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Couverts végétaux en lavande : une pratique à affiner

A Aouste-sur-Sye, la rencontre organisée par la chambre d'agriculture sur les couverts végétaux, le 28 janvier 2021, a porté sur une implatation en inter-rangs dans une parcelle de lavande de type maillette, conduite en agriculture biologique.

Couverts végétaux en lavande : une pratique à affiner
Manuel Faure, agriculteur à Aouste-sur-Sye,a implanté un couvert végétal dans sa lavanderaie.

C’est sur l’exploitation de Manuel Faure que se sont réunis une trentaine d’agriculteurs et les conseillers de la chambre d’agriculture de la Drôme. « Tout type de couvert végétal réduit de 50 % les symptômes du dépérissement de la lavande », souligne Pierre Battail, conseiller en plantes à parfum, aromatiques et médicinales (Ppam). Mais ce n’est pas pour cette raison première que Manuel Faure a fait le choix des engrais verts dans ses parcelles. « Dans un premier temps, j’ai souhaité implanter des couverts végétaux dans mes parcelles de lavandes pour lutter contre l’érosion », signale l’exploitant agricole. A la plantation de ses lavandes en 2017, l’agriculteur a implanté rapidement un mélange de ray-grass, fétuque et trèfle. « Les couverts ne sont pas montés très tôt en termes de végétation et n’ont pas eu d’effet barrière contre le dépérissement, que j’ai subi en masse. Cela s’explique-t-il par un retard de développement du couvert ? », s’interroge Manuel Faure. Il aura fallu attendre l’année N+1 pour bénéficier d’un couvert convenable. 

Implanter les couverts avant la culture ?

Les dégâts étaient importants la première année, avec près de 40 % de perte. « L’un des enseignements est la nécessité de mettre en place le couvert le plus tôt possible, dès le premier été. Si la parcelle commence à être infectée par la cicadelle, la réussite sera moindre », explique Pierre Battail. L’idée de semer le couvert végétal, avant même la plantation, a donc émergé. « Il conviendrait alors d’ouvrir les rangs de façon mécanique. Un essai est justement en place sur la station expérimentale de Mévouillon (26), sur une parcelle d’origan en agriculture biologique dont la première récolte se fera cette année », prévient le conseiller. 


Dans un autre domaine, les couverts végétaux peuvent venir concurrencer les cultures (compétition hydrique, par exemple). Les couverts ont-ils un effet négatif sur le rendement ? Là encore, la question mérite d’être posée. Les problèmes de dépérissement auxquels a dû faire face l’agriculteur d’Aouste-sur-Sye ne permettent pas de dresser un bilan significatif sur le rendement réalisé. La réflexion peut aller plus loin : serait-il préférable, pour un exploitant, d’accepter de perdre en rendement tout en pérennisant sa culture dans le temps ? 

Quid du matériel de broyage ?

Enfin, une autre problématique entre en jeu : celle du broyage des engrais verts. « Il n’y a pas beaucoup de constructeurs qui proposent des matériels pour broyer les couverts. Pour mes 6 ou 7 hectares de lavande et lavandin, investir dans un broyeur ne serait pas judicieux en termes de coût », déplore Manuel Faure. Un investissement mutualisé, utile à un groupe d’agriculteurs, serait dans ce cas plus pertinent. Prêt à essayer de nouvelles méthodes, il a même pris le pari de faire pâturer son petit troupeau de brebis au milieu de son champ de lavande. Un échec, avec l’écrasement des plants et les déjections, propices au développement des mauvaises herbes sur le rang. 
Pour ses futures plantations, Manuel Faure ne sait donc pas encore s’il prendra le parti d’enherber ses parcelles. « Cela dépendra du matériel de broyage disponible », dit-il. 


Jusqu’à présent, pour l’entretien de ses couverts, l’agriculteur utilise un enjambeur à lavande de marque Grenier Franco. Pour éviter de détruire le couvert, il a adapté sa bineuse en retirant des dents. De plus, pour désherber plus efficacement sur le rang, Manuel Faure a installé, sur sa bineuse, des ailes batelières. 

Amandine Priolet

MERCI, pour gérer au mieux la fertilisation

Le sujet des couverts végétaux est régulièrement étudié par les techniciens de la chambre d’agriculture de la Drôme. Sur une parcelle de vesce commune d’hiver appartenant à l’EARL Les Préalpes, à Mirabel-et-Blacons, Mikael Boilloz, conseiller légumes et grandes cultures, a récemment testé la méthode MERCI. Cette méthode d’estimation des restitutions par les cultures intermédiaires permet, grâce à un prélèvement au champ, de démontrer l’intérêt agronomique, économique et environnemental des couverts végétaux. L’agriculteur doit ainsi saisir, sur une application internet gratuite (http://methode-merci.fr), un certain nombre d’informations (matière sèche recueillie, type de sol, surface occupée par le couvert, réserve utile du sol, gestion des résidus, type d’espèces, etc.). L’analyse de ces données permet de renseigner l’agriculteur sur le total d’azote piégé et les restitutions du couvert au sol disponibles pour la culture suivante. « La méthode permet d’évaluer l’impact du couvert végétal sur le sol en vue de la prochaine plantation et des futurs apports à prévoir », conclut Mikael Boilloz. Pour exemple, l’EARL Les Préalpes, conduite en agriculture biologique, pourra au printemps faire l’impasse d’ajout d’engrais organique en vue de sa future rotation. Le duo d’agriculteurs a prévu d’y implanter du tournesol, peu demandeur en azote. La culture pourra ainsi se contenter des apports mobilisés et produits par le couvert de fabacées. 

Amandine Priolet