Programme Récital : les premières observations

Depuis une vingtaine d'années, les cultures françaises de lavande et de lavandin font l'objet d'une forte augmentation du taux de mortalité. En cause, la maladie du dépérissement liée à la présence de cicadelles, mais aussi des conditions climatiques à la suite d'étés secs, intenses et répétitifs. Les projections climatiques pour la région méditerranéenne prédisent la hausse de la température moyenne annuelle et la baisse des précipitations moyennes annuelles, favorisant des sécheresses de plus en plus intenses. Face à cette situation, le programme Récital (réponses aux évolutions climatiques par l'innovation et les techniques alternatives dans les lavanderaies), débuté en 2017, tend à étudier l'impact des facteurs climatiques et des pratiques sur la plante. Il est financé avec l'aide du ministère de l'Agriculture via le Casdar IP, le programme Pep Auvergne-Rhône-Alpes et des professionnels de la filière par le biais du CIHEF(1). Le 28 mai, la station Iteipmai(2) Sud-Est à Montboucher-sur-Jabron et son responsable, Guillaume Frémondière, ont apporté aux lavandiculteurs des premiers éléments de réponse quant à l'intérêt des couverts végétaux en inter-rangs et la réponse au stress hydrique des cultures de lavanderaies. Plusieurs intervenants ont assisté à la présentation : Lia Lamacque (Inra-UMR Piaf Clermont), Thomas Costes et Sylvain Perrot (Crieppam(3)), Caroline Le Flamanc et Philippe Berenguer (Iteipmai), Kévin Debregeas (chambre d'agriculture de la Drôme), Pauline Garin (chambre d'agriculture de Vaucluse) et, enfin, Caroline Baconnier (chargée d'expérimentation sur l'exploitation du lycée horticole de Romans).
Deux essais en simultané
Deux essais sont réalisés en simultané : l'un sur le site de l'Iteipmai, le second sur celui du Crieppam. Première caractéristique importante, ceux-ci révèlent, pour la première année, des résultats totalement différents. La deuxième année, en cours de réalisation, permettra peut-être de comprendre ces différences significatives.
Comme premier axe de travail, il s'avérait ici nécessaire de prédire les conditions climatiques dans un futur proche (2021-2050). Différents scénarios sont imaginés, en fonction des saisons mais aussi des politiques instaurées, notamment en termes de gaz à effet de serre.
D'autre part, le développement de l'outil « PépiPiaf » permet de mesurer l'état physiologique de la plante. Doté d'une aiguille, il mesure la croissance de la plante dans une dynamique jour-nuit. Cela a notamment permis de voir qu'en journée, le plant grandit peu du fait de sa transpiration (stress hydrique), au contraire de la nuit où il reconstitue ses réserves. De ce fait, un essai a été réalisé au lycée horticole de Romans. On remarque alors une baisse significative de la croissance de la plante « stressée » lors de l'arrêt de l'irrigation, contrairement à une plante « témoin », arrosée toute la saison. D'autres mesures physiologiques sont utilisées pour pouvoir juger du comportement de la lavande par rapport à la sécheresse : expérimentation en serre, variation de la conductance automatique ou encore taux d'embolie.
Le couvert végétal, une première réponse
Dans un second temps, le programme Récital pose des questions agronomiques avec la mise en œuvre de couverts végétaux en inter-rangs, pour lutter contre l'érosion du sol et le stress hydrique mais aussi contre le dépérissement. Le but ici est de connaître l'impact du couvert sur la culture. Celui-ci semble déjà réduire de 50 % les symptômes de dépérissement sur une lavanderaie. Il n'est toutefois pas possible d'avancer des résultats du fait d'un mauvais développement des couverts sur la première année. En revanche, les intervenants ont rappelé l'objet de ces essais : ils ne sont pas là simplement pour mesurer l'impact des couverts mais pour trouver des réponses et faire en sorte que les lavanderaies durent le plus longtemps possible et qu'elles soient le plus profitables pour les producteurs.
Pour cela, deux groupes de travail régionaux ont été mis en place, un dans le Diois, le second dans le Sud-Drôme. Sur les différents champs étudiés, il en est ressorti une différence de rendement entre une parcelle enherbée et une parcelle non enherbée, une humidité supérieure et un dépérissement moindre en présence de couvert végétal. Les lavandiculteurs désirant participer à ce programme et (ou) apporter des idées complémentaires peuvent se faire connaître auprès de l'Iteipmai.
Amandine Priolet
(1) CIHEF : comité interprofessionnel des huiles essentielles françaises.
(2) Iteipmai : institut technique interprofessionnel des plantes à parfum, médicinales et aromatiques.
(3) Crieppam : centre régionalisé interprofessionnel d'expérimentation en plantes à parfum,+ aromatiques et médicinales.
Un broyeur à couverts végétaux à disposition
Sous une pluie battante, différents matériels ont été présentés : semoir pour couvert multi-rangs, bineuse, etc. Le plus imposant était le broyeur à couverts végétaux. Ce prototype de 15 000 euros, construit par une concession sur le plateau de Valensoles, a été financé par le Crieppam l’an dernier. Il permet aujourd’hui de favoriser le développement de l’inter-rang enherbé. Les professionnels de la filière peuvent le réserver à la Cuma d’Albion. Il est mis à disposition pour un montant de 10 euros par hectare.