Renouvellement des générations
L’EARL du Noyer de la Dame,  entre transmission et diversification

Justin Roussin, 25 ans, s’est installé sur la ferme familiale à Tulette, aux côtés de son père Michel. Tous deux sont à la tête d’une exploitation agricole diversifiée, entre viticulture, maraîchage et grandes cultures.

L’EARL du Noyer de la Dame,  entre transmission et diversification
Justin Roussin a développé cette année la partie maraîchage au sein de l’exploitation familiale.

Depuis de nombreuses années, les Jeunes Agriculteurs (JA) de la Drôme travaillent au maintien d’une agriculture pérenne. L’une des principales missions du syndicat agricole est de favoriser le renouvellement des générations, pour atteindre un objectif phare : nourrir neuf milliards d’habitants en 2050. Le 3 novembre, à l’occasion de l’inauguration de l’exploitation de Justin Roussin, installé depuis 2018 à Tulette, Léa Lauzier, co-présidente des JA de la Drôme, a fait état de chiffres alarmants : « En cent ans, le nombre d’agriculteurs en France a été divisé par dix. Aujourd’hui, un exploitant sur trois n’est pas remplacé, alors que dans six ans, près de la moitié des agriculteurs français feront valoir leurs droits à la retraite ». Face à ce constat, l’installation des jeunes générations est plus que jamais un défi à relever. En 2020, selon les chiffres délivrés par la MSA, 140 exploitants de moins de 40 ans se sont installés en Drôme, dont 78 avec l’aide de la dotation jeunes agriculteurs (DJA). L’enjeu du renouvellement des générations en agriculture a d’ailleurs été présenté à une classe de première année de baccalauréat professionnel conduite et gestion de l›entreprise viti-vinicole (CGEVV) option vigne et vin de la MFR de Richerenches, présente pour l’occasion.

Attachement aux circuits courts

A Tulette, Justin Roussin, âgé de 25 ans, s’est donc installé sur l’EARL du Noyer de la Dame depuis 2018 en co-gérance avec son père, Michel. Après un baccalauréat professionnel viti-œonologie à la MFR de Richerenches, il a rejoint l’exploitation familiale présente depuis cinq générations. Sans demander la DJA, le jeune exploitant a acheté 14 hectares de vigne (investissement de 135 000 euros), se rajoutant aux 25 ha détenus jusque-là par son père. L’exploitation compte aujourd’hui 48 ha répartis comme tel : 33 ha de vignes (AOP Côtes-du-Rhône, Côtes-du-Rhône village, IGP), 10 ha de céréales (petit épeautre, blé tendre et blé dur), 4 ha de lavande et d’inule odorante ainsi qu’1 ha de maraîchage depuis cette année (melons, tomates, courgettes, aubergines, haricots verts, salades, mâche, épinards, etc.). Chaque production a son propre réseau de commercialisation, où l’attachement aux circuits courts ne fait aucun doute : les raisins sont envoyés à la cave coopérative Costebelle (Tulette), le blé est vendu aux Etablissements Souchard (Chantemerle-lès-Grignan), la lavande et l’inule odorante sont distillées dans les Baronnies tandis que les légumes sont vendus directement à la ferme, sur les marchés des alentours ou en grandes surfaces.

Le choix du maraîchage et de la vente directe

D’ailleurs, pour satisfaire la clientèle et proposer davantage de produits, la partie maraîchage est vouée à se développer dès l’année prochaine, avec l’installation d’une serre de 1 000 m². Le jeune agriculteur, en conversion bio depuis un an, travaille également sur un projet de serre photovoltaïque de 2 ha, avec la société Reden Solar, pour cultiver d’ici quelques années asperges, pommes de terre nouvelles, entre autres. L’EARL propose également de la prestation de services, notamment en périodes de vendange. A l’avenir, père et fils entendent diminuer les surfaces viticoles au profit du maraîchage, et développer ainsi la vente directe sur Tulette et les environs. Il sera aussi question de réduire la taille de l’exploitation dans quelques années, au moment du départ à la retraite de Michel Roussin.

La ressource en eau, toujours au cœur des débats

Présentations faites, Justin Roussin, qui porte également la casquette de co-président des JA du canton de Tulette aux côtés de Wilson Feschet, a alerté les élus présents sur une problématique majeure du monde agricole : la ressource en eau. « L’eau du Rhône doit arriver, oui mais quand ? », s’interroge le jeune agriculteur, s’inquiétant aussi d’une éventuelle fermeture des canaux existants. Michel Brès, élu à la chambre d’agriculture du Vaucluse et président de l’association de protection et promotion de l’irrigation (APPI) en Drôme provençale et Vaucluse, en a profité pour rappeler le projet Hauts de Provence rhodanienne (HPR). Ce dernier vise à prélever l’eau du Rhône pour irriguer quatre-vingt communes du sud Drôme et du Nord Vaucluse. 

« Important de savoir anticiper »

Lors de son intervention, Renée Payant, première adjointe au maire de Tulette, a souligné « l’importance des ressources géographiques et naturelles » du territoire, et l’intérêt de diversifier ses cultures et ses pratiques. « L’agriculteur, c’est celui qui fait vivre. Savoir produire plusieurs choses, c’est l’avenir. C’est important de savoir anticiper et d’être maître de nos productions », a-t-elle ajoutée. « Nous avons besoin de cette nouvelle génération pour nous nourrir, a relayé Marie Fernandez, conseillère départementale du canton de Grignan et maire de Donzère. On sera à vos côtés pour trouver des solutions », a-t-elle assuré. La matinée s’est poursuivie par une visite de l’exploitation, et notamment de la serre de 640 m² où les salades venaient juste d’être repiquées. 

Amandine Priolet

Justin Roussin reçoit le trophée de l’agriculteur engagé
Justin Roussin a reçu sa récompense des mains de Laurent Girard, directeur marketing de CTH Agri.

Justin Roussin reçoit le trophée de l’agriculteur engagé

Lors de la première édition des Trophées de L’Agriculture jeudi dernier, Justin Roussin a été mis à l’honneur pour son engagement au sein d’une association ou dans la vie publique, en lien avec le monde agricole. L’occasion de souligner son investissement au sein du conseil d’administration de la cave coopérative de Costebelle et d’une association syndicale autorisée (ASA) pour l’irrigation collective. Le jeune exploitant agricole de 25 ans a également suivi les traces de son père chez les sapeurs-pompiers volontaires où il est engagé depuis neuf ans.  
A. P.