Une rencontre pour faire avancer les projets d'irrigation

Après la sécheresse de 2017, qui avait conduit à mettre en œuvre des restrictions d'usage de l'eau dans 80 départements de France, Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique et solidaire, et Stéphane Travert, ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation, avaient annoncé, le 2 novembre, le lancement de la « cellule d'expertise sur la gestion de la ressource en eau dans le domaine agricole ». Ses objectifs, avaient-ils précisé, sont « d'examiner les projets en cours, d'identifier les difficultés rencontrées et les solutions, d'améliorer la qualité des projets et d'accélérer leur réalisation ». Selon les deux ministres, il s'agit « de résorber durablement les situations de tension hydrique et associer pleinement les territoires à la politique de gestion de l'eau ». Composée de quatre membres(1) et placée sous la responsabilité d'un ancien préfet, Pierre-Étienne Bisch, cette cellule s'est rendue dans la Drôme le 23 mars, afin de rencontrer les porteurs de projets d'irrigation du département. Ce même jour, étaient également reçus les représentants des structures ardéchoises pour les projets concernant la Vallée du Doux.
L'enjeu de l'irrigation
Les quatre présidents des structures d'irrigation drômoises, à savoir Philippe Breynat pour l'Adarii(2), Robert Klein pour le Sygred(3), Bernard Vallon pour le Sid(4) et Anne-Claire Vial pour la chambre d'agriculture de la Drôme, ont ainsi pu présenter l'enjeu de l'irrigation dans le département. « Avec le changement climatique dans le Sud-Est, c'est une préoccupation majeure », ont-ils souligné. Les projets en cours en matière de substitution dans les prélèvements d'eau pour l'irrigation et les difficultés rencontrées dans l'avancement de ceux-ci ont fait l'objet de longs échanges. C'est le cas notamment du projet de Châteaudouble (voir encadré), retenu par la cellule nationale d'expertise parmi 47 autres projets au plan national, « ce qui semble prouver sa pertinence », se félicitent les présidents des structures d'irrigation drômoises. Un projet qu'ils ont prioritairement présenté.
« Des procédures trop longues, trop coûteuses »
« Nous avons également fait part de la longueur des procédures, relate Anne-Claire Vial, en ce qui concerne les études de faisabilité, la problématique du foncier, les réglementations... Selon les projets, il faut entre sept et quinze ans pour aboutir. Et nous avons exprimé la nécessité d'une cellule départementale pilotée par l'Etat. » D'autres points de blocage ont été évoqués, en particulier le coût des projets. « Des études (sans garantie de réussite) aux travaux, il est nécessaire d'avoir des règles de financements claires et stables, à des taux significatifs, souligne Anne-Claire Vial. Et quid de la cohérence de l'application du débit réservé par la Dreal(5) : quel zonage pour le climat méditerranéen ou sub-méditerranéen du Sud-Drôme ? Cela a-t-il un sens d'appliquer au Sud-Drôme un barème Auvergne-Rhône-Alpes ? », fait-elle remarquer. La question des conclusions des bureaux d'études a aussi été débattue, « ceci pour pouvoir faire avancer les projets efficacement. Car, ajoute Anne-Claire Vial, l'on constate que des dossiers agricoles font l'objet de circonspections en matière de prélèvement d'eau, circonspections qui a contrario ne s'appliquent pas à d'autres acteurs économiques. »
(1) La cellule nationale comprend un représentant du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), un représentant du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), une personnalité qualifiée représentant la profession agricole (Luc Servant, président de la chambre d'agriculture de Charente-Maritime) et une personnalité qualifiée représentant les associations de protection de la nature (Florence Denier-Pasquier, secrétaire nationale de France Nature Environnement).
(2) Adarii : Association départementale des agriculteurs en réseau d'irrigation individuel.
(3) Sygred : Syndicat de gestion de la ressource en eau dans la Drôme.
(4) Sid : Syndicat d'irrigation drômois.
(5) Dreal : direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement.
L'irrigation en Drôme
42 000 ha irrigués en 2010, soit 21 % de la SAU drômoise, ce qui représente 30 % des surfaces irriguées de la région Auvergne-Rhône-Alpes.
80 % des surfaces sont irriguées par des structures collectives et 20 % en irrigation individuelle.
Irrigation /
Les derniers projets en Drôme

• 2006 : réserve de Juanon (700 000 m3) pour substitution sur le bassin de la Drôme (330 ha).
• 2016 à 2019 : alimentation d'Allex-Montoison par l'eau du Rhône pour substitution sur la basse vallée de la Drôme (460 ha).
• 2018 à 2019 : projet d'agrandissement de la réserve de Choméane (basse vallée de la Drôme).
• 2017 à 2018 : trois projets de réserve individuelle dans le Sud-Drôme.
• 2017-2018 : avant-projet « Haut de Provence rhodanienne » (lire page 7).
Projet de Châteaudouble /
Historique du projet
• 2012 : étude de faisabilité portée par le Sid avec étude hydrologique (suivi des débits).• 2013 : acquisition du foncier pour réaliser une réserve.
• 2014 : rencontre avec les irrigants en vue des pré-souscriptions destinées à dimensionner le projet.
• 2013 à 2016 : conflit avec l'Asa du canal de la Martinette.
• 2016 - 2017 : rendu de l'avant-projet détaillé.
• 2018 : valeur du débit réservé fixé par la DDT.
• Mars 2018 : présentation du projet aux irrigants.