Testez vos connaissances sur le mildiou en tournesol
Le mildiou est un champignon pathogène du tournesol, peu connu des producteurs en région Auvergne-Rhône-Alpes car peu observé. Il est néanmoins nécessaire de s’y intéresser de façon à prévenir le risque. Terres Inovia vous propose de tester vos connaissances en six questions.

➊ Si je ne cultive pas de tournesol pendant plusieurs années sur la même parcelle, le risque mildiou est-il nul ?
FAUX Le mildiou est présent dans le sol de toutes les parcelles où le tournesol a été cultivé à un moment ou à un autre. L’absence de sa plante hôte préférée sur une parcelle réduit effectivement le risque car le mildiou a absolument besoin du tournesol pour faire son cycle et ne peut donc pas se multiplier en son absence. Ainsi, en l’absence de tournesol, le réservoir d’inoculum dans le sol s’épuise peu à peu. Néanmoins, sa forme de conservation (oospores) très résistante lui permet de survivre 10 ans dans une parcelle même en l’absence de tournesol. De plus, le mildiou peut s’installer sur d’autres plantes qui appartiennent à la même famille que le tournesol : des adventices (l’ambroisie à feuilles d’armoise, le bidens, le xanthium, les bleuets) ; le niger et le tournesol de graines de ferme utilisés en interculture. Les repousses de tournesol sont aussi un bon relais pour le mildiou car celles-ci ne bénéficient plus de la résistance de la variété d’origine. La présence de ces plantes sur une parcelle après un tournesol, même ancien, contribue au maintien de l’inoculum, donc du risque. Enfin, même si le mildiou est une maladie plutôt inféodée à la parcelle, car il attaque le tournesol par le système racinaire (on parle d’un agent pathogène tellurique), il peut néanmoins investir les parcelles avoisinantes : ses oospores peuvent voyager du haut vers le bas d’un coteau à la faveur du ruissellement de l’eau. On ne peut pas non plus exclure le transport des oospores d’une parcelle à l’autre par les engins agricoles. Le risque zéro, hélas, n’existe pas, mais on dispose d’un arsenal de bonnes pratiques et de solutions génétiques et chimiques pour réduire les risques.
➋ La variété est-elle le seul moyen de lutter contre le mildiou ?
FAUX La lutte génétique est effectivement l’un des piliers de la lutte contre le mildiou. Au fil de l’apparition de nouvelles races sur le territoire, les sélectionneurs ont pu proposer des variétés résistantes (RM) aux producteurs grâce à la découverte et l’exploitation de nouveaux gènes de résistance très efficaces. Rappelons cependant que si le mildiou n’a jamais occasionné de diminution significative du rendement moyen national, c’est grâce à l’association de la lutte génétique avec de bonnes pratiques agronomiques, elles aussi très efficaces, et une protection fongicide (traitement de semences) raisonnée. Faire reposer la lutte contre le mildiou seulement sur la génétique est une erreur : le mildiou est en effet capable de contourner une résistance génétique en cinq ans, ce qui génère l’apparition de nouvelles races.
➌ La résistance des variétés est-elle infaillible ?
FAUX Le mildiou est particulièrement innovant ! Dans une parcelle, il peut être comparé à une population d’individus qui ne sont pas tous exactement pareils : parmi eux, certains, en proportion très faible, ont une petite différence dans leur ADN, qui fait qu’une variété jusqu’alors résistante, ne les reconnaît plus et est attaquée. Autre phénomène : on ne le soupçonne pas, mais le mildiou a aussi une vie sexuelle ! En se croisant, deux individus de races différentes jusqu’ici contrôlées par la résistance des variétés peuvent ainsi produire une descendance dotée d’une nouvelle virulence. La race 714 est ainsi probablement issue de « l’union » entre des individus de la race 304 et de la race 710. Tous ces nouveaux individus deviennent peu à peu majoritaires dans la population de mildiou de la parcelle et peuvent causer des attaques significatives sur des variétés attendues comme résistantes.
➍ Pas d’eau, pas de mildiou ?
