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Enjeu

Transition énergétique : menaces ou opportunités pour les exploitations agricoles ?

Pour son 70ème congrès, la FDSEA de la Drôme a choisi d'évoquer les suites de la COP21 et la loi sur la transition énergétique avec cette question : menaces ou opportunités pour les exploitations agricoles ?
Transition énergétique : menaces ou opportunités pour les exploitations agricoles ?

Comprendre les conséquences qui découleront de la COP21 et de la loi sur la transition énergétique et la croissance verte votée en août dernier, c'est en substance l'idée du thème retenu par la FDSEA de la Drôme pour son 70ème congrès. « C'est une façon de faire du syndicalisme autrement, en anticipant sur des décisions législatives, a indiqué Jean-Pierre Royannez, vice-président de la FDSEA. Pour tenter d'expliquer ce dossier complexe, la fédération a convié Aurore Bescond, chargée de mission énergie climat à la FNSEA. Dans son exposé, elle a tout d'abord cité 1980 comme année de rupture dans le réchauffement global de la planète. A l'issue de la COP21, l'accord de Paris prévoit notamment de maintenir l'augmentation de la température mondiale « bien en dessous » de 2°C. Au même titre que tous les secteurs d'activité, l'agriculture est incluse dans les efforts de réduction d'émission de gaz à effet de serre (GES). Certaines pratiques actuelles seront amenées à évoluer. Cependant, l'agriculture fait valoir sa participation au stockage du carbone dans les sols, de même que son rôle dans la sécurité alimentaire mondiale.

Réduire de 12 % les émissions carbonées

Avec la loi de transition énergétique, la France s'est engagée à diviser par quatre ses émissions de GES entre 1990 et 2050. Pour atteindre ce seuil, la loi instaure la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et les budgets carbone. La SNBC fixe les orientations pour tous les secteurs d'activité. « Pour l'agriculture, l'effort demandé représente une réduction de 12 % des émissions carbonées d'ici 2028 », a expliqué Aurore Bescond. C'est moins que pour le transport (- 30 %), le résidentiel et le tertiaire (- 54 %) et l'industrie (- 33 %). L'incidence se fera tout de même sentir sur les politiques agricoles nationales et régionales. D'ores et déjà, l'agriculture fait valoir les mesures agro-écologiques : itinéraires bas intrants, substitution d'engrais minéraux par des engrais organiques, augmentation de la durée des rotations, diversification culturale et développement des légumineuses, préservation des prairies permanentes, développement de l'agroforesterie, déploiement de la méthanisation agricole, etc.

Crédits carbone : des projets agricoles

Aurore Bescond a aussi évoqué les « crédits carbone ». Il s'agit d'une unité équivalant à une tonne de CO2 évitée ou séquestrée. Ces unités sont délivrées aux porteurs de projet qui réduisent les émissions de GES. Ils pourront ensuite les valoriser auprès d'entreprises polluantes, afin de compenser les émissions émises. Des projets agricoles sont déjà en œuvre. 450 exploitations laitières s'engagent à réduire de 12 % les émissions de méthane des vaches grâce à une alimentation conforme aux exigences du cahier des charges Bleu-Blanc-Cœur. 2 700 tonnes de GES seraient ainsi évitées et pourraient être valorisées sur le marché carbone. Quant au projet InVivo AgroSolutions, porté par plusieurs coopératives, son but est de promouvoir l'insertion de légumineuses dans les rotations. Avec une moindre utilisation d'engrais minéraux, des crédits carbone pourraient être obtenus et restitués sous forme financière aux coopérateurs. Encore faut-il que la valeur de ces crédits soient stables, ce qui n'est pas le cas actuellement avec leur effondrement. L'agriculture est aussi concernée par le programme international « 4 pour 1 000 ». Son objectif consiste à améliorer les stocks de matière organique des sols de 4 pour 1 000 par an, ce qui suffirait à compenser l'ensemble des émissions de GES de la planète.

« L'agriculture est une solution »

Face aux enjeux du réchauffement climatique, « il faut avoir la conviction que l'agriculture est une solution, a assuré Anne-Claire Vial, présidente de la chambre d'agriculture de la Drôme. Avec les biomatériaux, elle peut même contribuer à faire baisser les émissions d'autres secteurs émetteurs. Et les grandes cultures sont capables d'absorber deux fois plus de carbone que la forêt. De plus, la méthanisation agricole reste encore à développer en France. » Pour accompagner les mutations, sans toutefois réduire les potentiels de production alimentaires, la chambre régionale d'agriculture se dote à compter du 1er avril d'un conseiller énergie. Son bureau sera dans la Drôme.

Christophe Ledoux