Installation : le parcours atypique de Tybo Chastel
À 24 ans, Tybo Chastel s’est installé en Gaec avec la famille Fraud, sur les hauteurs de Solaure-en-Diois. Ancien carrossier, il a raconté son parcours lors d’une visite de son exploitation organisée par les Jeunes agriculteurs
le 9 février dernier.

Du haut de ses 24 ans, Tybo Chastel a la tête sur les épaules. Installé en 2022 en Gaec avec Jean-Pierre Fraud, mais aussi Aude Fraud comme conjointe collaboratrice et Elsa Fraud comme aide familiale, le jeune Diois, originaire de Menglon a un parcours singulier, hors cadre familial. « Personne dans ma famille n’est agriculteur, précise-t-il. J’ai fait une formation de carrossier et je venais faire les vendanges ici l’été. Puis je suis devenu salarié avec Pôle emploi et l’aide préalable à l’embauche, qui permet de se former pendant 400 heures. » Embauché en CDD, puis en CDI et après avoir suivi en parallèle une VAE (validation des acquis de l’expérience) pour obtenir son BPREA, Tybo Chastel a par la suite utilisé sa dotation jeune agriculteur de 47 000 euros pour s’installer dans le Gaec de la Trapanelle (auparavant une EARL) et acquérir 50 % des parts de la société. Aujourd’hui, cette carrière atypique sert à l’agriculteur pour réparer les machines, « un gain de temps et d’argent » non négligeable.
L’exploitation compte 47 hectares, dont 40 labellisés en bio et répartis entre Solaure-en-Diois, Menglon et Barsac. Avec 7,5 hectares de vignes, 9 de noyers (dont 3 qui ne produisent pas encore), 3 de lavande et lavandin et 1,5 hectare de maraîchage, la diversité permet au Gaec un certain équilibre. Les associés ont misé sur un mélange entre une commercialisation en coopérative et de la vente directe. Côté points faibles, la répartition des parcelles sur huit communes différentes ne facilite pas les déplacements et le jeune installé reste inquiet des conséquences du dérèglement climatique.
Faire évoluer le Gaec
« Toutes nos vignes sont en muscat et nous vendons tout à la coopérative Jaillance », explique Tybo Chastel. L’agriculteur est impliqué et participe parfois à des foires pour vendre les produits de la coopérative. Pour les noix, jusqu’à présent le Gaec était adhérent de Coopenoix, mais une réflexion est en cours pour n’avoir que le statut d’apporteur tiers. « On pourra livrer la quantité que l'on veut à la coopérative », explique Jean-Pierre Fraud. En étant adhérent, le Gaec peut garder 15 % de sa production pour la vendre sur les marchés ou exploiter les noix abîmées et tachées en cerneaux ou en huile de noix.
Cette année hélas, malgré une grosse récolte de 10 tonnes contre 6 l’an passé, le marché est saturé. « Il y a eu plus de production mais pas forcément plus de consommation. La coopérative écoule les stocks mais on ne sait pas encore définitivement combien on sera payé », explique Tybo Chastel. Pour la lavande et le lavandin, l’exploitation collabore avec l’entreprise Nateva. « On leur vend la totalité de la production et c'est un prestataire qui vient la ramasser », détaille-t-il.
Côté perspectives, le Gaec mise sur une augmentation de la vente directe pour les noix et le maraîchage. Elsa Fraud, aide familiale, envisage de se former dans les prochains mois pour réaliser des plats, ou autres produits transformés et les proposer en vente directe. La vente à la ferme est également en projet.
Elodie Potente
Le manque de saisonniers, une problématique récurrente
La thématique sélectionnée pour cette rencontre organisée par les Jeunes agriculteurs portait sur les difficultés de recrutement de saisonniers et les solutions concrètes sur le Diois. Au Gaec de la Trapanelle, les saisonniers sont embauchés exclusivement pour le travail dans les vignes : cinq salariés pour l’épamprage et huit pour les vendanges.
Comme dans beaucoup de secteurs, il devient de plus en plus difficile d’en trouver : « Avant que je rentre dans le Gaec, quand on postait une annonce le téléphone n’arrêtait pas de sonner, mais ça fait bien deux ans que ce n’est plus le cas, commente le jeune homme. On est obligé de penser aux alternatives mécaniques ou chimiques : du défanant ou des brosses mécaniques pour l’épamprage », ce qui n’est pas l’idéal. Pour les vendanges, le Gaec s’associe à l’exploitation voisine depuis plusieurs années. Malgré un seul cépage, ce qui facilite le calendrier, de moins en moins de candidats se présentent. « Les prestataires de services se démocratisent sur le secteur, mais c’est en cours. La dernière solution c’est la machine, mais c’est trop cher. »
Pour donner des billes aux agriculteurs présents, Fabien Lambert, directeur d’Agri Emploi 26 est venu présenter des solutions à cette difficulté de recrutement. « Notre but c’est de travailler sur le long terme », explique-t-il. Agri Emploi 26 a une réflexion de fond, ce qui permet à des salariés agricoles de trouver du travail toute l’année, par exemple six mois pour la vigne et six mois en élevage. « On peut aussi mutualiser les emplois entre différentes exploitations. » Ces équilibres professionnels permettent également de proposer à l’embauche des salariés de plus en plus qualifiés. En 2022, Agri Emploi 26 a embauché 1 700 salariés et développe en parallèle un Geiq (groupement d’employeurs pour l’insertion et la qualification). D’autres solutions comme l’Adefa ou la bourse d’emploi des bergers de l’Adem ont été évoquées. Malgré ces solutions locales, le logement reste un problème majeur sur le secteur.