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Aléa climatique

Sécheresse : la galère

Récoltes fourragères en berne, prévisions de rendements pessimistes en céréales…, la sécheresse se fait durement sentir.
Sécheresse : la galère

« Même s'il pleuvait, le mal est déjà fait ». Voilà ce que disent de plus en plus agriculteurs drômois, notamment des éleveurs comme Pascal et Céline Ferlay à la tête d'un troupeau de 65 vaches laitières et 280 chèvres au Grand-Serre. « Après un hiver très humide et un début de printemps humide et froid, les semis de maïs ont été tardifs, explique l'exploitant. A suivi un temps sec à partir de début juin. Sur les 35 à 40 hectares semés pour l'ensilage, 70 % ne sont pas récoltables. » L'éleveur avoue avoir le couteau sous la gorge. « C'est pire qu'en 2003, nous n'aurons pas assez de stocks pour passer l'hiver, constate-t-il. Et, compte tenu de la chute du prix du lait, la trésorerie est à plat. » Il craint de devoir décapitaliser en vendant une partie du troupeau et même du matériel. « Mais qui va acheter ?, s'interroge-t-il. Du fait des difficultés, il n'y a plus d'acheteurs. »

La sécheresse aggrave une situation déjà compliquée

Le découragement de cet éleveur est profond. « Entre les normes qui nécessitent des investissements supplémentaires et des prix de vente trop bas, on ne peut plus s'en sortir, confie-t-il. La sécheresse vient encore aggraver une situation déjà très difficile. Je suis fatigué. » A l'écœurement de voir les marges bénéficiaires empochées sur le dos des producteurs, d'autres soucis viennent entamer un peu plus un moral déjà bien bas. « J'ai sept hectares qui sont irrigués, explique Pascal Ferlay. J'ai les autorisations. Mais la motopompe que j'utilise dérange le camping qui s'est plaint. Je dois donc arroser uniquement en pleine journée. » Mardi matin, en désespoir de cause, il a lâché ses génisses dans une parcelle de maïs ensilage de trois hectares.
Ailleurs, la sécheresse fait craindre des baisses de rendements importantes, notamment en grandes cultures (lire article ci-dessous).

Dans le Diois, il n'y a pas eu de deuxième coupe de fourrage. De plus, des parcelles de lavande et lavandin sont envahies par des chenilles vertes qui se nourrissent de la tige et font tomber les fleurs. « Les attaques sont très lourdes. On perd l'équivalent d'un hectare de récolte par jour, explique Alain Aubanel, producteur à Chamaloc. Cette invasion est liée à l'excès de chaleur. »
Par ailleurs, de nouvelles mesures de restrictions des usages de l'eau ont été annoncées le 21 juillet par la préfecture (voir encadré).

C. Ledoux
En Drôme et Ardèche
Des prévisions de rendements très pessimistes
Prune Farque de la coopérative Drômoise de céréales qui couvre le territoire situé au nord de Montélimar jusqu’au département de l’Isère indique que la situation sans irrigation peut être qualifiée de catastrophique. L’impact de la sécheresse sur la floraison du maïs, du soja et du tournesol se manifeste par un fort stress hydrique et thermique. En zone irriguée, les conséquences sont évidemment moins graves, même si les agriculteurs n’arrivent pas à satisfaire les besoins causés par le phénomène d’évapotranspiration. « L’inquiétude est grande, précise-t-elle, mais je ne me risquerai pas à un pronostic avant d’avoir compté les épis, ce que l’on ne fera pas avant septembre.»
« La grande majorité des parcelles de notre territoire est irriguée », indique Nicolas Reignier de la coopérative Natura'pro, dont le champ d’intervention couvre aussi le tiers sud de la Drôme. « Aujourd’hui, nos craintes concernent le développement du tournesol et du sorgho non irrigués et de fait les futurs rendements. 2015 n’est décidément pas une bonne année. Elle a débuté avec un hiver pluvieux entraînant un mauvais départ des cultures et parfois la nécessité de ressemer des parcelles. Aujourd’hui, ce sont les zones d’élevage qui sont en grande difficulté car elles sont très touchées par la sécheresse. Les secondes coupes s’avèrent de plus en plus hypothétiques, car il n’y a déjà plus d’herbe dans les prairies ».

 

Sécheresse / Un arrêté préfectoral signé le 21 juillet instaure de nouvelles mesures de restriction des usages de la ressource en eau.

Renforcement des mesures de restrictions des usages de l'eau

 L'absence de précipitations marquées et généralisées depuis un mois et l’évolution des données de suivi montrent une diminution des débits des cours d'eau avec une dégradation plus marquée sur les zones hydrographiques des bassins versants du Vercors, de la plaine de Valence, de la Drôme, du Roubion-Jabron et du Sud-Drôme. Cette dégradation est également remarquée sur les nappes alluviales de la Drôme et du Roubion-Jabron ainsi que sur celles du Sud Drôme. Considérant que la sécheresse se poursuit dans notre département, le préfet de la Drôme a instauré, à compter du 21 juillet, de nouvelles mesures de restriction des usages de la ressource en eau. Le classement en alerte, qui ne concernait jusqu’à présent que les eaux superficielles des bassins versants de la Drôme, du Roubion-Jabron et du Sud-Drôme, est étendu aux eaux souterraines de ces mêmes bassins ainsi qu’eaux eaux superficielles des secteurs Vercors et plaine de Valence. Localement, en fonction de situations locales plus difficiles, les maires peuvent prendre des mesures plus contraignantes, ajoute la préfecture. Cette dernière prévient par ailleurs que des opérations de contrôle seront organisées dans les secteurs les plus sensibles. Le nouvel arrêté est consultable en mairie ainsi que sur le site www.drome.gouv.fr.
 Restriction de niveau 1
S'agissant des usages agricoles, la limitation des prélèvements correspond à une restriction de niveau 1 (économie d’eau de moins 20 %). Les irrigants individuels et organisations collectives d’irrigation disposant d’un tour d’eau sont tenus de l'appliquer. Pour les autres, il est interdit de prélever de l'eau deux jours par semaine (les jours d’interdiction étant fixés par commune). Ne sont pas concernés par les mesures de restriction les prélèvements publics ou privés effectués à partir du Rhône, de sa nappe d’accompagnement et de ses contre-canaux. Il en est de même à partir de l’Isère et de sa nappe d’accompagnement ainsi que dans des retenues collinaires sans relation avec un cours d’eau. Par ailleurs, les usages professionnels suivants ne sont pas restreints :
- abreuvage des animaux et rafraîchissement exceptionnel des bâtiments d’élevage ;
- irrigation des cultures maraîchères et horticoles ainsi que des pépinières ;
- irrigation au goutte-à-goutte ou par micro-aspersion ;
- irrigation des cultures en godets et semis ;
- arrosage des travaux de génie végétal et de plantations de berges de cours d’eau datant de moins de trois ans et ayant été réalisés par les établissements publics gestionnaires de rivières ;
- production d’hydroélectricité par les installations appliquant le règlement d’eau de leur autorisation.