Sauge sclarée : pour une filière durable

Depuis plus de dix ans la société Bontoux SAS et ses partenaires travaillent à l'amélioration de la productivité en sclaréol des cultures de sauge sclarée française. Ce travail s'est concrétisé en 2013 par le projet interdisciplinaire « Claryssime » piloté par l'entreprise. Il a permis d'optimiser l'extraction du sclaréol du végétal et d'améliorer la rémunération du producteur. Dans la continuité, deux journées techniques d'échanges collaboratifs avec les producteurs de sauge de haute Provence étaient organisées les 15 et -16 novembre sur le site du « Clos d'Aguzon » à Saint-Auban-sur-l'Ouvèze.
En Drôme, Vaucluse, Hautes-Alpes et Alpes-de-Haute Provence, quelque 200 producteurs s'adonnent à la culture de la sauge sur environ 2 000 hectares (des chiffres qui ont doublé en dix ans). Une soixantaine d'entre eux ont participé à ces journées avec des présentations techniques le matin, sur le thème des marchés et de la qualité de l'huile essentielle, puis la visite des installations et des débats techniques l'après midi.
« Car si les efforts de tous ont permis en quelques années de doubler les revenus par hectare sur la partie sclaréol », a expliqué Claire Delbecque, responsable du département « recherche et développement », « le marché de l'huile essentielle, quant à lui, est devenu beaucoup plus spéculatif, provoquant des hausses de prix incontrôlées. Aujourd'hui, alors que le marché reprend un niveau plus raisonnable, nous devons anticiper la concurrence internationale que les prix très hauts sur l'huile essentielle n'auront pas manqué de réactiver et qui s'appuiera sur des leviers très différents des nôtres. Dans un contexte de marché difficile, nos arguments concurrentiels ne pourront pas être le prix. Nous devons donc nous focaliser sur la qualité, bien sûr, mais aussi l'adaptation du produit au besoin du marché. »
Au cours de ces rencontres, le premier objectif a été de partager la vision des clients, de comprendre leur angle d'attaque, leur appréciation des produits afin de se préparer à affronter une concurrence en travaillant de manière collaborative sur les aspects de filière durable et soutenable. Les nombreux échanges avec les producteurs ont permis de donner des conseils sur la conduite des récoltes, les variétés sélectionnées, l'élaboration du produit dans les distilleries locales...
Bontoux SAS aujourd'hui
La société Bontoux SAS produit et commercialise des matières premières aromatiques naturelles pour la parfumerie et les arômes alimentaires. Dotée d'un savoir-faire reconnu sur lequel s'appuie une capacité de production performante et polyvalente (distillation, extraction, purification, fractionnement, distillation moléculaire...), Bontoux SAS offre des huiles essentielles, concrètes, absolues, résinoïdes et oléorésines issus de matières premières végétales du monde entier.
De plus, ses filiales de production localisées à la source des matières premières végétales (Espagne pour les produits méditerranéens, Madagascar pour les épices), ainsi que ses filiales et partenaires de commercialisation (Etats-Unis, Hong Kong, Chine, Australie, Inde) confèrent à l'entreprise une envergure internationale.
Employant 150 personnes dans le monde et 80 sur le site de Saint Auban, Bontoux est numéro un pour la production de sclaréol en France. 7 500 tonnes de paille de sauge sont passées à l'atelier d'extraction en 2016 (contre 5 000 en 2015), avec un rendement de 2 à 4 %. L'activité sauge (huile essentielle et sclaréol) représente aujourd'hui 10 % du chiffre d'affaires de l'entreprise.
Alain Bosmans
Expérimentation / La filière des plantes à parfums, aromatiques et médicinales (Ppam) s'appuie sur un marché très dynamique, qui assure sa croissance. Les secteurs tels que l'aromathérapie, les compléments alimentaires, la naturalité ou encore les prémix pour l'alimentation animale sont porteurs d'un fort potentiel.
