« C'est vrai que cela nous a causé pas mal de soucis », lâche d'emblée Alain Freyssin (Ferme de Besantie). Mais il n'en est pas peu fier : l'installation serait unique dans le département. Ce vendredi 27 avril, en fin de matinée, cet exploitant a inauguré de nouvelles serres équipées de panneaux photovoltaïques. Un investissement de trois millions d'euros, dont les coûts ont été supportés par la Générale du solaire. Bien que créée en 2008, cette société signe là son premier investissement dans une serre agricole. Alors, autant dire que l'entreprise attend beaucoup des remontées du terrain afin de faire évoluer ce produit et trouver ainsi un meilleur consensus entre production d'énergie et projet agricole. La Générale du solaire, dont le siège est à Paris, compte néanmoins une autre référence en Drôme, à savoir le centre commercial Saint-Paul, à Saint-Paul-lès-Romans.

Un bâtiment résistant aux rafales de vent

Alain Freyssin s'est installé en 1981 sur les terres familiales. Mais, au fil des années, il a souhaité se concentrer sur la production de fraises et la commercialisation en vente directe.

« Il y a cinq ans, la Générale du solaire a pris contact auprès de moi pour envisager de recouvrir les toitures des bâtiments existants de la ferme en panneaux photovoltaïques, raconte ainsi Alain Freyssin. Au cours des négociations, j'ai évoqué l'idée de la construction d'une serre. » D'autant que l'exploitant en avait assez des tunnels plastiques qui s'envolaient à cause des rafales de vent.
Après la phase administrative est venu le temps des travaux. Ceux-ci se sont déroulés en 2017, sur une durée de six mois. D'une superficie de 11 000 m2, la serre est recouverte de 4 100 panneaux solaires. Certains sont également disposés sur le toit d'un bâtiment de stockage. La puissance photovoltaïque installée est de 1,7 Mwc (megawatt-crête). La production annuelle attendue est de 2 250 Mwh, soit la consommation de 750 foyers. Le toit n'est pas uniforme : il est en effet composé de dix chapelles (117,8 mètres de long, 9 mètres de large). Les rampants, orientés vers le sud, sont inclinés à 11 degrés. Ceux qui le sont vers le nord, à 47 degrés. Ces derniers peuvent par ailleurs être ouverts automatiquement. Un ordinateur de contrôle veille en effet au taux d'hygrométrie ainsi qu'à la température. Une alternance entre panneaux solaires et translucides permet de répartir l'ensoleillement sous la serre. Enfin, concernant les matériaux, les panneaux solaires sont en silicium monocristallin d'une puissance unitaire de 315 Wc; le restant étant en PVC translucide monocouche. L'ensemble est monté sur une structure en acier galvanisé ; la fixation au sol est réalisée par des vis à deux mètres de profondeur.
L'électricité est ensuite transformée via des onduleurs et injectée dans le réseau d'Enedis. Vendredi, les élus présents n'ont pas manqué de féliciter la réalisation et l'ambition d'un tel projet. Dans l'assistance, des agriculteurs et des professionnels, s'étaient aussi déplacés afin de voir la réalité des productions présentes sous les panneaux. L'exploitant, qui possède un point de vente directe, compte en tout cas montrer ce nouvel équipement à ses clients. Un chemin d'accès a spécialement été créé pour ce faire.

A. T.

Production / La majeure partie de la serre a été louée à un jeune agriculteur.

Des fraisiers et des pommes de terres sous la serre

Nicolas Juven est domicilié à Saint-Bonnet-de-Chavagne, en Isère. Il souhaite à court terme s'installer à Vaunaveys-La-Rochette. Il exploite également des terres sur Chabeuil, Charpey et Eurre (environ 30 ha au global). La Ferme de Lassagne possède aussi une activité d'élevage de pigeons à Saint-Hilaire-du-Rosier (Isère).

En raison de problèmes de santé, Alain Freyssin a, au fil des mois, revu son projet. L'exploitant a ainsi conservé certains tunnels plastique mais n'occupe environ que 1 000 m2 sous la serre pour y produire des fraises hors-sol « pour des expérimentations. Je commence déjà à modifier les choses, précise-t-il. Je suis passé en mono rang. Il y a aussi un problème d'assimilation de la photosynthèse. » Le restant a été loué à Nicolas Juven (Ferme de Lassagne). Âgé de 20 ans, celui-ci y produit des pommes de terres (Délicatesse) sur une surface de 7 500 m2, ainsi que des tomates et des courgettes. Le jeune exploitant s'y est installé dès la fin du mois de décembre. « Nous avons connu des problèmes de tassement mais le principal reste l'ombre et l'ensoleillement car une partie des surfaces est tout le temps à l'ombre », explique t-il. « Les pommes de terres poussent de travers, à la recherche de la lumière. Il y a un bout ensoleillé, c'est toujours à l'ombre au milieu », ajoute son salarié.

Des idées pour améliorer l'ensoleillement

Le jeune homme souhaiterait, par exemple, que certains panneaux puissent être décalés et que des puits de lumière soient créés. D'autant plus qu'une partie de la production est contractualisée auprès d'opérateurs, comme HDC Lamotte ou Canavese. Il reste cependant confiant. Il faut dire qu'avec ces serres, Nicolas Juven souhaite planter et commercialiser des produits au plus tôt. « Aujourd'hui, les consommateurs ne veulent plus attendre. Il faut donc être là dès le début, là où les prix sont les plus élevés », indique-t-il aussi.