Semences : défendre la rémunération

Avec 9 485 hectares (ha) en 2017 contre 9 614 en 2016, la Drôme demeure toujours le premier département producteur de semences en France. Dans la région Sud-Est du Gnis (groupement national interprofessionnel des semences et plants), elle est suivie par le Puy-de-Dôme (6 687 ha) puis l'Isère (5 687). Ces chiffres ont été communiqués par le représentant du Gnis à l'assemblée générale du Sams (syndicat des agriculteurs multiplicateurs de semences) de la Drôme, le 2 février à Piégros-la-Clastre.
Le tournesol devant le maïs
L'an passé, 616 agriculteurs drômois ont cultivé des semences pour 29 entreprises. Et la diversité des espèces multipliées est grande : oléagineux, maïs et sorghos, plantes potagères et florales, fourragères et gazons, céréales à paille, protéagineux. Comparées à 2016, les céréales à paille ont perdu 147 ha (- 16 %) mais la surface en blé dur a augmenté. Les maïs-sorgho, eux, ont reculé de 821 ha (- 22 % contre - 10 au plan national). A l'inverse, les oléagineux ont gagné 851 ha (+ 23 %), grâce au tournesol qui est passé devant le maïs et à la progression de l'export. Avec 27 ha de plus qu'en 2016 (+ 6 %), les fourragères suivent la tendance nationale. Pour les semences potagères et florales, dont les deux principales espèces sont l'ail et le maïs doux, une baisse de surface de 5 % a été enregistrée (- 42 ha).
En production de tournesol semence, où la Drôme est toujours premier département de France, les conditions météo de 2017 ont pénalisé les rendements, a rappelé Philippe Almoric. Il a aussi mis l'accent sur le travail partenarial conduit au niveau de l'Anamso (association des agriculteurs multiplicateurs de semences oléagineuses) dans le domaine de la pollinisation, notamment avec l'Inra (Bernard Vaissière) pour l'évaluation de colonies d'abeilles.
Etre des aiguillons
Stéphane Desrieux, président du SPSMS (syndicat des multiplicateurs de semences de maïs et de sorgho) de Rhône-Alpes, a observé : « En semences, l'embellie continue pour le tournesol. En maïs, où il y a eu un emballement en 2014, le gâteau ne grossira plus et davantage de producteurs sont autour. Il est trop petit pour tous. La rémunération est revenue au niveau d'il y a dix ans. Or, entre temps, les coûts de production ont augmenté. Il faut retrouver de l'intérêt économique. Chacun à son niveau doit être un aiguillon pour ceux qui défendent nos rémunérations. »
La Drôme se place également en tête des départements producteurs d'ail semence. Au niveau de Prosemail (association des producteurs de plants certifiés d'ail et d'échalote), son président, Raphaël Reboul, a signalé des essais et travaux sur des problématiques phytosanitaires de l'ail : désherbants, rouille. Pour tenter de caractériser la fusariose, une thèse a été lancée avec l'Inra. Quant au waxy breakdown (dégénérescence du caïeu d'ail), ce problème a été recrudescent en 2017 dans les lots d'ail de consommation. « Actuellement, nous ne savons pas ce que c'est, a noté Raphaël Reboul. Nous avons un pansement pour mettre sur la plaie mais pas de remède : cela consiste, après séchage, à descendre la masse d'ail autour de 20°C. »
Techniques alternatives
Le président du Sams, Jacques Chirouze, a mis l'accent sur « l'enjeu déterminant pour la filière » de la protection des cultures. « Compte tenu du contexte réglementaire et de la suppression de nombreuses substances chimiques qui ne passeront pas le cap de leur évaluation européenne, a dit Jacques Chirouze, il nous faut trouver des solutions. » La Fnams (fédération nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences) suit de près l'évolution de leur situation et s'investit sur les méthodes de biocontrôle et techniques alternatives. Le 1er juin à sa station du Maine-et-Loire (près d'Angers), une journée sera d'ailleurs dédiée aux matériels de désherbage. « Produire autrement, avec moins d'herbicides, en respectant les normes de pureté des semences et les objectifs de productivité, tel est l'enjeu de nos filières, dans lequel s'inscrit le thème de cette journée », a confié le président du Sams. « Que la rentabilité des cultures porte-graine ne soit pas entamée est une condition essentielle pour leur mise en œuvre, a-t-il ajouté. [... ] Nous, agriculteurs multiplicateurs, devons œuvrer avec l'aide de la Fnams pour le bon développement de la production de semences. Une très bonne technicité et une analyse précise des coûts de production sont des points clés pour sécuriser notre revenu. »
Annie Laurie
Semences / La Fnams a testé l'andainage avant récolte de cultures porte-graine comme alternative à la dessiccation chimique.L'andainage avant récolte
« S'il n'y a plus de dessiccant chimique autorisé, l'andainage sera la seule solution, explique Christian Etourneau. Les agriculteurs multiplicateurs de semence doivent en avoir conscience et appréhender cette technique, qui n'est pas sans contraintes. » Il l'a testée chez des agriculteurs avec plusieurs types de matériels. Elle demande soit du matériel spécifique (coûteux) ou adapté (sinon risque de perte de semences), soit de trouver des prestataires (peu nombreux). Son utilisation est très restreinte dans la journée (nuit ou matin, pour éviter l'égrenage). Le stade optimal d'intervention doit être apprécié par sondages en différents points de la parcelle et contrôle de l'humidité des graines.
« Avec le dessicant chimique, la culture reste debout, remarque encore Christian Etourneau. Avec l'andainage, elle est coupée avant récolte. Donc, il faut être vigilant vis-à-vis des conditions climatiques et sûr que le matériel sera disponible pour l'andainage et la récolte car cela doit être fait à un stade très précis pour préserver la qualité du lot de semence. Pour le tournesol, la barre de coupe devra être adaptée (il n'existe pas de matériel spécifique en France). »A. L.