Focus sur les dernières expérimentations menées par la Serail
Fin janvier, la station d’expérimentation Rhône-Alpes et d’information légumes (Serail), située à Brindas, a organisé une demi-journée technique pour rendre compte des différentes recherches et essais menés en maraîchage en Auvergne-Rhône-Alpes.

Entre 2020 et 2022, la Serail a mené une expérimentation en lien avec la pratique du maraîchage sur couverts végétaux, sans utilisation d’herbicide. Objectif : acquérir des références sur la pratique du roulage de couverts végétaux pour pouvoir y implanter des cultures en pratiquant un travail du sol réduit à la ligne de plantation, technique également appelée strip till. Au début du projet, la station a autoconstruit un rouleau faca de type « Roloflex » pour un coût global de 6 500 € dans les locaux de l’Atelier paysan à Renage (Isère).
Le seigle et le triticale, un duo gagnant
Le but de la campagne d’essais 2021 était de repérer l’impact de la dose de semis, du stade des couverts (avant floraison) à la floraison, après le remplissage des grains ainsi que la nature des espèces composant les mélanges sur l’efficacité du roulage. Les résultats de cette première année ont montré une faible évolution de la biomasse des couverts entre la première et la troisième intervention (soit entre le 14 avril et le 21 juin). La seule évolution remarquable entre ces deux dates est l’émergence des inflorescences et le remplissage des grains.
Le mélange de seigle et de vesce, semé à 120 kg/ha, a produit plus de biomasse sèche et une meilleure compétitivité vis-à-vis des adventices, contrairement à l’association de blé et de pois et d’avoine et de féverole. Le roulage en date du 21 juin a été le plus efficace. Il a été nécessaire d’attendre que les grains soient remplis au stade laiteux afin que le couvert ne se relève pas après le passage du rouleau. En 2022, le triticale a été intégré au banc d’essai. Cette espèce a montré une bonne aptitude au roulage.
Concernant l’impact de la date des semis, les couverts semés début octobre ont eu une meilleure biomasse que ceux semés fin août. Par ailleurs, un semis plus tardif du couvert a limité le développement des adventices et s’harmoniserait mieux avec le calendrier type d’une exploitation (disponibilité des parcelles). Après deux années d’expérimentation, la Serail a pu conclure que, dans les conditions de l’expérimentation, la date de semis du couvert n’a pas avancé celle du roulage. Elle a toutefois un effet sur la biomasse sèche des couverts. Les conditions climatiques de la région empêchant le roulage avant le 15 juin pour les espèces évaluées dans le projet, il serait donc possible d’envisager implanter des choux ou des poireaux après un roulage. Concernant le désherbage, des passages manuels doivent être prévus pour une bonne gestion des repousses du couvert dans la culture suivante.
Le projet Marco a également mis en évidence que des espèces hautes comme le seigle et le triticale sont des bonnes candidates pour la pratique du roulage. La longueur importante de leurs tiges favorise l’action des couteaux du rouleau, privant ainsi la plante d’une quelconque ressource pour repartir.
Quid sur des petites surfaces ?
Le maraîchage sur petites surfaces séduit de plus en plus les nouveaux installés. Selon la Fédération nationale d’agriculture biologique (FNAB), en 2013, 58 % des porteurs de projet installés sur ce type de maraîchage étaient non issus du milieu agricole. Pour aider ces derniers à calculer la viabilité de leur exploitation, la Serail a conduit l’expérimentation Mips AuRA (systèmes de maraîchage intensif sur petites surfaces). Objectif : collecter des données technico-économiques sur ce mode de culture. Ainsi, un système en petite surface (7 000 m² dont 24 % de surface sous abris, miniaturisé à un septième de la taille réelle) et un système en surface classique (3,4 ha dont 11,11 % de surface sous abris, miniaturisé à 6,35 % de la taille réelle) ont été comparés.
Grâce à une étude réalisée entre 2019 et 2021, la station a démontré que « les forts investissements de départ et l’augmentation de la surface sous abri semblent permettre d’obtenir un résultat positif pour le système en petite surface ». Lors de la saison 2021-2022, marquée par des conditions météorologiques défavorables, la proportion de surface sous abri a permis de protéger plus de cultures. « La perte de production a été moins importante dans ce système par rapport au système en surface classique », rapporte la Serail.
Les chiffres d’affaires mesurés sont en moyenne plus élevés dans le système petite surface avec 8,7 €/m² contre
6,3 €/m² pour le système classique.
Le temps de travail mesuré sur petite surface est néanmoins plus conséquent : 20 min/m² développées contre
11,6 min/m² sur surface classique. Un second volet de ce projet, nommé Mips 2, est déjà en cours d’expérimentation.
Serail avec Léa Rochon
NUISIBLE

En Auvergne-Rhône-Alpes, les larves de taupins sont avides des cultures de salades de plein champ et occasionnent de plus en plus de dégâts. Le projet Staupin s’est ainsi articulé autour de quatre axes : l’identification des espèces de taupin présentes sur le territoire, des enquêtes sur les pratiques des producteurs, des expérimentations en lutte biologique et lutte génétique (variétés) et la création d’un outil d’aide à la décision.
La variété Lilybel significativement plus attaquée
L’identification a été menée en 2020 à partir de pièges de Kirfman mis en place sur des parcelles dans la Loire, le Rhône et la Savoie. Ce piège consiste à attirer les taupins présents dans le sol grâce à un appât, puis à les compter. Les larves de taupin ont ensuite été envoyées à l’Inrae Bretagne-Normandie. L’institut a confirmé que le taupin Agriotes sordidus représentait 99 % des taupins piégés. Un second essai mené lors de l’été 2022 (du 4 juillet au 1er août) sur une parcelle dans l’Ain a relevé 104 larves pour un pourcentage de pertes de salades de 2 %. Les larves étaient à 88 % des Agriotes sordidus.
La longueur de la larve a également permis de donner une indication quant à son âge : 71 % des larves mesuraient entre 10 et 15 cm. « Il semble que les taupins arrivent par vague à un moment donné dans la parcelle », a conclu la chargée d’expérimentation, Claire Ducourouble.
Enfin, les essais de lutte génétique mis en place en 2022 sur deux sites dans le Rhône et l’Isère ont confirmé l’appétence des larves de taupin par variété. Dans le cas de l’essai, Lilybel est celle qui a été la plus attaquée (18,9 %). Du fait d’une trop faible pression sur la parcelle d’essai, aucune conclusion sur l’efficacité de produits utilisables en lutte biologique n’a pu être faite. Si l’essai s’est déroulé sur la culture de salades, les producteurs présents ont néanmoins tenu à préciser que les pommes de terre, les épinards, les poireaux et les courges sont également victimes de cette larve. Dans l’ensemble, la polyphagie des larves de taupin est problématique pour des exploitations diversifiées, comme spécialisées. Certains produits de biocontrôle sont actuellement testés en Italie.
Léa Rochon