Accès au contenu
Ressources herbagères

Pâturage dans les vignes : une pratique à développer

Eleveur à Gigors-et-Lozeron, Nicolas Peccoz valorise de début décembre à mi-janvier des parcelles qui sont mises à sa disposition pour garder son troupeau de 350 brebis. Il fait notamment pâturer chaque année 15 à 20 ha de vignes.


 

Pâturage dans les vignes : une pratique à développer
En décembre et janvier, Nicolas Peccoz fait pâturer durant 3 à 4 semaines son troupeau de brebis mérinos et mourérous dans les vignes de la vallée de la Gervanne.

Les couverts végétaux, naturels ou semés, sont de plus en plus présents dans les vignes. Comment les maîtriser et limiter le nombre de passages du broyeur ? Le pâturage par les brebis peut répondre en partie à cette question. Nicolas Peccoz, éleveur à Gigors-et-Lozeron a partagé son expérience sur le sujet avec les viticulteurs présents à Saillans lors de la rencontre sur les couverts végétaux organisée par la chambre d’agriculture fin janvier.

« De début décembre, après la lutte, jusqu’à mi-janvieNicolas Peccozr, je fais pâturer mes 350 brebis en itinérance sur le secteur de la vallée de la Gervanne, en fonction des parcelles qu’on met à ma disposition. Parfois il s’agit de surfaces exploitées uniquement pour le fourrage, plus rarement de couverts végétaux*. Et, depuis quelques années, je les garde également sur 15 à 20 ha de vignes », indique l’éleveur.

Mesurer les effets de l’ingestion de cuivre

Pour s’assurer que cette pratique est sans danger pour les brebis, il a participé durant deux ans à une expérimentation initiée par le syndicat de la Clairette de Die, la Fédération départementale ovine et l’organisme de recherche Fibl France. L’objectif était notamment de mesurer les effets de l’ingestion de cuivre, présent dans le sol et sur la végétation, sur des parcelles conduites en agriculture biologique. De cette étude, il ressort que l’impact sur la santé des brebis est maîtrisé si le pâturage a lieu en fin d’hiver, de janvier à mars, lorsque les dernières applications de cuivre ont pu être diluées par les pluies. Mais l’éleveur devra être particulièrement attentif à ces questions pour éviter que ne se croisent différents facteurs d’hépatotoxicité qui pourraient être amplifiés par la présence de cuivre. De son côté, le viticulteur pourra également s’assurer que les taux de cuivre dans ses sols ne sont pas trop élevés.

Parmi les autres risques, Nicolas Peccoz déconseille de faire pâturer ses bêtes dans des parcelles qui n’ont pas été vendangées. « S’il reste du raisin, les brebis en sont friandes, mais elles risquent de grosses diarrhées, voire d’y rester », commente l’éleveur.

Prévoir une zone refuge

Une fois ces précautions sanitaires prises, se pose la question de la taille du troupeau. Sur ce sujet, la réponse est claire : si le troupeau n’est pas gardé par un berger, il ne faut en aucun cas parquer plus de 50 brebis par hectare. « Mieux vaut un troupeau calme. C’est vrai que l’on craint toujours un mouvement de panique qui provoquerait de gros dégâts sur les vignes, voire des risques d’avortement pour les brebis », reconnaît Nicolas Peccoz. C’est pourquoi Maëva Antheme, conseillère ovins et pastoralisme à la chambre d’agriculture, recommande de toujours disposer d’un espace en dehors des vignes, une zone refuge où les brebis pourront se rassembler. « De mon côté, je recherche systématiquement une friche à proximité pour les faire dormir la nuit », ajoute l’éleveur. Sur certains territoires, la pression de prédation pourra être un frein puisqu’elle obligera à sortir les bêtes de la parcelle chaque nuit, limitant par la même occasion la fumure offerte par le troupeau.

10 à 15 tonnes de fourrage économisées

Maëva Antheme invite tout de même les éleveurs et les viticulteurs à se pencher sur cette pratique, longtemps abandonnée en Drôme, qui tend à revenir au goût du jour. Elle peut en effet offrir une ressource supplémentaire pour les éleveurs. Nicolas Peccoz confirme que, dans son système très extensif, 15 à 20 ha de vignes représentent trois à quatre semaines de pâturage en plein hiver, soit 10 à 15 tonnes de fourrage économisées. Quant au vigneron chez qui a été menée l’expérimentation, Fabien Lombard, de Suze, celui-ci estime que cette pratique lui permet un gain de temps et de carburant, avec un débroussaillage deux fois plus rapide au printemps sur les parcelles pâturées.

Pour faciliter la mise en relation entre les éleveurs et ceux qui auraient des surfaces à mettre à disposition, la chambre d’agriculture de la Drôme s’est rapprochée fin 2020 de la plateforme echange-cerealier-eleveur.fr, afin de l’adapter également pour les viticulteurs ou les arboriculteurs.

S.Sabot

* Cliquez pour récupérer la fiche de l’institut de l’élevage et du Ciirpo répertoriant les espèces semées qui peuvent être pâturées par les brebis.