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Salon

Tech Ovin : une vitrine pour la filière ovine

La filière ovine était réunie à Bellac (Haute-Vienne) les 7 et 8 septembre pour Tech Ovin, son grand rendez-vous bisannuel.
L’occasion pour les moutonniers français de se retrouver, d’échanger, de partager et de découvrir les innovations.

Tech Ovin : une vitrine  pour la filière ovine

Tous les deux ans la filière ovine se retrouve à Bellac pour Tech Ovin, le seul salon en France exclusivement destiné aux moutonniers. Les éleveurs s'étaient donc donné rendez-vous les 6 et 7 septembre. Les organisateurs estiment que la fréquentation a augmenté par rapport à l'édition de 2015 où 15 000 visiteurs avaient fait le déplacement. Pour Michèle Boudouin, présidente de la Fédération nationale ovine (FNO), « ce rendez-vous familial est important pour le syndicat », il s'agit en effet de « l'endroit privilégié pour parler de la production et échanger sur différentes problématiques qui concernent la filière ». La présidente a également salué « le travail mené depuis 20 ans par l'équipe qui porte ce projet autour de Claude Souchon sans qui cet évènement n'aurait pas vu le jour ». Ce salon a lieu dans la plus grosse région ovine française. Il est donc une « vitrine de la filière ». La Nouvelle Aquitaine compte en effet 23 % du cheptel français de brebis allaitantes sur un total de 3 776 bêtes. Tech Ovin a aussi donné l'opportunité aux professionnels d'échanger sur des problématiques comme le Brexit. La filière va, en effet, être fortement touchée par les négociations. Les 36 409 éleveurs d'ovins allaitants produisent 45 % de la consommation de viande d'agneau française. Le reste est importé à 24 % du Royaume-Uni, mais aussi d'Irlande (10 %), de Nouvelle-Zélande (10 %) d'Espagne... La France est donc déficitaire en viande d'agneau et le principal fournisseur est la Grande-Bretagne. Des éleveurs anglais présents à Bellac ont profité de l'événement pour rencontrer Michèle Boudouin. Elle a même confié qu'ils souhaitaient « obtenir la nationalité française afin de rester des citoyens européens ». Le loup était aussi omniprésent dans la bouche des éleveurs. Le prédateur touche en effet fortement la filière. Les attaques sur les troupeaux ne cessent d'augmenter ; 72 000 bêtes ont été tuées depuis le retour du loup en 1993, dont près de 10 000 animaux en 2016, cela en dépit des mesures de protection prises par les éleveurs. Mais le salon était aussi l'occasion pour la FNO de « montrer aux éleveurs qu'ils ne sont pas seuls face au loup ».

Michèle Boudouin, présidente de la Fédération nationale ovine (FNO).

Une envergure internationale

Pour la première fois en 20 ans d'existence, un leader de la FNSEA s'est rendu à Tech Ovin. Christiane Lambert a été « impressionnée par ce salon qui a pris une envergure internationale ». La présidente de la FNSEA a, en effet, été agréablement surprise « d'être accueillie au son d'une voix anglaise » qui commentait la compétition de tonte. Selon Maurice Huet, président d'Interbev ovin, cette visite a été accueillie par la filière comme une « reconnaissance et la preuve que la FNSEA avait une oreille pour les éleveurs ovins ». La filière est aussi impliquée dans les États généraux de l'alimentation, notamment en ce qui concerne la valeur ajoutée des produits, le développement des circuits courts, etc. Ce travail s'inscrit dans la continuité des travaux de la FNO et d'Interbev qui se mobilisent depuis plusieurs années pour remettre la consommation de viande d'agneau au cœur de l'alimentation, notamment des jeunes générations, en recherchant l'innovation dans la présentation de la viande (haché d'agneau pour des burgers par exemple) et des campagnes sur les réseaux sociaux. 

 

ZOOM SUR…

Concours Innovation et Berger Futé : les résultats

Deux concours étaient organisés dans le cadre du Salon Tech Ovin. Le premier récompensait les innovations les plus prometteuses. Celles-ci devaient être également utiles et aisément reproductibles. La première place a été attribuée à Jean-François Descloix de la coopérative Cialyn pour son parc de tri réglable et mobile. La deuxième place est revenue à la start-up Pampaas pour Vigifence, clôture connectée permettant d’alerter l’éleveur en cas de divagation des animaux. Le troisième lauréat est la société Elanco pour la mise en place d’un traitement contre les infections gastro-intestinales. Le second concours récompensait les astuces et outils imaginés par les éleveurs pour faciliter leur travail. Le premier prix a été attribué au Gaec du Petit Poirat (Vienne) pour son anti-passage cornadis, le second à Mélanie Chasseigne (Cher) pour son Accroche claie et le troisième à Éric Breynat (Drôme) pour sa balise GPS.  
L’agneau aussi a son burger
C’est avec une nouvelle recette que l’association de défense et de promotion de l’agneau du Poitou (ADPAP) est arrivée à Tech Ovin. « Nous savons que la consommation d’agneau a tendance à baisser et que les consommateurs d’agneau ont une moyenne d’âge de 55 ans, explique Audrey Tessereau, chargée de mission au GIE ovin du Centre-Ouest. Aussi, nous avons cherché de nouvelles façons de consommer l’agneau qui puissent séduire les trentenaires. » Pain fabriqué localement, steack d’agneau proposé par un abatteur-transformateur de la Vienne, coppa, compotée d’oignons, mottais-sur-feuille, et la recette créée par Thomas Fournier, restaurateur à Availles-Limouzine, est prête.
« Les gens ont été très surpris, même ceux qui mangent peu ou pas d’agneau ont apprécié. Le retour est très positif », conclut Audrey Tessereau. La centaine de burgers prévue n’a en effet pas pu satisfaire tous les visiteurs. 

