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74e congrès de la FDSEA de la Drôme

Protéger et sécuriser les exploitations agricoles

Après une année 2019 marquée par des aléas climatiques dévastateurs, l'agribashing, la prédation ou encore des prix insuffisamment rémunérateurs, la FDSEA de la Drôme a placé son congrès sous thème de la protection des exploitations et la sécurisation des revenus.
Protéger et sécuriser les exploitations agricoles

Pour son 74e congrès, la FDSEA de la Drôme a choisi de réunir ses adhérents à Loriol. Ainsi que l'a souligné son maire, Claude Aurias, ancien arboriculteur, la commune compte encore 57 exploitants agricoles. Alors, en ces temps d'agribashing et de débat vif autour des zones de non-traitement (ZNT) phytosanitaire, l'ancien président de la chambre d'agriculture a notamment souligné la nécessité de pouvoir dialoguer avec les riverains. Un thème largement repris tout au long du congrès, notamment par Grégory Chardon, président de la FDSEA. « L'agribashing crée un climat d'insécurité. Nos paysans vivent dans la peur, c'est intolérable », a-t-il martelé. Il espère que le dispositif Vigi Agri 26 (lire notre édition du 27 février), déjà déployé sur près de 500 exploitations, permette de faire reculer les intrusions et autres agressions dont sont victimes les agriculteurs. Ce dénigrement « pèse sur le moral », a confié Michel Joux, président de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes. « Notre agriculture doit être reconnue et acceptée, a clamé Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA. Il faut que cessent ces intrusions dans les élevages, ces actes de terrorisme. Ce n'est plus supportable. » Le volontarisme du ministre de l'Agriculture dans la sécurisation des exploitations agricoles, avec la mise en place de la cellule d'enquête Demeter, est apprécié. « Mais il faut des condamnations beaucoup plus sévères à l'égard des activistes, a exhorté Jérôme Despey. Et l'État doit arrêter de soutenir les associations et ONG(1) à l'origine de ces actes. » La FNSEA demande, entre autres, qu'elles ne puissent plus bénéficier d'avantages fiscaux sur les dons.

Faire face aux aléas climatiques

A la tribune du 74e congrès de la FDSEA, à Loriol : Serge Guier (secrétaire général), Sandrine Roussin (vice-présidente), Grégory Chardon (président) ainsi que Jérôme Despey (secrétaire général de la FNSEA), Michel Joux (président de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes), Jean-Pierre Royannez (président de la chambre d'agriculture de la Drôme) et Jordan Magnet (vice-président de JA 26).
© journal L'Agriculture Drômoise

La protection des exploitations agricoles, c'est aussi pouvoir faire face aux aléas climatiques. Ce sujet est devenu central après les phénomènes exceptionnels (grêle, canicule, neige) de l'an dernier « La gestion de tous ces aléas demande un investissement permanent de la FDSEA, a fait remarquer son président. Nous avons obtenu des aides pour les exploitations durement sinistrées » comme l'exonération de TFNB(2), les soutiens de la Région et du Département, les dons à travers l'association Solidarité agricole Drôme... Il n'a cependant pas caché sa déception quant aux mesures exceptionnelles promises par le ministre de l'Agriculture et jamais arrivées. « Tout ce que nous avons obtenu est le fruit de notre travail, a souligné le président de la FDSEA. Mais il reste encore beaucoup à faire. » A noter, le dossier de demande d'indemnisation des pertes de fonds liées à la neige sera examiné par le CNGRA(3) dans les prochains jours.
Constat est fait que « le dispositif assurantiel n'est plus adapté, a ajouté Grégory Chardon. « Il faut l'améliorer pour pouvoir couvrir toutes les productions, a complété Jérôme Despey. Pour cela, l'État doit jouer le rôle de réassureur. Et il faut bâtir le système différemment, en revoyant les moyennes olympiques et en le généralisant pour en diminuer les coûts. » Un point de vue qui sera débattu fin mars au congrès de la FNSEA.

