Quand le numérique veut révolutionner la commercialisation

Promouvoir ses productions et son savoir-faire n'est pas forcément chose aisée. De nombreux canaux sont en effet proposés pour ce faire : prospectus, relations presse, etc. Ces derniers mois, de nouveaux services ont également fait leur apparition sur internet. Le numérique s'apparente comme un nouveau vecteur de lien entre le producteur et le consommateur. Tour d'horizon sur ces acteurs.
Okadran, la vente de viande en ligne et en direct
Lancé le 24 juin dernier, le site internet Okadran.fr est une plateforme de vente directe de viande française. « Il s'agit de la première marketplace française spécialisée en viande à la découpe. Elle fonctionne sur un principe simple qui est de mettre en relation – grâce au web – des centaines de producteurs bovins, porcins, ovins, etc. avec des milliers de consommateurs disséminés au niveau national », précise Alexandre Mechri, cofondateur du site. Concrètement, le client choisit ses produits grâce à plusieurs critères, tels les races ou encore les régions. Après un paiement en ligne, il recevra sa commande sous 48 heures. Auparavant, c'est l'éleveur qui indique sur le site internet quels sont ses produits disponibles. C'est aussi lui qui fixe le prix. Dès qu'une commande est passée, il est en charge de l'expédition. Ce qui lui permet de garder le contrôle sur le produit ainsi que sur l'emballage. Le colis peut être pris en charge par le service de transport Chronofresh. Dès que l'expédition est réalisée, Okadran verse le montant dû à l'éleveur. Une commission est toutefois appliquée (de 10 à 16 % selon le chiffre d'affaires). Un montant qui permet de financer la plateforme, la sécurisation des paiements, le marketing, etc. Okadran revendique d'ores et déjà la présence de plus de 100 éleveurs. L'équipe se déplace actuellement dans tout le territoire pour présenter la plateforme et échanger avec les éleveurs. Elle était d'ailleurs présente au Sommet de l'élevage.
Sébastien Bera est éleveur à Montcel (Puy-de-Dôme). Il fait partie des premiers éleveurs à s'être inscrits. Son troupeau compte 110 vaches charolaises.
Sur Okadran, il propose 4 types de colis. Le site internet n'en est qu'à ses prémices. Par ailleurs, l'éleveur a indiqué ne pas avoir de stock jusqu'en août. Il n'a donc pas de commande en cours. Toutefois, il semble satisfait de ce nouveau canal de commercialisation. « Je développe la vente sans intermédiaire. Je fais déjà de la vente directe à la ferme, suis aussi présent sur d'autres plateformes. Je veux être à 100 % en vente directe. Cela permet de s'y retrouver économiquement et moralement. J'aime cette communication avec les clients », souligne-t-il. L'éleveur a opté pour le service de livraison proposé par Okadran. « Nous avons le même prestataire, Chronofresh. Cependant, leurs tarifs sont plus intéressants », poursuit-il.
Aurélien Tournier
Autre exemple
Le site Internet www.Kookooning.com, lancé début 2016. Développé par la société drômoise Kapt, ce portail répertorie les sites touristiques qui proposent « bien plus qu’un lit ». Comprenez une solution d’hébergement mais aussi des loisirs. Il ne s’adresse donc pas qu’aux vignerons mais à l’ensemble des exploitations possédant des solutions d’hébergement. Ce service est gratuit. Mais des fonctionnalités supplémentaires sont payantes. Il est par exemple possible de créer son site web, à partir des informations fournies. Des campagnes publicitaires sur Google, avec un lien vers votre exploitation, peuvent également être proposées. Inès de Rancourt et Daniel Gilles sont producteurs fromagers de picodon AOP et autres fromages de chèvre en agriculture biologique à Saoû (Drôme). La Chèvre qui Saoûrit propose également une chambre d’hôtes. « C’est quelqu’un qui m’en a parlé, c’est un site qui a par ailleurs été réalisé par une société drômoise. Je trouvais intéressant que l’on y apparaisse », explique ainsi Inès de Rancourt.
Circuits courts numérique / Pour Marc-David Choukroun, PDG de « La ruche qui dit oui », les circuits courts doivent travailler sur la logistique pour diminuer leur coût.
« La logistique est le gros point noir »
«La logistique, c’est le gros point noir en circuits courts. Les circuits courts demandent aux agriculteurs de gérer beaucoup de métiers, comme la vente et la logistique », a expliqué à Agra'Up Marc-David Choukroun, PDG de « La ruche qui dit oui ». Son réseau, qui est un service en ligne de mise en relation entre agriculteurs et consommateurs, rassemble aujourd’hui 5 000 producteurs, 150 000 clients dans six pays d’Europe et traite entre 40 et 50 millions d’euros de volume. En France, ses concurrents sont Locavor et Bienvenue à la ferme.
« Pour le transport, nous développons des briques logiciel qui permettent la gestion de la mutualisation de logistique dans notre réseau d’agriculteurs, poursuit Marc-David Choukroun. Il y a encore beaucoup de choses à faire pour diminuer le coût de la chaine de valeur, notamment en améliorant la logistique, poursuit-il. De nouveaux modèles de Ruches sont en expérimentation : des drives, des points relais, des associations avec une épicerie sèche. Nous ne sommes pas encore aussi pratique que la grande distribution, mais d’année en année, ça va évoluer. »
Numérique : 65 % des agriculteurs prêts à continuer d'investir
65 % des agriculteurs ont l’intention de s’équiper de nouveaux équipements ou outils numériques dans les prochaines années, selon un sondage Ipsos-Agriavis. Près de trois sur quatre seront bientôt dotés de système de gestion, de guidage par GPS et utiliseront les sites d’achat de matériel et produits agricoles, montre l'étude. Les drones seront trois fois plus utilisés (9 % aujourd’hui) et les différents capteurs près de deux fois plus (10 % ou moins actuellement).
Deux tiers des agriculteurs interrogés pensent que la numérisation de l’agriculture permet une amélioration des conditions de travail. Près de la moitié qu’elle permet aussi de mieux respecter l’environnement ou un regain d’attractivité du métier. Seul un quart des sondés pensent qu’elle conduit à de meilleurs revenus.
Le sondage montre que les agriculteurs sont déjà largement connectés, avec 4,1 équipements ou outils numériques utilisés en moyenne. Chiffre qui passera à 5,6 dans les prochaines années. 7 agriculteurs sur 10 sont déjà utilisateurs de sites d’achat, 6 sur 10 de systèmes de gestion, de guidage par GPS, 2 sur 5 d’outils d’aide à la décision.