Le Pep « arômes et parfums » présente ses résultats
La Région Auvergne-Rhône-Alpes se situe dans le trio de tête des régions productrices de Ppam en France avec plus de 7 000 hectares (ha) cultivés. Et la Drôme est leader régional. L'écosystème de la filière y est particulièrement favorable. En effet, plusieurs facteurs se combinent : conditions pédoclimatiques, présence de l'irrigation, savoir-faire des producteurs, présence de nombreuses entreprises de la « chimie verte », expertise technique de haut niveau à la chambre d'agriculture de la Drôme...Cependant ce secteur de production est mondialisé et la concurrence est forte entre les zones de production réparties dans le monde. Il y a donc un enjeu pour notre département à maintenir, voire développer, la compétitivité pour profiter de la croissance du marché. Car ces cultures sont une réelle opportunité pour les producteurs. Souvent raisonnées comme une diversification, elles peuvent s'avérer très intéressantes sur le plan économique.

Des compétences unies
Pour autant, cultiver des Ppam et être compétitif n'est pas toujours aisé. Il s'agit de productions techniques avec une maîtrise de l'enherbement et des ravageurs souvent problématique. C'est pourquoi les organismes de développement de la filière, peu nombreux, sont regroupés dans un réseau national pour unir leurs compétences. L'institut de la filière (Iteipmai1), l'organisme de développement (Crieppam2), le conservatoire (CNPmai3) ainsi que la chambre d'agriculture de la Drôme travaillent ensemble pour lever les freins liés à la production et rendre plus attractives et compétitives ces cultures.
L'un des volets de ce travail, l'expérimentation, est organisé dans notre région via le pôle d'expérimentation et de progrès (Pep) « arômes et parfums ». Il s'agit d'un programme proposé et financé par la Région Auvergne-Rhône-Alpes. D'autres partenaires, comme FranceAgriMer ou le comité interprofessionnel des huiles essentielles françaises (CIHEF) participent au financement. Ainsi le Crieppam, l'Iteipmai, le lycée Terre d'horizon de Romans et la chambre d'agriculture de la Drôme, qui est aussi l'animatrice de ce programme, conduisent des essais pour répondre aux questionnements concrets des producteurs et des entreprises. Les thèmes étudiés sont vastes : mise au point de bineuses à lecture optique, sélection variétale, solutions innovantes de lutte contre le dépérissement de la lavande ou contre les ravageurs, sélection et mise en verger de tilleul des Baronnies…
A Crest, visite d'Elixens
Le 22 novembre, une trentaine de producteurs et de représentants de coopératives et d'entreprises ont assisté à la restitution des programmes d'essais 2016. Cette année, avec l'élargissement de la région, on notait la présence de deux coopératives auvergnates (Plantes de pays et Sica Rappam). Leurs activités sont assez différentes de celles des acteurs drômois, avec une place prépondérante de la cueillette (1 000 tonnes de racines de gentiane récoltées par an, par exemple) et des médicinales.
Une des priorités du Pep « arômes et parfums » est d'être au cœur de la filière afin de répondre au mieux à ses préoccupations. C'est pourquoi cet événement s'est déroulé dans les locaux de l'entreprise Elixens, à Crest. Elixens, groupe français dont le siège est en région parisienne, assure une première transformation des matières premières agricoles avant de les commercialiser à d'autres entreprises. Ses spécialités sont l'herboristerie, les huiles essentielles et les eaux florales. Le site de Crest permet à l'entreprise de se fournir en matières premières bio. Cet approvisionnement s'appuie sur un partenariat responsable, exclusif et original entre Elixens et un groupe de producteurs fédérés dans la Sica Bioplantes. Les participants ont ainsi pu visiter les installations du site crestois, guidés par des responsables de l'entreprise et des gérants de la Sica.
3 Pour en savoir plus, connectez-vous sur http://www.pep.chambagri.fr
1 Iteipmai : institut technique interprofessionnel des plantes à parfum, médicinales et aromatiques.
2 Crieppam : centre régionalisé interprofessionnel d'expérimentation en plantes à parfum, aromatiques et médicinales.
3 CNPmai : conservatoire national des plantes médicinales, aromatiques et industrielles.