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Arboriculture

Un joli coup de filet

Les agriculteurs et les fabricants de filets paragrêle, accompagnés d’Adivalor, viennent de mettre en place une filière de recyclage dédiée. Opérationnelle depuis mars, elle est accessible à tous les agriculteurs de France, gratuite selon certaines conditions, de volume minimum notamment. Ensuite recyclés, les filets pourront trouver une nouvelle vie, par exemple comme banc public…

Un joli coup de filet

Jusque-là, il n'y avait pas de solution très satisfaisante pour la gestion des filets paragrêles en fin de vie, si ce n'est la déchetterie. Or, cette solution peut se révéler très coûteuse, en fonction des zones géographiques, avec un coût moyen estimé à 120 euros la tonne. À l'initiative des producteurs, en lien avec les fabricants, une filière de gestion des déchets pilotée par Adivalor, a vu le jour l'an passé. « Dans le cadre des vergers éco-responsables, nous avions déjà intégré la notion de recyclage, des produits phytosanitaires notamment, mais nous n'avions pas de solutions pour les filets », indique Robert-Pierre Cecchetti, président de la commission technique de l'ANPP (Association nationale pommes poires). « Nous avons donc participé aux travaux préalables, et intégré ce point dans la charte, dès qu'il a été opérationnel. » Jean-Noël Fabre, arboriculteur à Mallemort, est producteur de pommes et poires sur environ 20 ha pour chacune de ces espèces. L'intégralité de ses vergers de pommes est pratiquement sous filets. « Dès que l'on plante, on y pense, pour prévoir la pose, explique-t-il. En 22 ans, on a grêlé trois fois. Aujourd'hui, avec le coût des assurances et la situation économique des arboriculteurs, les filets sont une nécessité. » Pour les poires, c'est plus compliqué : « Nous avons des vergers anciens, avec un espacement entre les rangs qui n'est pas adapté au passage des engins ». Les poiriers sont réadaptés petit à petit, « à moins que les machines deviennent plus compactes ». On peut estimer la durée de vie d'un filet entre 8 ans et 15 ans, en fonction de sa couleur (NDLR : les noirs sont plus résistants, notamment pour une question de traitement anti-UV) et du système de pose. Jean-Noël Fabre vient d'enlever 2,5 ha de filets pour surgreffer des poiriers ; une quantité pour l'instant insuffisante pour bénéficier du recyclage gratuit, réalisé à partir 2,5 tonnes, soit environ 5 ha. « Nous proposons des solutions dès le premier kilo, mais ce ne sera pas le même tarif », commente Laurence Durade d'Adivalor, qui conseille aux agriculteurs de s'associer avec un voisin par exemple. Pour bénéficier du retrait gratuit, le producteur doit également enlever tout ce qui n'est pas plastique, enlever les élastiques, retirer les plaquettes de faîtage et réaliser une balle enroulée de préférence, sans mandrin, en bout de champ, accessible par un camion, ce qui facilitera la collecte des filets. Pour l'instant, sont également acceptés le vrac et les ballots ficelés. D'autre part, il faut pouvoir justifier de l'achat d'un nouveau filet APE (Agriculture plastique environnement). Aujourd'hui, 80 % des metteurs en marché, en termes de volumes vendus, sont intégrés à la démarche.

« Les filets m’intéressent particulièrement, car ils ont toutes les caractéristiques que je recherche », explique Christophe Testa, directeur MP Industries, pour l’instant le seul recycleur à récupérer les filets paragrêle.

Comment est financée l'opération ?

