Stockage de l’eau : le secteur de Crest-Sud passé au crible
Face à des difficultés d’accès à l’eau dans le secteur Crest-Sud, la communauté de communes du Val de Drôme et le Syndicat d’irrigation drômois se sont engagés conjointement dans une étude sur les scénarios de stockage hivernal.
Les questions autour de l’accès à l’eau sont au cœur de toutes les discussions dans le milieu agricole, et encore plus pour les agriculteurs du secteur de Crest-Sud. « Les enjeux du changement climatique nous rattrapent plus vite que prévu. Nous devons, agriculteurs, essayer de travailler différemment, non sans eau, mais différemment », a prévenu Christian Caillet, vice-président en charge de l’alimentation, de l’agriculture et de l’irrigation au sein de la communauté de communes du Val de Drôme (CCVD). En partenariat avec le syndicat d’irrigation drômois (SID), la CCVD s’est lancée en septembre dernier dans une étude sur les scénarios de stockage hivernal pour le secteur de Crest-Sud (Chabrillan, Divajeu, Grâne, Autichamp, La Roche-sur-Grâne, La Répara-Auriples et Crest). « Il est de notre devoir aujourd’hui de trouver des solutions pour vous apporter de l’eau », a annoncé Bernard Vallon, président du SID, à la quinzaine d’agriculteurs présents mercredi dernier à la salle des fêtes de La Répara-Auriples.
Se doter d’un outil collectif
« Depuis 1995, le territoire est classé en déséquilibre quantitatif, nécessitant une baisse des pressions de prélèvements de la rivière Drôme par tous les usagers en été, dont l’agriculture (- 15 %). Depuis 2022, les volumes prélevables sont respectés par l’agriculture notamment grâce aux projets portés par le monde agricole et soutenus par les acteurs de l’eau et du territoire (retenue des Juanons en 2006, substitution depuis le Rhône en 2022, organisation des tours d’eau, évolution des assolements, etc. », a rappelé Elise Chevallier, chargée de mission agri-environnement à la CCVD.
Malgré tout, il s’avère que des difficultés d’accès à l’eau persistent, notamment en été. « Le secteur Crest-Sud reste le seul non sécurisé » a-t-elle ajouté, alors que des agriculteurs - en dehors des réseaux collectifs - n’ont toujours pas accès à cette ressource.
Un enjeu de territoire
« Les termes “tour d’eau” et “restriction” font partie de notre quotidien, a déclaré Ludwig Blanc, agriculteur à Chabrillan et représentant du SID à la commission locale de l’eau. Toutefois, on ne peut pas envisager de travailler sereinement sur les exploitations de cette façon. L’objectif de cette étude est de se doter d’un outil qui permette de répondre largement aux enjeux de la Vallée et plus particulièrement sur la rive Gauche. Il serait en effet plus simple d’avoir un outil concret qu’une assurance qui a des limites. »
L’étude menée a dans un premier temps permis d’évaluer les besoins en eau à stocker sur Crest-Sud pour soulager la rivière et répondre aux besoins de l’activité agricole actuels et futurs. En fonction de l’autorisation de prélèvement dans la rivière Drôme, il a été estimé des besoins de stockage allant de 1,1 à 3 millions de mètres cubes (Mm³). « Cela s’explique par la prise en compte des possibles évolutions climatiques (+ 4 °C à 2100), de l’hydrologie de la rivière Drôme à 2050, de l’agriculture (assolement, part des surfaces irriguées, pratiques agroécologiques...) », a détaillé Benoit Laval, chargé de mission « Grands projets » au SID.
Trouver du foncier
La recherche de sites pour pouvoir stocker ces volumes d’eau est donc indispensable. « Nous réalisons un inventaire des sites potentiels dans le secteur, à partir de 5 000 m³, à proximité des réseaux et des prélèvements individuels, et dans des zones encore non irriguées. À partir de là, nous pourrons élaborer des scénarios d’ouvrages collectifs alimentés par dérivation de la Drôme », a-t-il poursuivi. Selon les scénarios, l’emprise foncière pourrait être relativement conséquente. « Il va falloir que le monde agricole soit prêt à lâcher un peu de foncier pour pouvoir travailler du mieux possible », a affirmé Christian Caillet. Et Bernard Vallon d’ajouter : « Ces projets passeront en premier lieu par la réserve foncière. Soyons honnête, si nous ne trouvons pas de terrain, nous ne ferons rien. Les seules solutions possibles, c’est de faire du stockage ».
Les analyses coût/efficacité, coût/bénéfices et analyse environnementale feront l’objet du volet 3 de l’étude. Une réunion de restitution des résultats de cette étude devrait être organisée d’ici la fin de l’année.
Amandine Priolet
Repères
Partenaires : CCVD et SID (+ comité de pilotage multi-acteurs).
Bureaux d’études : Société du Canal de Provence et SICAA Études.
Durée du projet : 18 mois (début : septembre 2024).
Budget alloué : 129 000 € (dont 80 % pris en charge par l’État).