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la caverne du Pont-d’Arc

Une réplique pour l'humanité

patrimoine / Découverte il y a 20 ans, la grotte Chauvet - classée patrimoine mondial par l'Unesco - non accessible au public pour des raisons évidentes de conservation, a désormais sa réplique, tout proche de l'authentique. Inaugurée par le président de la République, la Caverne du Pont-d'Arc ouvre ses portes au public samedi 25 avril après 30 mois de travaux.
Une réplique pour l'humanité

Il y a 36 000 ans, avant les réseaux sociaux, les hommes laissaient déjà des messages sur un mur. La grotte ornée découverte à Vallon-Pont-d'Arc le 18 décembre 1994 par trois spéléologues amateurs (1) avait créé un véritable séisme dans le monde de l'art pariétal. Au point que Jean Clottes, préhistorien appelé par le ministère de la Culture pour authentifier les œuvres, entre Noël et le jour de l'An, avait cru d'abord à une affabulation.

La grotte originale, classée au patrimoine mondiale de l'humanité par l'Unesco en juin 2014, compte 1 000 dessins dont 425 figures animales tirées de 14 espèces.
« On m'annonçait une dizaine de représentations de rhinocéros, or on en connaissait que 20 dans le monde entier. » Mais il dut se rendre à l'évidence.
La grotte Chauvet est unique pour ses dessins. « Ces hommes avaient inventé la peinture, l'autoportrait et la bande dessinée en quelque sorte », affirmait François Hollande le jour de l'inauguration. Elle l'est aussi pour l'âge de ceux-ci. Il s'agit tout simplement de la plus ancienne représentation artistique humaine, deux fois plus vieille que les peintures de Lascaux.

350 000 visiteurs par an attendus

Mais ce message de la nuit des temps aurait bien pu ne jamais être partagé avec le public. Avant le projet actuel, deux autres ont échoué. « Mauvais choix de terrain, d'équipes, manque de financement », explique Pascal Terrasse, député et actuel président du syndicat mixte, véhicule juridique fondé par la Région Rhône-Alpes et le Département pour monter le projet. En 2008, les acteurs locaux sont en effet repartis de zéro. Le budget évalué alors à 47 millions d'euros atteint finalement 55.
« On ne l'a pas explosé, contrairement à d'autres grands projets culturels... », se félicite l'élu.
Dans quelques jours, la Caverne va devenir un site touristique majeur. Pas moins de 350 000 visiteurs sont attendus par an, 4 000 par jour en haute saison. En plus des 70 emplois directs créés, les retombées économiques seront significatives, de 60 ou 70 millions d'euros par an, selon Pascal Terrasse. Joli coup de pouce au PIB ardéchois !

L'aurignacien, notre ancêtre pas si lointain

Si la véritable grotte s'étend sur environ 7 500 m2 au sol, la réplique n'en atteint qu'à peu près la moitié mais reste la plus importante du genre au monde. Toutes les plus belles figures, à l'échelle 1, mais aussi les concrétions géologiques spectaculaires et les ossements d'animaux ont été reproduits. Les reliefs des parois sont restitués au millimètre jusqu'aux coups de griffes laissés par les ours. Un souci du détail qui force l'admiration et laisse imaginer l'exploit technique, pour ne pas dire technologique, qui a été nécessaire pour arriver à un tel résultat. Chaque étape a été validée par un comité scientifique pour s'assurer de ne pas trahir la réalité historique. La température, l'hydrométrie, l'obscurité et les odeurs, tout a été fait pour se rapprocher des conditions d'une véritable grotte, y compris le silence, obtenu au prix de gros efforts d'isolation sur la ventilation. La caverne est volontairement restée vierge d'explications afin de laisser place à l'émotion. Pour comprendre, il faut se rendre dans la galerie de l'aurignacien, du nom de l'homme qui vivait à cette époque. Première surprise, il est très proche, à 90 %, de l'homme du XXIème siècle. La muséographie, très interactive, invite à comprendre son environnement : le climat, les animaux qu'il côtoyait. On apprend aussi pourquoi cette caverne est restée si longtemps cachée et quelles étaient les techniques des artistes et leurs conditions de « travail ».
Le 25 avril, un public très international est attendu sur le plateau du Razal. Pour tous ceux qui ne pourront se déplacer en Ardèche, une réplique
virtuelle, « Chauvet 3 », est en projet. « Aujourd'hui, ce bébé nous échappe, nous le livrons au monde. Car la grotte n'appartient ni à l'Ardèche, ni à la France mais à l'humanité », conclut Hervé Saulignac. 
D. B.
(1) : J-M.Chauvet, C.Hillaire, E.Brunel

 

Info pratiques
Prix d'entrée 13 euros (demi-tarif pour les enfants 10-17 ans)
Ouverture : tous les jours (jusqu'à 20h30 en juillet-août)
Tél. :  04 75 94 39 40
www.cavernedupontdarc.fr

 

 

Avant même la découverte de la grotte, l'Ardèche, méridionale principalement, était une « marque » touristique attractive. Un statut qui devrait être largement conforté et amplifié par la Caverne.
Une chance pour l'Ardèche
La route qui mène au plateau du Razal n'est pas très large mais les élus ne craignent pas l'afflux de véhicules. « L'Ardèche reçoit déjà 2,5 millions de visiteurs par an. Deux-tiers des visiteurs de la Caverne seront déjà sur place. Ce sera 4 % de trafic en plus, ça ne se verra pas », assure Hervé Saulignac. En matière d'hébergements, le président du conseil départemental regrette de n'avoir pu attirer de nouveaux acteurs. « Nous avons un déficit d'environ 250 lits en 3 étoiles, estime-t-il, et nous sommes un peu justes en hébergements de groupes malgré des travaux à Vogüé et bientôt à Salavas. »Mais les bonnes nouvelles sont plus nombreuses que les inquiétudes.« Nous sommes connus pour notre offre nature. Désormais, nous serons aussi une destination culturelle », se réjouit le président du Département. Le profil des visiteurs sera sûrement différent, avec un pouvoir d'achat supérieur.Au restaurant de la caverne, on mangera ardéchoisLe site du Razal n'a pas été choisi par hasard. Il offre un panorama merveilleux, comme une invitation aux touristes à poursuivre leur escapade. Un espace a été prévu pour promouvoir l'Ardèche dans son ensemble, avec la volonté de convaincre les excursionnistes de revenir dans le département.Côté restaurant, 500 couverts par jour attendus en pleine saison, l'Ardèche sera aussi à l'honneur. « Pour être en accord avec la qualité du site, nous ne pouvions que proposer une restauration de qualité. Nous avons mis en lien les professionnels de l'agriculture avec le gestionnaire. » Concrètement, c'est à « Ardèche le goût » (1) qu'a été confiée la mission de se rapprocher de Sodexo et sa filière prestige dès 2011. Objectif visé, mais qui sera difficile à atteindre : assurer un approvisionnement à 75 % local, c'est-à-dire ardéchois et à défaut, rhônalpin. La Sodexo attend qualité des produits mais aussi du service. Elle a lancé un appel d'offres en privilégiant les offres organisées, la disponibilité, les produits sous démarche de qualité. Sur 50 candidatures, une vingtaine a été retenue. Et pour profiter de cet élan, « Ardèche le goût » entend maintenant convaincre les autres restaurateurs du secteur de s'approvisionner local et de proposer des menus ardéchois. C'est aussi ça, l'effet Chauvet... (1) : « Ardèche le goût » est une association qui a pour mission de promouvoir la gastronomie et l'agroalimentaire ardéchois. Elle a été fondée par les trois chambres consulaires.