Plus de 2 000 moutons sur les Champs-Élysées
Les Champs-Élysées ont retrouvé le temps d’une après-midi leur vocation agricole en accueillant plus de 2 000 moutons. Avec l’objectif de faire rentrer la transhumance dans le patrimoine immatériel de l’humanité.

Ambiance très champêtre sur les Champs-Élysées ce dimanche 6 mars. En guise de clôture du Salon international de l’agriculture, ce sont plus de 2000 brebis, béliers et agneaux qui ont défilé sur la plus belle avenue du monde pour porter haut les couleurs des Pyrénées. Plusieurs milliers de Parisiens se sont massés tout le long du parcours, entre l’Arc de Triomphe et le rond-point où trônent les statues de Charles de Gaulle et de Georges Clemenceau.
Pour accompagner cette transhumance qui est à la fois une nécessité et un art de vivre dans les massifs français, de nombreuses animations ont émaillé le parcours. Les badauds ont pu reconnaître le Béarnais Henri IV sur son fier destrier blanc. A lui tout seul, ce roi de France incarne la souveraineté alimentaire en ayant popularisé la poule au pot qu’il souhaitait voir trôner tous les dimanche sur les tables françaises. Son ministre, Maximilien de Béthune, duc de Sully, ne disait-il pas que « pâturage et labourage sont les deux mamelles de la France » ? Les Parisiens ont pu également admirer de nombreux représentants d’associations folkloriques et accompagner, pour les plus téméraires, quelques chants polyphoniques. Ce défilé de moutons était accompagné d’attelages de bovins et d’équins issus des cinq massifs français qui pratiquent encore l’art ancestral de la transhumance : Pyrénées, Alpes, Corse, Vosges et Massif Central.
Une identité forte
C’est d’ailleurs cette cause que les agriculteurs sont venus défendre. Un dossier a en effet été déposé en mars 2019 pour que cette pratique soit reconnue au patrimoine immatériel de l’humanité auprès de l’Unesco. Il a déjà franchi une étape importante en juin 2020 après avoir été accepté par le comité du patrimoine ethnologique et immatériel (CPEI). Chaque année, ce sont plus de 1 000 troupeaux qui montent dans les estives pyrénéennes. Environ 300 tonnes de fromages y sont produites.
Selon les termes du maire de Laàs, Jacques Pédehontaà, à l’initiative de ce rassemblement, « ce sont 7 000 ans d’histoires entre l’homme, les animaux et la montagne qui ont créé une identité forte. Une identité qu’il faut préserver ». Comme l’avait indiqué le sénateur Max Brisson (LR, Pyrénées-Atlantiques) et président de l’Agence d’attractivité et de développement touristique Béarn-Pays basque, lors de la conférence de presse de présentation, « les traditions sont aujourd’hui un signe de modernité ». Les Parisiens ont pu vérifier concrètement que les territoires agricoles et ruraux existaient, qu’ils étaient bien vivants et dynamiques.
Christophe Soulard
Les enjeux d’une reconnaissance
Selon le Collectif des races locales de massif (Coram) qui porte le dossier de la transhumance à l’Unesco, cette reconnaissance permettra « non pas de figer une pratique » mais au contraire « de la maintenir, la valoriser et la promouvoir de façon durable. ». Il s’agit concrètement de :
- valoriser les savoirs et savoir-faire associés à la transhumance à l’échelle du territoire français ;
- identifier et faire connaître les pratiques des communautés humaines concernées et les relier aux enjeux sociétaux du pastoralisme ;
- comprendre et sauvegarder les modes de transmission des savoir-faire et savoir-être (traditions, coutumes, règlementations sur le travail, le transport, l’environnement), dans une société en évolution ;
- créer du lien et une nouvelle osmose à l’échelle nationale pour répondre aux enjeux techniques, économiques, sociétaux et environnementaux des communautés pratiquant la transhumance.