« Redonner du prix aux producteurs »

Protéger les exploitations agricoles passe aussi par des prix rémunérateurs. « La profession attend toujours le retour de la valeur dans les fermes », a déploré Grégory Chardon. « Les Etats généraux de l'alimentation et la loi Egalim qui a suivi n'ont pas encore donné les résultats escomptés, excepté un peu pour le secteur laitier, a convenu Jérôme Despey. On s'est battu pour la sécurisation des revenus agricoles et on ne lâchera rien. Des acteurs de la grande distribution ne jouent pas le jeu lors des négociations commerciales. Ils doivent être sanctionnés durement afin de redonner du prix aux producteurs. » Il a aussi dénoncé les nouvelles contraintes qui pèsent sur la compétitivité. « On ne peut pas en même temps dire qu'il faut redonner du revenu aux agriculteurs et, dans le second volet de la loi Egalim, charger la barque de règlementations et taxes nouvelles. » Au sujet des zones de non-traitement (ZNT), « il faut des compensations économiques », a-t-il ajouté. Et à propos de la politique agricole commune, « nous demandons une Pac forte avec un budget qui ne soit pas amputé. La Pac n'a pas à payer pour d'autres politiques, migratoires ou de défense. » Michel Joux a, lui, demandé « une parole politique qui tienne la route, qui défende la modèle agricole familial, lequel a fait ses preuves ».

Christophe Ledoux

(1) ONG : organisation non gouvernementale.
(2) TFNB : taxe sur le foncier non bâti.
(3) CNGRA : comité national de gestion des risques en agriculture.

 

Table ronde / « Sécuriser les revenus pour maintenir une agriculture diversifiée et performante » était le thème de la table ronde du congrès de la FDSEA.

Maintenir une agriculture diversifiée et performante

A la table ronde sur la sécurisation des revenus, de gaude à droite : Didier-Claude Blanc (conseiller régional), Jean-Pierre Royannez (président de la chambre d'agriculture de la Drôme), Jérôme Despey (secrétaire général de la FNSEA) et Jordan Magnet (vice-président de JA 26).
© journal L'Agriculture Drômoise
Vaste question que celle de la sécurisation des revenus. Pour y répondre, la FDSEA a convié Jean-Pierre Royannez, président de la chambre d'agriculture de la Drôme, Jordan Magnet, vice-président de JA 26, Didier-Claude Blanc, conseiller régional, et Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA. Ont été mis en avant la diversification des productions, « mais sans s'égarer », a souligné Jean-Pierre Royannez. « Il faut savoir adapter sa production au marché et pour cela être bien formé », a complété Jordan Magnet. « Diversifier est un moyen de sécuriser les revenus, a convenu Didier-Claude Blanc. A condition de partir de la demande du terrain. » Il a parlé du tilleul drômois, du petit épeautre de Haute-Provence, des circuits courts. « Aucune filière agricole n'a à rougir des efforts entrepris sur le plan qualitatif et cette qualité doit être valorisée », a dit Jérôme Despey. Pour y parvenir, ont été évoqués la contractualisation, la diversité des circuits de commercialisation.
« Sortir des tabous »
L'accompagnement a été mis en avant. Pour Jean-Pierre Royannez, « il faut veiller à bien maîtriser les charges, éviter le sur-équipement en matériels, ne jamais acheter de terres à un prix excessif et bien réfléchir son projet en amont car les erreurs du début coûtent cher pendant longtemps ». Pouvoir se comparer sur le plan économique et technique afin d'optimiser ses coûts, son temps de travail, c'est ce qu'a préconisé Jordan Magnet. Pour limiter les investissements matériels, le secrétaire général de la FNSEA a cité les cuma et les entrepreneurs de territoire. Il a aussi appelé l'État à faire plus en matière d'innovations et de recherche afin d'accompagner l'agriculture dans son développement.
Lors de cette table ronde, la protection des cultures a largement été abordée. « C'est une nécessité, a dit Jean-Pierre Royannez. Et il faut aussi adapter son système assurantiel à son exploitation. » A propos de l'eau, « il faut sortir des tabous, avoir dans chaque département un schéma d'irrigation et créer des retenues collinaires de taille moyenne », a appuyé Jérôme Despey. « Face au dérèglement climatique, il est important d'accompagner les exploitations, a ajouté Didier-Claude Blanc, avant d'évoquer le fort soutien agricole de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, notamment à travers les plans de filière.
« Des solutions, pas des punitions »
« Rester vigilant aux évolutions réglementaires et si besoin se faire accompagner » est un conseil donné par Jean-Pierre Royannez. « Tout comme adhérer à un bon syndicat pour être défendu et représenté. » Jordan Magnet a, lui, exprimé la nécessité de « rester maître de son prix et des outils (coopératives, banques...) créés par les agriculteurs ».
Face à l'agribashing, maintenir une agriculture performante suppose « d'ouvrir les exploitations pour dialoguer car le métier d'agriculteur n'a aucune raison de faire peur », a assuré Jean-Pierre Royannez. Et pour Jérôme Despey, « mieux vaut parler des solutions apportées par le monde agricole que de sans cesse légiférer pour le punir » (lire ci-dessous et ci-contre).
Pour finir, la diversité, la vitalité et l'adaptation de l'agriculture drômoise ont été mises en avant. « Avec 120 installations par an, nous continuons à attirer des vocations et faisons le plein emploi », s'est réjouit le président de la chambre d'agriculture. Pour Didier-Claude Blanc, il y a là matière à « cultiver l'optimisme ».
C. Ledoux