 

 

Christiane Lambert, présidente 
de la FNSEA, lors de sa venue au Salon Tech Ovin.

Interview / De passage au Salon Tech Ovin, Christiane Lambert, la présidente de la FNSEA, s’est prêtée au jeu de l’interview pour faire le point sur l’actualité syndicale.Christiane Lambert : “ Faisons une politique de bon sens ! ”

 

Christiane Lambert, quels messages souhaitez-vous adresser à la filière ovine au travers de votre venue à Tech Ovin ?
Christiane Lambert : « Ce Salon est le signe que, malgré les crises de l’élevage que nous traversons, la filière ovine est toujours tournée vers l’avenir : la formation, l’installation des jeunes, les projets d’évolution des exploitations sont au cœur de Tech Ovin. C’est l’occasion de faire connaître les innovations qui facilitent le travail de l’éleveur et lui permettent de mieux gagner sa vie ; améliorent les conditions de vie des animaux ; préservent toujours mieux notre environnement et garantissent la haute qualité de nos produits français. La recherche et développement dans nos secteurs est au service de l’éleveur, des animaux et des consommateurs, c’est sa force pour être en démarche de progrès permanente. La production ovine française est reconnue de qualité et fait vivre nos territoires. Nous avons la responsabilité collective de la mettre en valeur auprès des jeunes générations et de conforter les débouchés pour l’agneau français dans nos cantines et restaurants. La demande des consommateurs va aujourd’hui dans ce sens et nous sommes prêts à y répondre ! En lien étroit avec la FNO, nous serons aussi tout particulièrement attentifs à la négociation du Brexit dans les prochains mois pour éviter une déstabilisation de la filière. »

Il y a quelques jours débutaient les premières consultations des États généraux de l’agriculture, quelle est la position défendue par la FNSEA et quelles sont vos attentes ?
C.L : « La FNSEA défend des positions qui doivent permettre avant tout de rééquilibrer les revenus des producteurs. Nous ne pouvons pas continuer d’être la variable d’ajustement dans la chaîne alimentaire. Dans le dialogue et avec fermeté, il s’agit bien de reconstruire des prix justes. Et les Français sont prêts à nous aider pour réussir cela (selon un sondage Kantar, 53 % se disent prêts à payer plus si cela profite aux producteurs). De promotions en braderies, il est temps de redonner collectivement de la valeur à ce que l’on produit et consomme. La FNSEA souhaite passer d’une relation d’adversaires à une relation de partenaires avec les autres acteurs de la chaîne afin de trouver des points de convergence et d’équilibre. Le succès des États généraux de l’alimentation en dépend. La grande distribution et la transformation doivent faire évoluer leur logiciel de partage de la valeur ajoutée. Le rééquilibrage est urgent ! Nous demandons aussi aux consommateurs d’acheter « responsable », d’acheter en conscience. Nos pratiques sont transparentes et nos produits sont de qualité. Cela a un prix ! Les États généraux de l’alimentation sont une chance. En tout cas, il faut leur donner une chance. Et, en ce sens, la FNSEA participe aux ateliers et propose des pistes pour s’en sortir. L’idée est bien d’être responsables et proactifs. Le gouvernement devra prendre ses responsabilités pour en faire un acte fondateur et non une grande mesure inutile ! »

Nous sommes en période de rentrée syndicale, quels vont être les dossiers importants des mois à venir ?
C.L : « Notre rentrée syndicale s’oriente autour de trois gros dossiers. Nous avons tout d’abord à réussir ces États généraux de l’alimentaiton, mais pas à tout prix, au prix juste et responsable ! Nous avons aussi à faire le bilan de cet été avec des moissons hétérogènes et aléatoires, des vendanges de - 30 % en valeur et des récoltes de fruits et légumes non satisfaisantes dans de trop nombreuses régions. Il faudra pour certains d’entre nous réactiver les cellules d’urgence afin de trouver les voies et moyens de passer ce cap difficile. Par ailleurs, nous avons à avancer sur la question de nos moyens et besoins pour nos productions. Le glyphosate, par exemple, ne devrait pas être un objet de seule controverse entre agriculture et environnement alors qu’il permet d’avancer sur le stockage de carbone et rentre dans les évolutions de l’agroécologie. Nous voulons aller sur le zéro impact phyto mais, de grâce, regardons tout ce qui a été fait et faisons progresser la recherche d’alternatives avant de décider unilatéralement et brutalement la fin de telle ou telle molécule. Le stockage de l’eau est également un dossier essentiel pour de nombreux paysans et de nombreuses productions. Faisons une politique de bon sens ! Stockons l’eau de l’hiver pour irriguer l’été. Face à la récurrence et à l’augmentation des aléas climatiques, le stockage de l’eau est une solution. Il y a eu trop de dogmatisme. Sortons des schémas anciens et avançons ! » 

Propos recueillis par Pascale Dumont