TÉMOIGNAGE
La Jersiaise des Combes : résister face à la crise du lait bio

C’est sur l’exploitation du Gaec la Jersiaise des Combes qu’a eu lieu la signature du plan bio de la Région. Les deux associés, Audrey et Thierry Gillos, ont témoigné de leurs choix stratégiques pour résister à la crise de la filière laitière bio.

La Jersiaise des Combes : résister face à la crise du lait bio
Audrey et Thierry Gillos, ici avec Jean-Pierre Royannez, président de la chambre d'agriculture de la Drôme. ©S.S.-AD26

L’autonomie à tout prix, c’est en quelque sorte l’objectif que s’est fixé Thierry Gillos à la tête, avec son épouse Audrey, du Gaec la Jersiaise des Combes à Châteaudouble. Leur troupeau de 60 vaches laitières de race Jersiaise mais aussi sa descendance pour le renouvellement du troupeau, la vente directe de viande et de reproducteurs - soit au total 180 animaux à nourrir - doit trouver ses ressources sur les 160 ha dont dispose l’exploitation. La moitié est en prairies naturelles, le reste en prairies temporaires (une cinquantaine d’hectares) et maïs sur 15 ha irrigués. Une dizaine d’hectares de blé est également introduit dans la rotation pour un voisin paysan boulanger. « Nos vaches produisent ce qu’elles peuvent produire avec ce qu’elles trouvent sur l’exploitation. Notre objectif est de ne rien acheter à l’extérieur », a expliqué Thierry Gillos à l’occasion de la signature du plan bio de la Région Auvergne-Rhône-Alpes sur sa ferme le 12 octobre.

Ainsi en 2022, la productivité moyenne par vache a atteint les 5 000 litres. « Les Jersiaises produisent peu mais valorisent bien ce qu’on leur propose en alimentation. Elles ont un lait très riches en matière grasse », a souligné l’éleveur. 75 % des volumes sont collectés par la fromagerie L’Etoile du Vercors. Sur la dernière campagne, le Gaec a vu son lait, conforme au cahier des charges du bio et de l’IGP Saint-Marcellin, valorisé 590 € / 1000 litres. « Pourtant ce prix ne couvre pas nos coûts de production et ça me choque profondément que les grilles négociées ne prennent pas en compte ces coûts », a alerté Audrey Gillos. Pour dégager de la valeur ajoutée, elle transforme chaque semaine 25 % des volumes en lait cru pasteurisé, yaourts, crèmes dessert…, dont elle gère la commercialisation.

Monotraite depuis janvier

« Nous avons souhaité diversifier nos débouchés avec de la vente directe à la ferme (en libre service), le magasin de producteurs Court circuit à Chabeuil, deux Amap, des magasins bio, la restauration collective, en direct ou via la plateforme Agrilocal ou l’association Agri Court.» Depuis peu, le Gaec travaille aussi avec le Leclerc de Saint-Paul-lès-Romans, grâce à une mise en relation assurée par le Cluster Bio. La responsable du pôle “bio et producteurs locaux” du magasin, Marie-Line Blanc, présente pour la signature du plan Bio, a assuré que sa direction avait l’intention de développer l’espace « nouvelles consommations » avec la mise en avant des producteurs bio locaux d’ici le premier trimestre 2024. L’occasion pour Rémy Fabre, élu référent de la filière bio à la chambre d’agriculture régionale, de rappeler que « le développement de la bio peut aussi se faire avec des circuits type GMS ».

Enfin, Thierry et Audrey Gillos ont fait part de leur expérience de passage en monotraite depuis le 1er janvier dernier. Un choix lié au départ du troisième associé du Gaec. « Nous attendons la fin de la campagne pour tirer un bilan complet. Pour l’instant nous estimons la perte de production à 15 %. Mais nous avons gagné deux heures de travail chaque jour. »

Sophie Sabot

Fabrice Pannekoucke, vice-président de la Région, à l'écoute des explications d'Audrey Gillos, éleveuse. ©S.S.-AD26