Tomate d'industrie : des producteurs recherchés

La France produit près de 200 000 tonnes de tomates destinées à la transformation (60 % dans le Sud-Est et 40 dans le Sud-Ouest), contre presque 400 000 tonnes en 1985, et en consomme 1,2 million de tonnes. En 2015, avec 2 618 hectares, la production nationale aurait dû atteindre 195 000 tonnes mais n'a totalisé que 165 000 tonnes en raison des conditions climatiques. Il manque du volume pour répondre aux besoins, d'autant plus qu'un agriculteur cultivant 200 hectares de tomates a arrêté de produire.
Sécuriser l'approvisionnement
Les besoins sont de 150 à 200 hectares dont 50 à 100 en Drôme. A la base, la demande émane des industriels Provence Tomates (en production conventionnelle) et la société Louis Martin (demande en bio). L'idée, pour diversifier et sécuriser l'approvisionnement des industriels, est de redéployer la culture sur les zones historiques de production. Notre département a un savoir-faire dans la tomate d'industrie. Il occupait en effet la première place à la fin des années 1990, avec près de 100 000 tonnes. En 2015, il comptait seulement 300 hectares (30 exploitations dont un tiers travaillant avec Valsoleil et le reste avec Apto 2). Actuellement, des producteurs sont recherchés sur les bassins de production existants que sont les secteurs d'Etoile-Crest-Montélimar, d'Eymeux-Romans et d'Anneyron-Saint-Rambert-d'Albon.
Une filière contractualisée
Dans ce contexte de renforcement et de diversification géographique de la production, la Sonito (interprofession nationale de la tomate destinée à la transformation), en collaboration avec la chambre d'agriculture de la Drôme, a organisé une réunion d'information lundi 8 février à Etoile. Celle-ci a rassemblé une cinquantaine de participants, principalement des agriculteurs. La Sonito était représentée par son président, André Bernard, et son responsable technique, Robert Giovanizzo. Côté organisations de producteurs, étaient présents le président et la technicienne d'Apto 2, Serge Garcia et Murielle Cordou, des techniciens de Valsoleil, Arnaud Robin et Dominique Dubeuf. Côté industriels de première transformation, assistaient à la réunion le directeur et le responsable agricole de la société Provence Tomates, Didier Plaa et Rémi Pécoult, ainsi que Raphaël Rouvière, président de la société Gielly (tomate surgelée). La filière légumes de la chambre d'agriculture de la Drôme, elle, était représentée par Yvon Palayer, élu, Mikaël Boilloz, conseiller technique et Laurent Quadrio, responsable d'équipe.
« Il faut reprendre des parts de marché, a noté le président de la Sonito en ouverture de cette réunion. Je suis convaincu que l'on peut se repositionner. Ce n'est pas une production où l'on fait fortune mais la production est sécurisée par la contractualisation. »
La culture
Afin de donner des éléments de prise de décision aux agriculteurs, Robert Giovanizzo a présenté l'itinéraire technique de la tomate d'industrie. Parmi les conditions à réunir : des parcelles irrigables, se prêtant au passage d'une machine à récolter, revenir seulement tous les cinq ans sur la même parcelle, ne pas cultiver de la pomme de terre en précédent... La récolteuse de tomates est un investissement onéreux. Aussi, André Bernard a suggéré deux possibilités pour les nouveaux producteurs : dans un premier temps, la récolte par des agriculteurs déjà équipés ou l'achat de matériel d'occasion.
Coût de production et prix
Rémi Pécoult a détaillé les coûts de production pour la Drôme (préparation du sol, plants, plantation, entretien de la culture, récolte), avec deux variables en termes d'irrigation. Il a annoncé un coût minimum de 5 500 euros à l'hectare avec l'arrosage par aspersion et maximum de 6 500 avec le goutte-à-goutte. 80 tonnes à l'hectare lui semble un objectif de rendement correct. Le prix moyen d'achat des tomates aux producteurs est de 85 euros la tonne. A ce prix, le seuil de rendement pour dégager un bénéfice se situe entre 65 tonnes à l'hectare (aspersion) et 75 (goutte-à-goutte). S'ajoute une enveloppe d'aide couplée de la Pac de 2,9 millions d'euros à répartir entre tous les hectares de France (autour de 1 100 euros l'hectare en 2015).
Concernant le délai de paiement, le président de la Sonito a expliqué : « On est dans une stratégie de filière. Nous avons reconstruit des outils. Aujourd'hui, la moitié est payée aux producteurs avant la fin de l'année et le reste en début d'année suivante. L'objectif, à terme, c'est que toute la récolte soit réglée à 60 jours ». Et en cas de réduction des surfaces, dans le futur ? « Elle sera répartie entre les producteurs, a assuré André Bernard. Si on accepte un producteur aujourd'hui, on l'acceptera aussi dans cinq ans. » Les agriculteurs drômois vont-ils contribuer au redéploiement de la production ? L'avenir le dira.
Annie Laurie