Accès au contenu
Innovation

Un élevage porcin à basse consommation d’énergie

L’élevage porcin du Bugey est installé au lieu-dit Le Cros du Buis dans la commune de Verna. Sa particularité : un bâtiment d’élevage classé basse consommation d’énergie (BEBC) pour réduire l’impact sur l’environnement.
Un élevage porcin à basse consommation d’énergie

Malgré la vue sur la centrale nucléaire du Bugey, l'élevage du même nom assume par lui-même la quasi-totalité de ses besoins énergétiques. En mode autonome, ce site auparavant géré en production porcine sur litière pour l'engraissement des animaux a connu une transformation radicale en mars 2016. Son gérant, Pascal Allabouvette décide alors de passer d'un modèle d'engraissement sur paille à un modèle post-sevrage engraissement sur caillebotis grâce à une collaboration étroite avec l'élevage des marais. Cette maternité de l'Ain livre des porcelets de 8 kg à peine sevrés. L'homme de 48 ans est accompagné par la coopérative porcine Cirhyo dans la conception et l'installation de bâtiments à consommation d'énergie réduite.

Les odeurs piégées

Ensemble, ils ont conçu le projet de restructuration de l'ancien élevage de Jean Labrune pour 2,1 millions d'euros de travaux. À l'entrée, un atelier post-sevrage réchauffe les porcelets à 28°. Ils sont dispatchés en plusieurs lots où ils resteront au maximum six semaines. Ensuite, c'est l'atelier d'engraissement qui les attend quelques mètres plus loin, à quelques pas de deux salles d'infirmerie, au fond d'un très long couloir. Ici, ils prendront jusqu'à un kilo par jour. Trois mois plus tard, direction l'abattoir pour ces cochons ayant atteint plus de 100 kg à la fin de la période d'engraissement. Jusque-là, le principe est simple... Des porcelets sont post-sevrés puis engraissés avant d'être abattus quelques semaines plus tard. Mais ici une attention particulière est réservée à l'environnement dans lequel ils sont élevés. À l'intérieur du bâtiment, des laveurs d'air ont été installés pour amoindrir l'odeur dégagée par les animaux, accentuée par les poussières. « L'air extrait des salles, récupéré par une gaine centrale construite sous le toit de chaque bâtiment, est poussé vers le laveur d'air et traverse un rideau d'eau », explique Roland Servant, directeur adjoint, responsable bâtiment et développement chez Cirhyo. Les odeurs piégées au contact de l'eau retombent par gravité dans une fosse située en partie basse du laveur d'air. La présence d'eau et de chaleur induit la formation d'un biofilm sur les filtres dont les bactéries dégradent les molécules d'ammoniac. L'air extrait est ainsi désodorisé pour un investissement colossal de 250 000 euros. Cette somme est rentabilisée par le recyclage de l'énergie permettant de ne dépendre ni du fioul ni du gaz. En effet, une pompe à chaleur récupère les calories de l'eau des laveurs d'air pour les restituer à celle circulant dans le système de chauffage des deux salles. 1 200 places en post-sevrage et 3 528 places en engraissement sont gardées ainsi au chaud.

Un circuit vertueux

Pour réduire les émissions polluantes et olfactives, une fosse couverte par une bâche a également été aménagée à l'entrée de l'élevage du Bugey. L'ouvrage est doté d'un dispositif de contrôle d'étanchéité évitant à l'eau de pluie de venir augmenter les quantités de lisier épandues. « L'ensemble des fosses totalise un volume de stockage de 10 mois », précise Pascal Allabouvette. Le lisier n'est pas épandu mais accumulé sous terre grâce à des enfouisseurs multidisques qui injectent directement le lisier dans le sol. Les molécules ne se dispersent pas dans l'air limitant les mauvaises odeurs et les désagréments au voisinage. Pour aller au bout de sa démarche, l'élevage du Bugey s'est également lancé dans la fabrication d'aliment à la ferme (FAF). « L'idée, c'est de réduire au maximum les déplacements pour qu'on ait tout à portée de main », reprend Robert Jourdan, responsable de Bourg-en-Bresse de la coopérative porcine Cirhyo. Les céréales qui servent à alimenter les animaux sont en partie produites localement. Ainsi, la « soupe » donnée aux animaux est préparée à partir d'un prémélange de pain agrémenté de miel, d'eau, de céréales et de lactose, produits pour la plupart par les « agriculteurs du coin ». « Il n'y a que les tourteaux de soja et de colza que nous ne produisons pas ici », précise Roland Servant. La nourriture est mélangée et stockée dans deux cuves de 50 mètres cubes chacune. Des circuits indépendants permettent de nourrir à la juste quantité chaque lot de porcelets en fonction de leur poids, de leur âge et de leur GMQ, gain moyen journalier. Huit fermes avoisinantes participent au plan d'épandage permettant de remplacer les engrais chimiques par de la fertilisation organique pour leur culture. Les épandages du printemps 2017 ont donné des résultants concluants. Pour la culture de maïs, le lisier a apporté 83 % des besoins en NPK (azote, phosphore et potasse) diminuant de 83 % l'utilisation d'intrants. Des animaux sont nourris aux céréales locales, des céréales locales fertilisées par les déjections animales... Un cercle agronomique vertueux et 100 % naturel. 
Alison Pelotier