Un espoir de lutte efficace contre le carpocapse

La recherche sur la lutte contre le carpocapse est loin d'être terminée. C'est aujourd'hui même l'une des priorités pour la profession. Avec les différentes techniques éprouvées comme le virus de la granulose, la confusion ou le filet Alt'Carpo, les arboriculteurs disposent pourtant de solutions efficaces. Mais, depuis plusieurs campagnes, le ravageur monte en puissance un peu plus chaque année, en particulier en cette période de fin d'été justement, où les seules solutions à mettre en œuvre restent le filet.
Pouvoir réduire la pression
En réalité, le ravageur s'adapte : « Il a une capacité de reproduction très rapide sur la troisième génération et, avec le changement climatique, celle-ci prend de l'ampleur et devient plus virulente. Avec les récoles qui démarrent, la lutte devient alors compliquée, et les producteurs n'ont pas beaucoup de traitements d'appui pour diminuer les populations. Aussi, l'idéal serait de pouvoir réduire cette pression grâce à des parasitoïdes naturels », explique Myriam Berud, chargée d'expérimentation en protection des vergers à la station La Pugère. Investi sur la question de la lutte biologique avec l'introduction d'organismes vivants, l'Inra de Sophia Antipolis avait déjà eu l'occasion, il y a quelques années, de travailler sur Pseudococcus viburni (la cochenille farineuse), aux côtés du GRCeta de Basse Durance et de la station La Pugère.
Plusieurs campagnes de lâchers et de suivis de parasitoïdes sur un réseau de parcelles avaient alors été effectuées, avec de très bons résultats à la clé. On estime d'ailleurs que la régulation de Pseudococcus est en grande partie liée à ces lâchers. Ces habitudes de travail ont été reconduites sur le cas du carpocapse, ravageur contre lequel l'Inra a isolé un parasitoïde intéressant, Mastrus ridens.
Autorisation pour trois ans
Originaire d'Asie Centrale, Mastrus Ridens a d'ailleurs été introduit dans plusieurs pays comme l'Argentine, le Chili, la Nouvelle-Zélande et l'Australie, où il s'est établi avec succès. Efficace dans le parasitisme du carpocapse dans ces vergers, son intérêt l'est tout autant pour les nôtres. Il est donc aujourd'hui l'un des grands espoirs de la lutte contre le carpocapse. L'introduction de cette espèce exotique sur le territoire français a été autorisée par le ministère de l'Agriculture en mai 2017, pour une durée de trois ans. Déposé auprès de FranceAgriMer, mais non retenu dans un premier temps, le projet d'étude de l'Inra sur Mastrus ridens en France est validé depuis cette année.
Le GRCeta et La Pugère sont impliqués avec l'unité de Sophia Antipolis sur des expérimentations spécifiques. Objectif : évaluer le niveau opérationnel du parasitisme de Mastrus ridens en conditions de verger. Des parcelles ont été proposées pour effectuer des lâchers, qui ont d'ailleurs démarré fin août dans la région. Le travail de suivi de la dispersion du parasitoïde, puis de recapture l'année suivante est donc lancé.
Projet régional puis national
La multiplicité des lâchers est la clé de la réussite du projet. Dimensionné au départ à l'échelle de la région, il a été étendu à l'ensemble du territoire français. Ce partenariat plus large concerne par exemple des parcelles en Normandie dans le cadre de la pomme à cidre, mais aussi en Occitanie, avec l'implication du CTIFL et de SudExpé. Les lâchers se feront au total sur une soixantaine de sites répartis sur toute la France.
Les financements de FranceAgriMer vont permettre, dans un premier temps, de pérenniser l'élevage du parasitoïde. Mais, pour augmenter les capacités de celui-ci et réaliser les suivis des différents partenaires sur le terrain, ces derniers espèrent pouvoir s'appuyer sur d'autres contributions financières.
Le rôle de La Pugère et du GRCeta va consister à effectuer des contrôles de dégâts dans les parcelles en suivi, de poser des bandes pièges pour déjà prélever des larves diapausantes et observer si elles sont parasitées par des parasitoïdes naturels déjà présents. Tout ce travail de lâchers et de recensement du parasitisme devrait pouvoir se renouveler encore l'an prochain. En tous cas, la profession fortement mobilisée sur ce projet l'espère fortement. Si les professionnels doivent s'en remettre aux résultats qui vont arriver, il y a beaucoup d'enthousiasme autour de cette très sérieuse piste d'étude.
Emmanuel Delarue
Un parasitoïde spécifique du carpocapse
Dans la recherche de solutions pour lever certains verrous techniques au verger, de plus en plus de techniques se développent et s’orientent vers la prédation des larves de ravageurs. Mastrus ridens est un parasitoïde spécifique du carpocapse qui s’attaque aux larves diapausantes de la fin d’été ou de l’automne en quête de refuges sous les écorces pour passer l’hiver et attendre avant d’émerger au printemps.
E. D.