ZNT : une charte détaillée pour rassurer les agriculteurs

Suite à l'arrêté ministériel du 27 décembre 2019 relatif aux mesures de protection des personnes lors de l'utilisation de produits phytopharmaceutiques, la chambre d'agriculture de la Drôme a dû retravailler la charte des riverains signée en octobre dernier pour la mettre en conformité. Les responsables de la chambre avaient prévu d'aller à la rencontre des agriculteurs pour leur présenter cette charte des riverains et les différentes conséquences qui en découlent. Plusieurs réunions étaient programmées jusqu'au 1er avril. Mais, en raison de l'épidémie de coronavirus, les autres réunions de secteur prévues sont annulées.
« Dans le département, nous ne sommes pas restés inactifs. Dès 2018, nous avons engagé un travail sur les phytosanitaires pour faire face à la pression des ONG environnementales », a indiqué Régis Aubenas, élu référent à la chambre d'agriculture de la Drôme, devant la vingtaine d'agriculteurs présents à la réunion organisée le 11 mars à Cléon-d'Andran. Il convient donc aujourd'hui de retravailler la charte signée en septembre dernier : « C'est un document politique, qui n'a pas de portée juridique. La charte que nous élaborons actuellement est un acte qui aura une valeur réglementaire et encadrera l'utilisation des produits phytosanitaires », a souligné Olivier Durant, chef de service à la chambre d'agriculture de la Drôme.
Pour une réduction des distances de traitement
Un accord politique d'un côté, et donc une charte d'engagement à venir de l'autre. Pour autant, tous les départements ne sont pas obligés de rédiger une charte. Dans ce cas, les concernés devront appliquer, mot pour mot, les réglementations nationales. La chambre d'agriculture de la Drôme a souhaité, quant à elle, franchir le pas pour soutenir la profession.
Ainsi, les intervenants ont présenté les diverses propositions qui seront soumises ultérieurement à la validation (ou non) du préfet. Cette charte devra respecter un certain nombre d'éléments, rendus obligatoires par le décret. Premièrement, les modalités d'information des résidents se feront via un portail internet de la chambre d'agriculture comprenant le calendrier des périodes prévisionnelles de traitement, la liste des principales molécules utilisées et la finalité du traitement et les bulletins hebdomadaires de santé du végétal édité par la Draaf*.
D'autre part, cette charte prévoit la réduction des distances en cas d'utilisation des techniques prévues à l'annexe n°4 de l'arrêté (matériels spécifiques anti-dérive : buses ou filets). Ainsi, en cas d'approbation de la charte, les ZNT de 20 mètres ne pourront faire l'objet d'aucune dérogation. En revanche, pour les grandes cultures, la distance pourrait être réduite de 5 à 3 m en cas d'utilisation de buses anti-dérive d'efficacité à 66 % ou plus. Il en va de même pour l'arboriculture et la viticulture (de 10 à 5 m) si le matériel utilisé réduit la dérive de 66 % ou plus. « Pour autant, il conviendra de toujours tenir compte des recommandations des autorisations de mise sur le marché (AMM), les étiquettes des produits phytosanitaires faisant foi », a poursuivi Olivier Durant.
Quid des zones attenantes ?
Par ailleurs, ce document donne l'opportunité de définir les termes obscurs du décret. Dans ce domaine, et pour le respect des ZNT, la définition de « zones attenantes aux bâtiments habités et aux parties non bâties à usage d'agrément contigües à ces bâtiments » a été clarifiée. « Les parties non bâties à usage d'agrément sont des zones de loisirs telles que les piscines, chemins ruraux et/ou de randonnée... », a prévenu Simon Salvador, agent foncier à la chambre d'agriculture. D'autre part, pour répondre aux plans de lutte obligatoire, notamment contre la flavescence dorée, des dérogations supplémentaires devraient être accordées : dans ce cas, les viticulteurs pourraient ainsi traiter en limite de propriété.
Enfin, seront insérées les modalités de dialogue et de concertation : en cas d'échec de dialogue préalable entre l'agriculteur et le riverain, une cellule communale de conciliation à l'initiative du maire sur sollicitation de l'une des deux parties pourra être mise en place. En cas de persistance des désaccords, une commission départementale supervisée par le préfet pourrait permettre de trouver une solution au conflit en préalable à tous recours contentieux.
Des obligations et des sanctions en cas de non-respect
Si la possible entrée en vigueur de cette charte des riverains vise à sécuriser les pratiques des agriculteurs, ces derniers devront toutefois faire face à des obligations. Par exemple, l'agriculteur aura l'obligation de disposer d'un exemplaire de la charte d'engagement lors des traitements (au minimum dématérialisé). Un non-respect de la charte sera sanctionnable à hauteur de six mois d'emprisonnement maximum et 150 000 € d'amende. Aucun accord ne sera possible entre particuliers pour déroger à ces zones de non-traitement. Enfin, seule l'administration sera chargée de faire respecter la charte. Une présentation qui a entraîné de nombreuses discussions dans l'assemblée : compensations économiques oubliées, coûts des matériels anti-dérive, gestion des bandes enherbées, pression de plus en plus forte de la part des riverains...
Cette charte d'engagement est soumise à la consultation publique du 20 mars au 20 avril, à retrouver uniquement sur le site internet de la chambre d'agriculture (voir ci-dessous). « J'incite fortement les agriculteurs à s'exprimer et à faire leurs remarques lors de cette enquête publique. », a insisté Olivier Durant.
Après synthèse des observations, la charte sera transmise au préfet de la Drôme début mai pour une validation sous deux mois. Elle pourrait ainsi entrer en vigueur début juillet, au plus tard. En attendant, les agriculteurs devront respecter les réglementations prises par l'arrêté ministériel.
Amandine Priolet
* Draaf : direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt.
Charte des riverains / Agriculteurs, agricultrices, donnez votre avis, participez à la consultation
Dans la suite des récentes évolutions réglementaires, la chambre d’agriculture lance une concertation publique sur un projet de charte d’engagement destinée à poser les règles d’utilisation agricole des produits phytopharmaceutiques à proximité des zones habitées dans le département de la Drôme. Ce travail s’insère dans la suite de la démarche initiée en octobre 2019 avec la signature d’une première « charte des riverains et des usagers des espaces ruraux ».Pour donner votre avis, rendez-vous sur le site internet de la chambre d’agriculture de la Drôme : www.drome.chambre-agriculture.fr
Votre avis et participation sont essentiels en tant qu’utilisateurs directs. La consultation débute ce vendredi 20 mars et se terminera lundi 20 avril.