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Patrimoine

Un détour par Les plus beaux villages de France

En parcourant l’hexagone, tous les touristes en ont fait l’expérience. Chaque région, chaque département, recèle une somme de petites et de grandes pépites qui confèrent à certains villages un supplément d’âme. Bienvenue dans l’univers des plus beaux villages de France.
Un détour par Les plus beaux villages de France

L'histoire du Plus beau village de France démarre en Corrèze au début des années 1980, grâce à Charles Ceyrac, alors maire de Collonges-la-Rouge. En tombant sur un album édité par Sélection du Reader's Digest intitulé Les plus beaux villages de France et dont la photo de couverture était justement celle de son village de Collonges, l'élu trouve l'inspiration. « Charles Ceyrac était confronté, comme beaucoup d'élus ruraux à cette époque, à la déprise agricole et à l'abandon d'un patrimoine exceptionnel », explique Maurice Chabert, actuel président de l'association Les plus beaux villages de France, maire de Gordes et président du conseil départemental du Vaucluse. Pour protéger et promouvoir le patrimoine remarquable des communes d'exception, Charles Ceyrac décide de constituer une association. Il écrit ainsi à l'ensemble des maires des villages présents dans l'album, une centaine environ. 66 d'entre eux l'ont suivi dans cette aventure officialisée le 6 mars 1982 à Salers, dans le Cantal avec, pour objectifs statutaires, « de protéger, promouvoir et développer ces villages reconnus pour leur qualité patrimoniale ».

Rubis de la vallée de la Dordogne, Collonges-la-Rouge en Corrèze abrite le siège de l’association Plus beaux villages de France.

Posséder au moins deux sites ou monuments protégés

Aujourd'hui, l'association compte 157 villages répartis dans 14 régions et 70 départements. Éviter les écueils du « village musée » sans âme ou, à l'inverse, ceux du « parc d'attractions », réconcilier les villages avec l'avenir, redonner la vie autour de la fontaine ou sur la place ombragée de tilleuls et platanes centenaires. Voilà l'ambition de l'association. Chaque année, la commission qualité de l'association expertise les candidatures au classement. Si les communes sont nombreuses à vouloir entrer dans le cercle fermé du label, qui n'a pourtant rien d'officiel, force est de constater que toutes ne sont pas élues.

Pérouges dans l’Ain, garde derrière sa double enceinte de remparts, les traces de son passé médiéval : vieilles demeures des XVe-XVIe siècles, ruelles aux galets inégaux, église forteresse.

Pas plus de 2 000 habitants

La sélection des villages, qui se déroule en quatre étapes, est très rigoureuse. En moyenne, seule une demande sur cinq aboutit favorablement. Le dossier de candidature, porté par la commune elle-même ou par une structure intercommunale, si elle a été mandatée à le faire, doit assurer que le bourg (ou plus rarement le hameau) faisant l'objet de la demande satisfait aux trois critères éliminatoires suivants : attester d'une dimension rurale, c'est-à-dire avoir une population agglomérée maximale de 2 000 habitants ; posséder, sur son territoire, au minimum deux sites ou monuments protégés (classés ou inscrits) et prouver d'une adhésion collective au projet de demande de classement par la fourniture d'une délibération du conseil municipal.

L'exigence, clé du classement

Lorsque le dossier de candidature a reçu un avis favorable, vient le temps de la visite de terrain par le chargé de la politique qualité de l'association. Cette expertise payante¹ est basée sur une grille de 27 critères objectifs permettant de mesurer l'importance et la valorisation du patrimoine du village, sa qualité architecturale, urbanistique et environnementale ainsi que la pertinence des actions de la commune en termes de maîtrise et de mise en valeur de son territoire (outils d'urbanisme, maîtrise des flux de fréquentation, aménagements esthétiques...). Le dossier de chaque commune candidate est visé deux fois par an par la commission qualité composée de membres de l'association et d'experts. C'est elle qui statue sur le sort des candidatures. Quatre décisions sont possibles : le classement sans réserve ; le classement avec réserves, mentionnées dans le compte rendu d'expertise ainsi que dans la charte qualité et que la commune devra, dans ses actions à venir, s'efforcer de lever ; le non-classement temporaire, permettant à la commune dont le potentiel a été reconnu, de renouveler sa demande de classement, à une date qu'elle jugera plus opportune en fonction de l'amélioration de sa qualité ; le non-classement définitif éliminant (sauf exception dûment motivée), toute possibilité de renouvellement de candidature. Pour les plus chanceux, le feu vert de la commission qualité est une nouvelle étape. En signant la charte de qualité, la commune s'engage à respecter un certain nombre de critères. Et ce, dans la durée. Les villages classés antérieurement à 1991, date de la mise en place de la grille d'expertise multicritères, font en effet l'objet d'une vérification de leur qualité tous les six ans et peuvent voir leur classement remis en question par la commission qualité. La labellisation est donc un processus fastidieux, exigeant mais « indispensable pour garantir la crédibilité du classement », estime Michel Chabert. 
Sophie Chatenet
¹ En moyenne, 800 euros plus 0,50 euro par habitant pour une expertise.

Yvoire en Haute-Savoie, on l’appelle « la perle du Léman ». Dominant les bords du lac qui fit du village un port de pêcheurs et de bateliers, le donjon carré est l’un des vestiges du passé médiéval d’Yvoire.

 

Un concept qui essaime dans le monde 


Depuis sa création en 1982, l'association Les Plus Beaux Villages de France a inspiré d'autres pays également confrontés aux enjeux de préservation et de valorisation de leur patrimoine rural. Ainsi, en 1994, la Wallonie crée son association suivie en 1998 du Québec, par l'Italie en 2001, le Japon en 2005 et l'Espagne en 2011. En 2003, du fait de leur proximité européenne, les réseaux français, wallon et italien jettent les premières bases d'une coopération en créant l'association Les Plus Beaux Villages de la Terre, une fédération regroupant les réseaux de Plus Beaux Villages existants.

Des « aimants » à touristes

Faites l’expérience, vous flânez en famille dans une de nos belles régions de France. À coup sûr, en parcourant bourgs et hameaux, vous choisirez de faire une halte dans celui qui arbore fièrement le panneau Les plus beaux villages de France. À condition évidemment, que vous en croisiez un sur votre chemin… Véritable « aimant » à touristes, le label constitue une ressource économique importante pour les territoires, même s’il engage financièrement les communes(1). Dès la première année, un nouveau village voit sa fréquentation croître de 30 %, le chiffre d’affaires des commerces augmentant dans les mêmes proportions. Si la France compte une trentaine d’autres labels territoriaux, tels que Petites cités de caractère ou Les Plus Beaux Détours de France, aucun n’égale en notoriété Les Plus Beaux Villages de France.
(1) Une fois retenu, chaque village doit s’acquitter d’une redevance annuelle de 3 euros par habitant, en échange de laquelle l’association met à disposition les panneaux, édite un guide (vendu à 170 000 exemplaires), une carte en partenariat avec Michelin et un livre de photos.