TÉMOIGNAGE
Quelles solutions pour maîtriser les coûts de production ?

Un atelier consacré aux solutions face à la hausse des charges agricoles était organisé par Adice*, le 29 mars, dans le Nord Ardèche. Autonomie protéique, optimisation des marges alimentaires, recours à la sous-traitance… Focus sur les pistes de Frédéric Baud, éleveur caprin à Saint-Sylvestre.

Quelles solutions pour maîtriser les coûts de production ?
Adrien Raballand, responsable activité conseil à Adice, et Frédéric Baud, éleveur caprin à Saint-Sylvestre. © AAA

Frédéric Baud est éleveur caprin à Saint-Sylvestre, entre Saint-Péray et Lamastre. En Gaec avec son frère jusqu’en 2021, il travaille désormais seul sur l’exploitation (Chèvrerie de la Chavat), à la tête d’un cheptel de 220 chèvres sur une surface de 50 hectares de fourrages et de prairies naturelles. Face à la flambée du prix des matières premières agricoles, qui impacte son exploitation depuis de longs mois, l’éleveur garde le moral. « Ce n’est pas une période amusante mais c’est aussi dans ces moments-là que nous pouvons changer nos pratiques professionnelles et trouver des solutions », estime-t-il.
Fin mars, Frédéric Baud a ouvert les portes de son exploitation lors d’un atelier organisé par Adice afin de partager son expérience et en débattre avec d’autres éleveurs. Pendant deux heures, il a été question d’autonomie protéique, de suivi des marges alimentaires ou de réduction du travail du sol. Objectif : moins dépendre des intrants, dont les prix devraient se maintenir à un niveau élevé.
« Il n’y a pas une solution unique pour faire face à cette conjoncture inquiétante, mais un ensemble de petites solutions, au cas par cas. Nous misons sur l’intelligence collective et le partage d’expérience entre agriculteurs pour s’en sortir », souligne Patrick Ribes, président d’Adice et éleveur à Éclassan (07).
« L’optimisation des coûts de production, l’analyse du sol ou la sous-traitance sont autant de petits leviers qui peuvent permettre aux éleveurs de traverser cette crise », ajoute Adrien Raballand, responsable activité conseil à Adice.

Gestion fine des marges alimentaires

Lors de l’atelier, Frédéric Baud s’est attardé sur l’évolution de son système fourrager vers davantage d’autonomie protéique. À l’automne dernier, il a remplacé 4 hectares habituellement dévolus aux céréales par de la luzerne et du ray-grass. Il a aussi semé pour la première fois du méteil sur près de 2 hectares. « L’idée était de faire un essai cette année avant de semer à grande échelle. À terme, j’aimerais associer le méteil avec le maïs et abandonner le ray-grass, qui a tendance à assécher mon sol. »
L’éleveur s’est aussi fixé des objectifs en nombre de bottes et unités fourragères (UF) à l’hectare mais aussi en quantité de lait produit par jour et par chèvre. Pour y arriver, il a mis en place un suivi précis et régulier de ses coûts de production – lait d’un côté et fourrage de l’autre – afin d’obtenir un seuil de rentabilité.
« Grâce au suivi des marges alimentaires, je peux avoir un œil sur les chiffres et voir si je ne suis pas dans le rouge. Ces calculs me permettent d’actionner des leviers là où il est possible de le faire, dans mon cas sur l’alimentation animale, et d’adapter en conséquence la taille de mon cheptel », détaille Frédéric Baud.

Déléguer pour plus d’efficacité

Dans ce même objectif d’optimisation de l’alimentation animale, l’éleveur souhaite « aller chercher » des PDIM (protéines digestibles dans l’intestin) sur ses 10 hectares de prairies, en semant en direct cet automne des méteils fourrages afin de récolter un fourrage plus riche en protéines au printemps 2023.
Il a également investi dans un bol mélangeur pour remplacer sa dérouleuse. « Cet outil me permet d’adapter mes rations et d’éviter le gaspillage en pesant mes fourrages. Il me sert aussi à homogénéiser la nourriture sur la journée ».
Pour faire face à la flambée des engrais azotés, Frédéric Baud utilise en partie les effluents d’élevage pour son amendement. Sur le prix du carburant, il raisonne ses déplacements, simplifie ses itinéraires pour éviter des allers-retours inutiles aux champs.
Enfin, l’éleveur a fait le choix de sous-traiter une partie de ses activités, le labour et les semis, pour se concentrer sur ses points forts : la nutrition et la génétique. « Je préfère passer du temps auprès de mes chèvres et les valoriser », commente celui qui vend deux lots de chevrettes par an et valorise tous ses mâles à l’engraissement. Il réalise toutefois lui-même la récolte de luzerne notamment. « Je reste très attentif sur les leviers sur lesquels je peux jouer pour développer le potentiel de mon exploitation. »

Marin du Couëdic
* Adice : Ardèche Drôme Isère conseil élevage.