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Fertilisation

Raisonner la fertilisation azotée sur vignes et vergers

Le logiciel d'aide à la décision pour le raisonnement de la fertilisation azotée, Azofert®, initialement conçu pour les grandes cultures, devrait être développé pour les cultures pérennes. Un prototype a été testé dans le cadre du projet N'Pérennes.
Raisonner la fertilisation azotée sur vignes et vergers

Les enjeux conjugués de production de qualité et de protection de l'environnement ainsi que l'évolution des pratiques agricoles ont conduit l'Inra et le Laboratoire départemental d'analyses et de recherche (LDAR) de Laon (Aisne) de à proposer, il y a quelques années, un outil d'aide à la décision pour le raisonnement de la fertilisation azotée à l'échelle de la parcelle, baptisé Azofert®. Entre 2013 et 2016, la réflexion a été élargie pour l'adapter aux cultures pérennes, en l'occurrence la vigne et les arbres fruitiers (pommier et le poirier)1. Même si les besoins en azote de ces végétaux sont moindres qu'en grandes cultures, leur gestion n'en demeure pas moins délicate, contrainte à la fois par l'objectif de production et de développement de la plante. A noter, il n'existe actuellement aucun outil de prévision de la fertilisation azotée pour les cultures pérennes, d'où l'utilité de ce projet innovant qui permet aujourd'hui de disposer d'un prototype.

S'adapter aux spécificités des cultures pérennes

Concrètement, les fonctionnalités d'Azofert® sont basées sur un bilan d'azote minéral complet. Celui-ci est réalisé à partir de l'ensemble des entrées et sorties d'azote. Soit 19 postes dont les reliquats à l'ouverture et fermeture du bilan, la minéralisation des différentes sources organiques (humus, résidus de culture, apports organiques, cultures intermédiaires), les pertes par lixivation et voie gazeuse. L'intégration des données climatiques permet d'exploiter le concept de « temps normalisé » et de prendre en compte les variations de température et d'humidité. Ce bilan détermine ainsi une dose d'engrais à apporter à la culture.
L'adaptation aux cultures pérennes doit considérer leurs spécificités : besoin en azote de la vigne et des arbres fruitiers, fournitures d'azote du sol (en fonction de la zone colonisée par les racines), accumulation de réserves dans les différents compartiments de la plante et leur remobilisation. Vigne et arbres fruitiers ont besoin d'azote pour produire des fruits, des feuilles, le bois de l'année et accroître leurs structures et racines. Or, selon des expérimentations menées par l'Inra sur le pommier2, le raisonnement statique des besoins ne permet ni d'intégrer les nouveaux modes de conduite des vergers, ni d'ajuster les apports à une demande dynamique (dans le cas de la ferti-irrigation par exemple), ni de développer des systèmes économes en intrants.

Pour les cultures pérennes, Azofert® est encore à l'état de prototype mais devrait permettre d’avoir un outil de raisonnement généralisable à différents contextes agropédoclimatiques.

Une approche dynamique de la fourniture en azote

Azofert® a vocation à remplacer les bilans prévisionnels statiques qui, jusqu'ici, « constituaient la base du modèle utilisé à grande échelle en France par les laboratoires d'analyse des sols et les conseillers agricoles ». Il s'appuie, lui, sur « la quantification des flux d'azote dans le sol et sur l'estimation de la disponibilité de l'azote sur un plan dynamique », précisait Caroline Leroux, du LDAR de l'Aisne, lors d'une conférence programmée au salon Tech&Bio en septembre dernier. C'est tout son intérêt. Il s'agit aussi, à terme, d'élaborer « un socle commun pour le raisonnement de la fertilisation des cultures sur le territoire national [...], de servir de modèle pour d'autres cultures pérennes », indiquait encore la présentation.
Cette approche dynamique permettrait en outre d'intégrer progressivement les connaissances sur les systèmes culturaux associant l'enherbement, afin de faire évoluer cette pratique et donc de limiter le recours aux herbicides, sans sacrifier le rendement ni la qualité. Du point de vue environnemental et en lien avec la directive nitrates, l'outil devrait contribuer à limiter les rejets par une gestion plus fine de la fertilisation azotée, en vigne comme en arboriculture. 
T. R.
1 Dans le cadre du projet Casdar (financement ministère de l'Agriculture), N-Pérennes est porté par l'Institut français de la vigne et du vin en partenariat avec l'Inra et le réseau mixte technologique Fertilisation & Environnement.
2 L'expérimentation « Dynamique d'accumulation de la matière sèche et de l'azote en verger de pommiers » est réalisée dans le cadre du projet Casdar N-Pérennes par l'Inra, le CTIFL et la station arboricole La Pugère. Elle vise à évaluer la mise en place de conduites de fertilisation raisonnées au regard des besoins de l'arbre, à établir des références ainsi qu'à valider de nouveaux outils comme Azofert®.