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Un travail de patience et de passion pour Anaïs Vallot

Continuer d’écrire l’histoire du domaine Vallot-Le Coriançon, débutée il y a quatre générations : c’est le défi - réussi - que s’est lancée il y a huit ans Anaïs Vallot, fille de vignerons, jusque-là promise à une carrière dans l’hôtellerie.

Un travail de patience et de passion pour Anaïs Vallot
Anaïs Vallot, ici aux côtés de son père François, est la cinquième génération du domaine Vallot. © AP

A Vinsobres, la renommée du domaine Vallot-Le Coriançon n’est plus à faire. Longtemps gérée par François Vallot, quatrième génération de la famille de vignerons, l’exploitation de 30 hectares n’a cessé d’évoluer pour se tourner vers l’agriculture biologique en 2003 puis la biodynamie en 2007. Depuis 2015, c’est sa fille Anaïs qui a officiellement pris la relève. Pourtant, rien ne prédestinait la jeune femme de 36 ans aujourd’hui à poursuivre l’aventure familiale. Après une dizaine d’années d’expérience dans l’hôtellerie de luxe internationale, Anaïs Vallot a fait son grand retour aux sources. « A un moment donné, la question de la reprise du domaine familial s’est posée. J’ai toujours développé cette appétence pour la vigne, les vendanges, Vinsobres, l’atmosphère qui régnait dans ce domaine. Mais je pensais que ce n’était pas un métier pour moi », explique-t-elle. Pourtant, fière d’avoir grandi au milieu de ce patrimoine, elle s’est laissé tenter par le défi. « J’ai repris mes études en me formant notamment à l’université des vins de Suze-la-Rousse. Les connaissances sont venues avec le temps, et avec ce qu’a bien voulu me transmettre mon père », réagit-elle.

L’amour du terroir

Car la conduite d’un vignoble en biodynamie demande observation et expérience. « Depuis toujours, mon père était convaincu que le terroir se suffisait à lui-même, sans apport d’intrants. Il souhaitait un équilibre total entre les vignes et les vins. Aujourd’hui, le vignoble se porte de mieux en mieux, même si nous ne sommes pas à l’abri des maladies. La vigne est vivace, pleine de vie, avec un bon équilibre, déclare-t-elle. Je me rends compte de la chance que j’ai d’avoir cette richesse autour de moi et j’ai beaucoup d’admiration pour les gens qui font ce métier difficile. Aujourd’hui, je suis fière d’en faire partie. Le pari n’était pas gagné d’avance. » C’est effectivement un grand écart entre hôtellerie de luxe et domaine viticole qu’elle a franchi, non sans investissement. « C’est un travail de longue haleine, de patience, de passion, ajoute-t-elle. Mais je pense que je suis au bon endroit, au bon moment. Vinsobres est dans un tournant assez significatif, avec l’engouement des consommateurs pour des vins du terroir, de qualité. Nous avons l’atout de produire le cru le plus au nord de cette partie méridionale, avec des vins de caractère, reconnus pour leur fraîcheur et leurs épices. »

Un nouveau caveau

Pour essayer de lutter contre le réchauffement climatique, le domaine Vallot-Le Coriançon a planté récemment 0,5 hectare de Counoise, un cépage d’origine espagnole. Autrement, l’encépagement n’a pas évolué ces dernières années et le domaine se compose toujours de 22 ha de cru Vinsobres et de 8 ha en Côtes-du-Rhône, Côtes-du-Rhône village et vins de pays. En moyenne, « nous produisons 1 300 hectolitres, dont 300 en AOP », souligne Anaïs Vallot. Côté commercialisation, le profil des ventes s’est modifié avec l’arrivée de la crise sanitaire. Auparavant, 50 % des ventes se faisaient au caveau. Un chiffre aujourd’hui revu à la baisse (environ 30 %) : « Vendre au caveau a du sens pour nous. Cela nous permet de rencontrer les gens, de leur expliquer le produit en fonction du climat, de l’ensoleillement, et de valoriser le territoire, affirme-t-elle. D’ailleurs, nous ouvrirons, avant la période estivale, notre nouveau caveau de dégustation qui se veut plus spacieux et mieux adapté à l’accueil de notre clientèle. Il sera attenant à la mise en bouteilles, ce qui nous facilitera la logistique et nous permettra de conjuguer les deux activités. ».
En parallèle, le domaine Vallot s’est développé à l’export (passant de 10 à 30 %) et principalement aux Etats-Unis, Canada, Japon, Suisse... et continue de travailler avec des restaurateurs locaux ou des revendeurs du territoire national. Plus que jamais, Anaïs Vallot ressent le besoin intense de communiquer. Récemment, elle a retrouvé le contact avec sa clientèle grâce à la reprise des salons professionnels. « C’est important de maintenir le lien, de parler de notre métier et de notre petit bout de terroir. » Aujourd’hui gérante du domaine, Anaïs Vallot n’oublie pas d’où elle vient. « Je suis à la tête du domaine sur le papier mais j’aime à dire que mon père est plus que présent sur l’exploitation, conclut-elle. Sa philosophie est partout. »

Amandine Priolet