Qualité de l’air : encore des efforts à faire

Dans toute la région Auvergne-Rhône-Alpes, l'air respiré est bien meilleur après l'épisode de confinement et le demeure. Les concentrations de dioxyde d'azote (NO2) ont fortement chuté à la faveur de la raréfaction des transports routiers. Elles restent à un degré très bas même après le déconfinement. En revanche, pour les autres polluants, particules fines (PM) et ozone (O3), il n'y a pas de baisse significative. Didier Chapuis, directeur territorial d'Air atmo, l'observatoire régional de la qualité de l'air, indique que ces pollutions ont perduré car les sources d'émission étaient toujours actives, tel le chauffage pour les PM, renforcées par des pratiques - non autorisées - comme le brûlage des déchets végétaux durant la fermeture des déchetteries. Ce phénomène atypique de l'impact de la Covid-19 sur la qualité de l'air reste un objet d'analyse pour ces experts.
Concentration d'ozone à l'Est
Lorsqu'ils se penchent sur les douze dernières années, les spécialistes observent des tendances très marquées en région. Les efforts pour la réduction des particules fines PM2,5 (- 63 %) et PM10 (- 46 %) sont significatifs et ne dépassent pas les valeurs règlementaires. En revanche, il existe encore des territoires exposés au dioxyde d'azote (NO2), en dépit de la réduction des émissions de 31 % depuis douze ans. Les agglomérations de Lyon, Grenoble, Clermont-Ferrand et Valence sont les plus concernées, notamment leurs populations proches des grands axes de circulation où Air Atmo constate des dépassements de la valeur limite annuelle de 40 ug/m3, soit 0,26 % de la population régionale.
« Plus de quatre millions d'habitants d'Auvergne-Rhône-Alpes connaissent une qualité de l'air dégradée en raison des concentrations d'ozone », poursuit Didier Chapuis. C'est tout l'Est de la région, la façade rhônalpine, qui est concernée en raison de son exposition aux masses d'air de l'axe nord-sud et de son ensoleillement. Enfin, l'exposition aux particules fines PM2,5 dépasse la valeur de l'OMS annuelle de 10 ug/m3 dans l'Ain, le Rhône et la Loire principalement.
Les agglomérations et la vallée du Rhône
Dans le bilan 2019 sur les départements de l'Ardèche, la Drôme et l'Isère, l'expert présente combien les populations à proximité des axes de circulation, l'A7 principalement mais aussi l'A51 et les rocades de Grenoble et Valence, sont exposées à la pollution au dioxyde d'azote. « La situation est moins contrastée concernant l'ozone tant la plus grande partie du département de l'Isère, soit 1,2 million d'habitants est exposée ». Les données retenues sont plus de 25 jours (à raison de 8 heures par jour) où les valeurs sont supérieures à 120 ug/ m3. Les données sont quasi identiques dans la Drôme. Enfin, le Nord-Isère, l'agglomération grenobloise, celles de Valence et de Montélimar, la Vallée du Rhône et le Sud-Ardèche connaissent des expositions annuelles supérieures à 10 ug/m3 aux particules fines. Le chauffage est essentiellement responsable de ces suspensions dans l'atmosphère. Didier Chapuis souligne l'amélioration des concentrations à Grenoble depuis trois ans, fruit de l'action locale des collectivités comme la Métro, le Grésivaudan et le Pays voironnais.
Pour le spécialiste, les efforts sont à poursuivre. Il indique les différents plans d'action mis en œuvre dans les départements : plan de protection de l'atmosphère, plan de déplacements urbains, plans air climat énergie, zone à faible émission, prime air bois... en Isère et plan protection de l'atmosphère, plan de déplacement urbain et plans climat air énergie dans la Drôme.
Les particules ultrafines
Air Atmo souhaite aller plus loin dans sa connaissance des particules et des polluants émergents. L'observatoire s'intéresse aux PUF, les particules ultrafines qu'il compte déceler dans les épandages de produits phytosanitaires. Les rejets sont étudiés depuis quinze ans. Les PUF émises par les installations de méthanisation font aussi partie du champ d'observation. « En théorie, il s'agit de rejets de gaz purifié », admet Didier Chapuis. Air atmo porte néanmoins « un regard attentif » aux possibles rejets émanant des zones de stockage et de l'épandage. « Il s'agit de vérifier que les actions mises en place sont réellement vertueuses », poursuit le spécialiste. Les molécules HAP ou hydrocarbures aromatiques polycycliques et l'ammoniac font aussi l'objet de programmes de suivi.
Isabelle Doucet