Vers une maîtrise passagère de la production

Chez Eurial, tout s'annonçait pourtant bien. « Avant la crise du Covid-19, les marchés étaient très dynamiques et nous enregistrions de bonnes progressions », analyse Pierre-Jo Aufranc, éleveur caprin lait à Ouroux (Rhône) et vice-président métier lait de chèvre au sein de la coopérative. « Nous attendions cette année une grosse production, grâce à de bons fourrages et des chèvres qui répondent bien », complète-t-il. Pour faire face à la crise sanitaire, Eurial a pourtant dû adapter ses outils industriels et mettre en place des mesures de protection de ses salariés. Conséquence : la productivité a chuté, alors « que nos outils sont en adéquation avec les volumes de production », précise Pierre-Jo Aufranc. Malgré un taux d'absentéisme de 20 %, « les salariés sont volontaires et ingénieux, on espère passer les 15 jours qui viennent », insiste le producteur. Dans un contexte qui s'annonçait pourtant favorable, le responsable sait que l'ensemble de ses adhérents devront, eux aussi, faire un effort pour écrêter le pic de production, par des baisses de concentrés ou des réformes sanitaires, Les producteurs fermiers (pratiquant également la vente directe) sont appelés à respecter leur contrat, c'est-à-dire à ne pas livrer plus de lait faute de débouchés en circuits courts. « Nous savons que nos producteurs jouent le jeu et que nous leur demandons un effort collectif. Mais il y aura une sortie de crise et nous aurons, à ce moment-là, besoin de lait », explique Pierre-Jo Aufranc. Du côté des marchés, si Eurial a perdu ses débouchés en RHD et constate une baisse de la demande de fromages à la coupe, « nous avons pu réorienter notre lait sur des segments de marché en GMS et produits de grande consommation », assure-t-il. « On vit au jour le jour, nous savons qu'il y aura de la perte », se raisonne Pierre-Jo Aufranc, qui note une grande solidarité entre producteurs et salariés depuis le début de la crise.
Sébastien Duperay