Six euros par mètre carré sont imputés sur le prix de vente et reversés par le fabricant à Adivalor. « Cela représente moins de 2 à 3 % du prix d'achat pour le producteur », estime Eve Cantin, du CPA (Comité français des plastiques en agriculture). Le vrai engagement du producteur se situe plutôt dans le démontage des filets, et notamment avec le retrait nécessaire des plaquettes de faîtage, « ce qui ne doit pas représenter plus de 10 % du coût de la dépose », évalue Jean-Noël Fabre. 70 % du financement de l'opération vient de cette éco-contribution, 25 % de la vente des matériaux au recycleur. L'opération ne concerne pour l'instant que les filets paragrêle. Ne sont donc pas concernés les filets insectproof, les paravents, qui représentent des volumes insuffisants, des matériaux différents, et ont donc été exclus dans un premier temps de cette filière de recyclage. Mise en place en octobre dernier, la filière est devenue opérationnelle en mars et « a permis la collecte de 60 tonnes de filets, avec un objectif de 400 tonnes dans les six prochains mois, et 8 000 à 1 000 t/an », évalue Pierre de Lépinau, directeur général d'Adivalor. « La France est championne mondiale du recyclage agricole, rappelle-t-il. 70 000 t de déchets sont collectés chaque année, recyclés à 95 %. » 
Magali Sagnes

 

Les distributeurs : Partenaires de l’initiative Agriculture plastique environnement (APE), six metteurs en marché contribuent aujourd’hui au financement de la gestion de la fin de vie des ficelles et filets qu’ils ont mis en marché : Emis France, Filpack, IDMat, MDB Texinov SAS, SARL Cantagri, et Tesrete SRL.
La liste des marques de produits mis en marché par ces entreprises est consultable sur le site internet APE : rubrique "Plastiques / Marques".

Les bons gestes pour bien recycler
Lors de la dépose, il faut veiller à enlever les élastiques, les plaquettes de faîtage et les fils de fer. Pour limiter la présence de débris végétaux, rouler les filets à la main ou avec un enrouleur mécanique, puis les stocker sur une aire stabilisée. Il faut compter 500 kilos de filets usagés déposés par hectare de culture. Un enlèvement gratuit peut être demandé au fournisseur ou directement à Adivalor à partir de 2,5 tonnes, soit l’équivalent de 5 hectares. n
Formulaire d’enlèvement téléchargeable sur le site Adivalor : www.adivalor.fr/filprau.pdf

 

 

Reclyclage : que deviennent ces filets ?

La prochaine fois que vous vous assoirez sur un banc public, il est possible qu’il soit issu de filets paragrêle.
Les filets, composés de polyéthylène haute densité, prennent la direction de MP industries, seul recycleur en France des filets paragrêle. Dirigée par Christophe Testa et basée à Gardanne (Bouches-du-Rhône), cette entreprise originale est totalement dans le vent de l’économie circulaire. Ici, il a fallu tout inventer : produits, machines, réseau de distribution… Seule l’extrudeuse est standard, le reste du matériel est de fabrication maison. Les filets déchiquetés et réduits en paillettes sont chauffés, transformés en pâte, avant de prendre leur forme définitive. « L’obsession des plasturgistes, c’est d’être le plus fin possible, mais nous non, puisque la matière première ne coûte pas très cher. Nous faisons du massif, voire très massif, des produits très denses, ce qui représente un atout pour l’assemblage et notamment le vissage. Ils résistent très bien dans le temps, notamment aux UV. Un coup de décapeur thermique, et ils retrouvent leur aspect d’origine. » Le mobilier est garanti 10 ans. Il ne se teint pas, un argument très intéressant pour les municipalités, face aux tags. Quelques défauts tout de même : ils ne sont pas ignifugés, donc à réserver à un emploi extérieur, et doivent être renforcés, car les lattes sont relativement souples.
L’entreprise propose également des équipements de protection pour les déchetteries grand public et des produits pour l’industrie (cales pour échafaudage…). « Le polyéthylène peut se recycler indéfiniment, il n’y a pas de pertes de caractéristiques, explique Christophe Testa. Les filets m’intéressent particulièrement, car ils ont toutes les caractéristiques que je recherche. Mais nous ne sommes qu’en phase de démarrage, poursuit-il, espérant que les tonnages vont rapidement augmenter. Aujourd’hui, c’est surtout de communication autour de mes produits dont j’ai besoin. Peu de personnes savent qu’il existe du mobilier urbain 100 % produit recyclé. » M.S.