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Fruits

Et si la France devenait le verger de l’Union européenne ?

L’étude « Quels futurs pour les filières fruits et légumes françaises d’ici 2040 ? » dessine un scénario de reconquête visant à rendre la France plus autonome en fruits et légumes. Notre pays aura ainsi les moyens de s’imposer sur le marché européen aux dépens de l’Espagne.

Et si la France devenait le verger de l’Union européenne ?
©ArchivesAD26
Le scénario de reconquête impose des investissements dans la recherche et l’innovation.

« La filière fruits et légumes (F&L, dont les pommes de terre) n’occupe que 2,3 % de la surface agricole utile française et représente un peu plus de 13 % des exploitations françaises. Elle est caractérisée par des modèles de production diversifiés », diagnostiquent les auteurs de l’étude prospective de 185 pages commandée par le ministère de l’Agriculture et intitulée « Quels futurs pour les filières fruits et légumes françaises d’ici 20240 ? ». Cette diversité incarne à la fois sa force et sa faiblesse.

Quoi qu’il en soit, près de la moitié des F&L consommés en France est importée. Au cours des douze derniers mois, notre pays a exporté 5,1 milliards d’euros (Md€) de fruits et de légumes sur les 15 Md€ produits dans l’Hexagone, selon le service statistique du ministère de l’Agriculture. Et il en a aussi importés 9,3 Md€. Aussi l’Hexagone est structurellement déficitaire de près de 4,2 Md€, des fruits essentiellement (3,5 Md€). Après avoir dressé un diagnostic exhaustif des deux filières, les auteurs de l’étude prospective sur les filières F&L définissent quatre scénarios d’évolution envisageables : « Souveraineté alimentaire européenne » ; « Prise de conscience écologique » ; « Du blé, du blé, du blé ! » et « Reconquête opportuniste ». Selon les auteurs, ce dernier scénario semble le plus pertinent à l’horizon 2040. Ils le présentent ainsi : « La France lance un plan ambitieux de conquête des F&L pour répondre à un double objectif social et économique et devenir le premier fournisseur de vitamines naturelles de l’UE ». En 2040, l’Espagne ne sera plus le potager et le verger de l’Europe.

Limitation des distorsions de concurrence

Ce scénario de reconquête impose des investissements dans la recherche et l’innovation pour développer et tester les pratiques agricoles adaptées aux changements climatiques mais aussi une réorientation des aides PAC vers la production de fruits et légumes. L’accroissement global des volumes permettra le développement de cultures de légumes industries et de fruits dédiés à la transformation. Mais les contributeurs de l’étude prospective suggèrent une levée temporaire des restrictions d’usages de produits phytosanitaires en attendant la mise au point de solutions de biocontrôle.

Le scénario de « Reconquête opportuniste » des filières F&L s’appuie sur la proposition de quatre axes stratégiques détaillée dans l’étude prospective. Il s’agit notamment « d’adapter la production de fruits et de légumes dans un contexte de changement climatique (axe 1) en construisant des filières, intégrant l'amont et l'aval dans de nouveaux bassins de production en lien avec l’évolution des biogéographies (ou des aires de répartition) des plantes » et, en facilitant l’installation et l’accès au foncier (axe 2).

L’axe 3 porte sur la limitation des distorsions de concurrence et sur la généralisation des « clauses miroir » dans les négociations commerciales et la promotion de l’origine des produits consommés. Et l’axe 4, des campagnes et actions de sensibilisation seront lancées pour inciter les Français à consommer davantage de fruits et légumes locaux frais ou transformés.

Ne pas attendre

Avant de définir ces quatre scénarios prospectifs, « un travail spécifique sur l’évolution des biogéographies de onze espèces a été mené afin d’éclairer les discussions sur la continuité de la production agricole française et ses capacités d’adaptation aux évolutions induites par le changement climatique », expliquent les trois contributeurs. Leur principal enseignement est le suivant : « retarder les migrations de bassins et les implantations de nouvelles espèces et/ou variétés ne fait que retarder et rendre plus risquée la nécessaire transition des productions » qui s’opère notamment, en production fruitière, sur plusieurs années. Aussi, l’étude prospective prône l’obtention de variétés et des pratiques culturales adaptées aux conditions climatiques extrêmes : décalage des dates de semis, association de différentes cultures et irrigation de précision généralisée par exemple.

Actuagri