VRAI Les attaques les plus fréquentes du mildiou (qui sont hélas les plus nuisibles) sont issues de l’infection de la radicule des plantules de tournesol au moment de la levée. Le mildiou colonise ensuite peu à peu tous les tissus des plantules, engendrant des pieds nanifiés et stériles. Or, le mildiou aime l’eau ! Ses petites spores infectieuses sont justement munies de deux petits flagelles pour mieux se déplacer vers les radicules de tournesol. Elles ne peuvent toutefois réussir cette « migration » vers leur cible que si de l’eau circule dans le sol : on parle d’eau libre. Un cumul de 50 mm de pluie sur les dix jours qui encadrent le semis suffit en général pour générer de l’eau libre dans le sol. Les printemps pluvieux sont ainsi ceux où le risque mildiou est le plus élevé. Décaler la date de semis pour éviter un épisode pluvieux est un levier très efficace pour empêcher les attaques, même sur une variété qui ne résiste pas à toutes les races de mildiou présentes localement. Mais cela n’est pas toujours facile, surtout lors de printemps pluvieux. Néanmoins, mieux vaut semer plus tard, même au risque d’entamer un peu le potentiel de rendement de la parcelle, qu’avoir une attaque de mildiou carabinée qui, au-delà de pénaliser la production, va compliquer la gestion de la maladie pour plusieurs années : le réservoir d’inoculum reconstitué au taquet est viable très longtemps.
➎ Le mildiou est-il vraiment capable de résister au traitement de semences ?
VRAI L’Apron XL, traitement de semences largement utilisé depuis trente ans pour protéger le tournesol, a pour substance active le métalaxyl-M. Très efficace, il a permis de sauver la culture du tournesol au début des années 1990, juste après l’apparition des races 703 et 710, alors que les variétés ne disposaient pas encore de résistance génétique face à ces nouvelles races. Le mode d’action de cette molécule est dit unisite : elle agit à un seul endroit de la cellule de l’agent pathogène. Cinq ans après son utilisation rendue obligatoire sur toutes les variétés en 1990, apparaissaient les premiers isolats de mildiou résistants. Toujours largement utilisé alors qu’il n’était plus obligatoire sur aucune variété depuis 2005 (85 à 90 % de la sole tournesol sont traités à Apron XL chaque année), le métalaxyl-M est beaucoup moins protecteur puisque de nombreux isolats avec des niveaux élevés de résistance (> 50 %) sont détectés chaque année, notamment sur les races 704 et 714 les plus présentes sur le territoire et tout récemment sur les isolats de mildiou contournant les variétés dites RM9. Mais des solutions existent. L’utilisation répétée sur une même parcelle d’une même substance active à mode d’action unisite (qui conduit à une résistance au traitement de semences) s’apparente à l’utilisation répétée de variétés avec le même gène de résistance spécifique (qui conduit à l’apparition de nouvelles races contournant la résistance variétale).
De nouveaux traitements de semences, à mode d’action différent de celui du métalaxyl-M, arrivent sur le marché. Protéger leur efficacité passe par leur utilisation raisonnée (ne pas répéter l’utilisation tous azimuts du métalaxyl-M). Ne pas utiliser un traitement de semences avec une seule substance active et varier les associations avec différents modes d’action.
➏ Utiliser une variété résistante à tout, avec en plus un traitement de semences, est-ce « l’assurance tous risques » ?
FAUX On dispose effectivement de plusieurs moyens de lutte contre le mildiou, mais il s’agit de bien les utiliser pour les faire durer. N’oublions jamais que le traitement de semences peut être lessivé en cas de grosses pluies et que le mildiou a une capacité d’adaptation extraordinaire face aux molécules fongicides et aux gènes de résistance des variétés. Dans cette situation, où l’on cherche la protection maximale, le risque est d’utiliser trop régulièrement sur la parcelle les mêmes solutions génétiques et chimiques ; or ce choix peut vite s’avérer contre-productif compte tenu du potentiel d’adaptation du mildiou. La solution pour une protection durable du tournesol contre le mildiou repose sur trois points clés : mettre en œuvre les bonnes pratiques agronomiques qui sont d’une grande efficacité ; varier les profils RM des variétés ; utiliser le traitement de semences de façon raisonnable.
Emmanuelle Mestries , Terres Inovia
Votre contact régional : Alexis Verniau ([email protected])
Les bonnes pratiques agronomiques en tournesol
• Allonger les rotations : le retour du tournesol une année sur trois (ou plus) permet de limiter la pression mildiou.
• Semer dans un sol bien ressuyé et réchauffé, et retarder le semis si de fortes précipitations sont annoncées les jours suivants afin d’esquiver les conditions favorables aux infections.
• Détruire dans les parcelles toutes les espèces pouvant héberger le mildiou : repousses de tournesol (y compris dans les autres cultures) et mauvaises herbes comme l’ambroisie, le bidens, le xanthium par un désherbage adapté.
• Éviter les plantes hôtes du mildiou en interculture, telles que le niger, susceptibles de multiplier le champignon pathogène.