Volailles : vers la valorisation des poussins mâles
Au 1er janvier 2022, l’élimination des poussins mâles d’un jour sera interdite en France. Face à l’évolution de la réglementation, la filière avicole cherche des solutions et travaille notamment sur le potentiel de souches à double fin en poules pondeuses et poulets de chair.

Pour répondre aux attentes sociétales et aux évolutions réglementaires, la filière volailles doit s’adapter. Ainsi, au 1er janvier 2022, l’élimination des poussins mâles d’un jour de souches destinées à la ponte sera interdite sur le territoire, faisant apparaître un double enjeu : d’une part, maintenir une production d’œufs de consommation suffisante, d’autre part, avoir une production de chair intéressante pour valoriser les mâles comme poulet de consommation. Pour cela, la filière a lancé le projet européen Ppilow1 coordonné par l’Inrae (2019-2024). Il implique les acteurs des chaînes de production, des citoyens et des scientifiques, afin de proposer, par le biais d’une approche participative, des leviers d’amélioration du bien-être animal en élevage. Ainsi, la gestion des poussins mâles est à l’étude. L’Itab (institut technique de l’agriculture biologique) a en charge une action visant à proposer des stratégies de sélection et d’élevage qui éviteront l’élimination des poussins mâles de souche ponte. Au-delà du sexage des œufs, un travail est actuellement réalisé sur des souches mixtes à double fin en poules pondeuses et poulets de chair, en partenariat avec différents acteurs de la filière.
Équilibre et compromis
Pour Michel Ferriz (La Basse Cour Bio), éleveur de volailles de chair et poules pondeuses à Chaponnay (Rhône), son objectif est triple : au-delà de l’adaptation aux attentes sociétales, l’éleveur souhaite pouvoir valoriser les poules de réforme et allonger la période de ponte pour diminuer les coûts de mise en place. Son homologue Boris Saenger (La Ferme des Rivons), éleveur à Leschères (Jura) a, quant à lui, exprimé sa volonté d’être plus indépendant vis-à-vis des couvoirs mais aussi de promouvoir l’élevage des mâles plutôt que de les éliminer. Il se veut être un fer de lance dans cette nouvelle pratique pour encourager les éleveurs à passer le cap. Par ailleurs, il évoque la possibilité de développer une production locale de poulettes, une valorisation intéressante qui permettrait ainsi de limiter la segmentation de la filière. Des axes de travail majeurs qui pourraient s’avérer prometteurs. Selon Brieuc Desaint, chargé de mission à l’Itab, il s’agit avant tout « d’un équilibre à trouver au sein d’un atelier mixte » : cette nouvelle pratique consisterait ainsi à élever tous les poussins au sein du même élevage puis les diviser sur les ateliers chair et œuf, en fonction du sexe. Cela demande toutefois des compromis, notamment en termes d’âge d’abattage (autour de 110 à 120 jours) et d’un taux de ponte avoisinant les 75 %.
Quelles perceptions pour le consommateur ?
Les filières vont devoir s’organiser pour équilibrer la balance entre production de chair et d’œuf (durée d’élevage, poids, indice de consommation, âge d’abattage plus tardif, réorientation vers la découpe, taux de ponte suffisant, bonne longévité, etc.). Dans ce contexte, le projet Ppilow permet d’étudier des types génétiques différents, testés dans des fermes expérimentales en Allemagne et au Danemark depuis deux ans et en France depuis peu. Les analyses devraient rendre leurs résultats fin 2022 (pour les poulets) et début 2023 (pour les pondeuses). Ainsi, il faudra encore patienter quelques années pour trouver des volailles de souches à double fin – issues du projet européen – dans les élevages du territoire national. « La filière fait face à de fortes attentes sociétales quant à l’élimination des poussins mâles. Mais la question est désormais de savoir quelles perceptions le consommateur aura-t-il face à ces nouvelles pratiques et quel surcoût est-il prêt à assumer… », conclut le chargé de mission à l’Itab.
Amandine Priolet
1. Poultry and PIg Low-input and Organic production systems’ Welfare.