Filière laine : sur le fil d’une meilleure valorisation
Etudiante en master gestion des territoires et développement local, Emma Larue termine son stage de fin d’étude autour des enjeux de la filière laine sur le territoire drômois ainsi que quelques communes des Hautes-Alpes. Elle nous restitue les conclusions de son travail.

Dans quel cadre s’est déroulé votre stage de fin d’étude ?
Emma Larue : « La fédération départementale ovine (FDO) de la Drôme, la chambre d’agriculture et le Parc naturel régional des Baronnies provençales ont entamé, en 2020, un travail de réflexion autour des enjeux de la filière laine ovine sur le territoire. Dans le cadre mon stage universitaire de six mois, j’ai poursuivi cette étude autour des potentialités de valorisation de la laine locale. »
Par quel(s) constat(s) avez-vous débuté ?
E. L. « Le premier constat dressé par les structures porteuses de l’étude pointe un prix de la laine ne couvrant pas les frais de tonte. En 2021, dans la Drôme, le kilo de laine brute s’est vendu dix centimes d’euro en sortie d’élevage. C’est le cours le plus bas jamais enregistré et c’est dix fois moins qu’en 2019 où le prix atteignait 0,70 €. Les effets de la crise sanitaire expliqueraient cette situation. La tonte, elle, coûte en moyenne 1,75 euro par brebis, pour un à deux kilos de laine, selon les races ovines. Le deuxième constat montre l’existence d’un maillage d’éleveurs et d’artisans valorisant la laine locale autour duquel le Parc des Baronnies provençales avait commencé à travailler en 2019. »
Comment avez-vous associé les éleveurs à votre étude ?
E. L. « Un questionnaire a été adressé à environ deux cents d’entre-eux et quarante-cinq ont répondu, ce qui n’est pas si mal. Il s’agissait de connaître la physionomie des élevages, la manière dont se déroulait la tonte (via un prestataire ou par leur propre moyen), vers quel débouché et à quel prix était vendue la laine. Une question portait sur la volonté à s’engager dans une démarche de valorisation : une majorité s’est dit intéressée par cette voie et assurer une tonte plus précautionneuse. »
Quelles pistes de valorisation avez-vous mis en évidence ?
E. L. « Une dynamique est en place à l’échelle nationale et plusieurs initiatives voient le jour autour de projet innovants. Concrètement, trois débouchés sont identifiés : le textile, l’isolation et le paillage pour les végétaux. »
Sur chacun de ces débouchés, avez-vous des éléments plus précis ?
E. L. « Pour le textile, la laine peut être valorisée quelle que soit la race (préalpes, mérinos, mourérous). Une structure de lavage existe en Haute-Loire et des filatures dans la Creuse, le Tarn ainsi qu’en Italie pour les laines les plus fines. Quant aux consommateurs que nous avons interrogés (150 réponses à un questionnaire – ndlr), ils se disent intéressés par une offre textile locale même si les prix finaux des vêtements sont bien plus élevés que ceux importés d’Asie. »
La Scop Ardelaine, en Ardèche, est un exemple qui marche…
E. L. « Oui, c’est un modèle qui fonctionne bien mais qui n’a pas besoin de laine en plus et qui n’est pas, à ce jour, reproductible dans la Drôme en raison d’un investissement très important. »
Qu’en est-il des autres débouchés ?
E. L. « L’utilisation de la laine comme isolant n’est plus à démontrer. Des choses se faisant ailleurs sont possiblement reproductibles ici. En Moselle, avec l’aide du parc naturel régional de Lorraine, une coopérative d’éleveurs a ainsi développé un isolant. La laine est achetée aux éleveurs au prix de 2 € le kilo, un prix qui inclus sans doute des aides publiques. Autre exemple, Terre de laine en Auvergne. Enfin, concernant le paillage, cet autre débouché est simple à mettre en place avec seulement des opérations de lavage et de feutrage de la laine. Localement, Ardelaine transforme en paillage les écarts de tri non utilisables pour le textile. Tout cela est assez encourageant pour mieux valoriser la laine drômoise. »
Propos recueillis par Christophe Ledoux