 

Discours / Après une année 2019 chargée sur le plan syndical, nombre de revendications restent encore à faire aboutir.

Des revendications à faire aboutir

Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA.
© journal L'Agriculture Drômoise Grégory Chardon, président de la FDSEA de la Drôme.
© journal L'Agriculture Drômoise
A la présentation du rapport d'activité, on mesure bien l'intensité du travail accompli en 2019 par la FDSEA de la Drôme et ses partenaires. Marquée par une actualité sombre (aléas climatiques dévastateurs, incendies criminels, dégâts de loups...), l'année écoulée aura tout de même été celle de la victoire de la liste FDSEA-JA aux élections chambre d'agriculture. Et, en ce début 2020, par celle des élections MSA. Mais, pour les retraités, le combat d'une pension à hauteur de 85 % du Smic reste à gagner. « Nous sommes les oubliés de l'État, a déploré Marie-Chantal Charignon, présidente de la section des anciens exploitants de la FDSEA. Que devons-nous faire pour être enfin entendu ? »
Loup : obtenir le zéro attaque
Depuis le 1er janvier, le loup a déjà frappé plus de quarante fois en Drôme. Dans leurs interventions, Grégory Chardon, président de la FDSEA, Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA, et Michel Joux, président de la FRSEA Aura, ont une nouvelle fois martelé l'incompatibilité entre loup et pastoralisme. « On a obtenu des mesures mais ce qu'il faut, c'est le zéro attaque. Il faut pouvoir prélever au-delà des plafonds, avoir l'autorisation d'utiliser des lunettes à visée thermique, sortir enfin le loup de la convention de Berne. » Grégory Chardon a appelé les éleveurs à déclarer « impérativement » toutes les attaques.
Valoriser l'origine France
Tout au long de 2019, le réseau syndical s'est mobilisé pour dénoncer, d'une part, les accords commerciaux internationaux (Mercosur, Ceta), d'autre part, les nouvelles contraintes imposées aux agriculteurs. « La France est le premier pays agricole sous signes de qualité. Ce n'est pas normal de demander aux agriculteurs français de monter en gamme et, en même temps, d'importer ce qui n'est pas aux normes de l'Union européenne. On en a assez des réglementations et surtranspositions environnementales, ce sont des boulets pour notre agriculture », a lâché Jérôme Despey. FDSEA et FNSEA demandent que l'origine France soit mieux valorisée, tout comme les efforts et services accomplis par les agriculteurs en faveur de l'environnement. Michel Joux a proposé la création d'un fonds de communication pour défendre la cause agricole.
EGA : «  au milieu du gué »
A propos de la loi Egalim, « on est au milieu du gué, a constaté le président de la FRSEA. Il faut aller beaucoup plus loin pour obtenir des relations commerciales réellement équilibrées et avoir du ruissellement jusque dans les cours de ferme. » Jérôme Despey a appelé à plus de sévérité à l'égard des distributeurs qui ne respectent pas la loi (lire page précédente).
