exploitation (qu'elle soit en agriculture conventionnelle, raisonnée ou biologique). Ce diagnostic met en lumière les pratiques favorables à l'accueil des espèces sauvages, les éléments naturels déjà existants tels que les haies, fossés, mares, murets, bandes enherbées... Il est aussi destiné à repérer les points à améliorer sur le plan des pratiques agricoles comme de l'environnement de la ferme. A partir de ce diagnostic, des conseils sont donnés à l'agriculteur pour mieux intégrer la biodiversité dans la conduite de son exploitation, sans nuire à son bon fonctionnement, en respectant les enjeux techniques et agronomiques qu'il s'est fixés.

Une étude du parcellaire

A la chambre d'agriculture de la Drôme, Aline Buffat, conseillère biodiversité et agroforesterie, est chargée de ces diagnostics. Elle commence par étudier le parcellaire de l'agriculteur pour voir s'il comporte des infrastructures agroécologiques intéressantes, des cours d'eau, si l'exploitation est dans une zone traversée par la trame verte ou bleue... Puis elle fait un point avec l'agriculteur sur l'historique et le fonctionnement de son exploitation, ses attentes, besoins, préoccupations. Elle lui demande aussi s'il fait des observations dans ses champs, s'il est attentif à la biodiversité, s'il sait reconnaître les auxiliaires... Ensuite, tous deux se rendent sur une parcelle représentative de l'exploitation.

Des pistes d'action

« Avec l'agriculteur, je discute de ses pratiques, de l'entretien des bords de champs, des jachères..., explique la conseillère. Cela me permet de connaître sa perception de la biodiversité et de formuler des préconisations. Par exemple, en cas de problèmes d'érosion, je peux recommander d'installer des haies, des bandes enherbées. Je rappelle aussi les périodes de fauche ou d'entretien propices à la faune et à la flore. J'évoque d'autres aménagements pouvant être mis en place comme les mares, nichoirs, tas de bois, de pierres... En fait, même si des améliorations sont toujours possibles, les agriculteurs ne se rendent pas forcément compte qu'ils ont déjà des pratiques favorables à la biodiversité. Le diagnostic les met en évidence. Pour finir, je rédige un compte rendu dressant un état des lieux et proposant des pistes d'action. »

Annie Laurie
Témoignage / Laurent Viossat (Montélier) a demandé à la chambre d'agriculture de la Drôme de réaliser un diagnostic biodiversité sur son exploitation. Sa volonté : réduire son « impact phytosanitaire » sur l'environnement.
Laurent Viossat : « Je suis sensible à la biodiversité »
« Le diagnostic biodiversité réalisé par la chambre d'agriculture de la Drôme s'est révélé intéressant et bénéfique, pour moi », confie Laurent Viossat (ici à côté d'une mare située à proximité de parcelles).
« J'ai demandé à la chambre d'agriculture de réaliser un diagnostic biodiversité pour faire le bilan de mes pratiques, savoir si mon exploitation répondait aux critères de biodiversité, explique Laurent Viossat. Ce diagnostic, réalisé en janvier 2018, s'est révélé très intéressant et bénéfique pour moi. » Il a mis en évidence des pratiques et aménagements favorables à la biodiversité déjà en place sur son exploitation. Parmi eux, l'utilisation d'un pulvérisateur à coupure de tronçons (« réduction de 10 % de l'usage des produits phytosanitaires »), d'un distributeur d'engrais avec pesée en continu (« qui apporte la dose au plus juste sur la culture »). Mais aussi le fractionnement des apports d'engrais (« en quatre fois sur blé et trois sur maïs »), l'apport de compost de déchets ménagers (« un apport de matières naturelles qui renforce la fumure »). Egalement des couverts végétaux composés de vesce, trèfle et phacélie (« pour limiter le désherbage chimique »). Et des aménagements favorables à la biodiversité : une haie de mûriers protégée de 400 mètres de long (« taillée régulièrement »), une mare et un lac artificiel à proximité de parcelles.
A l'appui de ce diagnostic biodiversité, la chambre d'agriculture a proposé à Laurent Viossat de poser des nichoirs à faucons crécerelles et à chouettes chevêches pour lutter contre les campagnols, de planter des arbustes, de développer les haies, le binage, les bandes enherbées entre parcelles (de 3 mètres de large)...
Dans un diagnostic biodiversité, peut entre autres être proposée la pose de nichoirs, par exemple pour faucons crécerelles. Crédit photo : chambre d'agriculture de la Drôme.
Améliorations en cours et prévues
Depuis, Laurent Viossat a implanté, de son propre chef, des bandes enherbées (de 5 mètres de large) composées de ray-grass et luzerne sur une parcelle située à proximité d'un habitat dense (à Fauconnière) « pour éviter de traiter trop près des maisons ». Il projette la plantation à la fin de cette année d'environ 300 mètres linéaires de haies composites*, « financées à 100 % par la fédération départementale des chasseurs (à condition qu'elles répondent à un enjeu de biodiversité) car la ferme se situe dans un corridor écologique ». Elles seront plantées avec l'aide de la MFR de Mondy, à Bourg-de-Péage (Drôme). Ensuite, des nichoirs seront posés. Et la LPO** de la Drôme vient de l'informer qu'un club d'entreprises drômo-ardéchoises sensibles aux enjeux de biodiversité pourrait lui financer la plantation de 300 mètres linéaires de haies ainsi que des perchoirs à rapaces. En outre, sur préconisation de la conseillère de la chambre d'agriculture, Laurent Viossat va semer cet automne une bande fleurie de trois mètres de large coupant en deux une grande parcelle. Objectif : « favoriser la présence d'insectes auxiliaires pour lutter contre des bioagresseurs ». Il va aussi investir dans une bineuse (environ 10 000 euros) en début 2020, subventionnée à hauteur de 40 % par la Région et l'Europe, « pour désherber mécaniquement ». Côté diversification, il aimerait poursuivre dans cette voie avec du soja « si les perspectives économiques sont meilleures ».
Laurent Viossat confie encore : « Je mets tout ça en place par conviction. Je suis sensible aux sujets environnementaux, à la biodiversité. Je veux réduire mon impact phytosanitaire sur l'environnement, répondre aux attentes sociétales. Je le fais aussi pour anticiper les orientations que prendra la future réforme de la Pac, qui devrait aller de plus en plus vers l'agroécologie. Et je suis ouvert à toutes formations permettant de réduire l'impact environnemental des pratiques agricoles. »
A. L.
* Trois types de haies financées : gourmande, fruitière, forestière.
** LPO : Ligue pour la protection des oiseaux.

Repères /

EARL de Chenevelle, à Montélier (Drôme).
Exploitation de Laurent Viossat (39 ans), installé dans le cadre familial en 2012.
120 hectares, dont un îlot de 80 hectares attenant à la ferme et à l'irrigation.
Production en agriculture conventionnelle de maïs, blé, colza, orge et tournesol semence.