D'autres dossiers ont été évoqués comme le maintien, au-delà de 2020, de l'exonération de charges sur les travailleurs occasionnels (TODE). Grégory Chardon a assuré que la FDSEA est pleinement mobilisée sur ce sujet. Il a aussi rappelé l'opposition de sa fédération à toute réduction de prélèvement d'eau dans la nappe du miocène, tel que cela est prévu dans le Sage* Bas Dauphiné plaine de Valence. Sur les retraites agricoles, lui et Jérôme Despey ont appelé le gouvernement à améliorer les pensions des actuels retraités et à aboutir à une retraite minimale de mille euros pour une carrière complète dès 2022. Par ailleurs, un fonds de compensation est demandé pour les viticulteurs subissant de plein fouet les effets de la surtaxation des vins français exportés aux Etats-Unis.
A la fin de son intervention, Grégory Chardon a succinctement présenté le projet stratégique de la FDSEA, qui comprend trois thèmes : gouvernance et stratégie, visibilité et attractivité syndicale, dynamisation du réseau. D'ici fin mars, le nouveau conseil d'administration de la FDSEA se réunira afin d'élire son bureau.
C. Ledoux

* Sage : schéma d'aménagement et de gestion de l'eau.

 

Ils ont dit /

« L'agribashing doit cesser et vous pouvez compter sur le Département », a déclaré Jacques Ladegaillerie, vice-président du conseil départemental de la Drôme.
© journal L'Agriculture Drômoise
« L'agribashing doit cesser et vous pouvez compter sur le Département », a déclaré Jacques Ladegaillerie, vice-président du conseil départemental de la Drôme. « 2020 sera l'année de vérité de la loi Egalim ». « Les signes de qualité sont un moyen de lutter contre la concurrence. » A propos des aléas climatiques, « 2019 ne nous aura rien épargné et le Département a mobilisé une aide d'urgence ». Sur la prédation, « l'enjeu n'est pas la préservation du loup mais celle du pastoralisme. »
« La Région Auvergne-Rhône-Alpes a fait évoluer son budget pour l'agriculture de 36 à 106 millions d'euros en 2020 », a indiqué Didier-Claude Blanc, conseiller régional.
© journal L'Agriculture Drômoise « La Région Auvergne-Rhône-Alpes a fait évoluer son budget pour l'agriculture de 36 à 106 millions d'euros en 2020 », a indiqué Didier-Claude Blanc, conseiller régional. A propos des agriculteurs, « vous représentez un des derniers remparts contre la désertification. » Sur le loup, « il n'y a aucune volonté du gouvernement à faire diminuer la prédation lupine. Nous allons mener une procédure juridique. » Didier-Claude Blanc a sévèrement jugé l'action du ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation. « Quand Didier Guillaume a été nommé ministre, j'étais optimiste et satisfait. Mais j'ai assez vite déchanté et été stupéfait de l'entendre tenir des propos contradictoires à propos de l'agribashing, de la réduction des phytosanitaires, de la signature du Ceta. »